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PEUT-ON VENIR À BOUT D'UNE CROYANCE PAR LE RAISONNEMENT ?

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« INTRODUCTION «Tu as sans doute raison, mais je crois quand même, pour ma part, que...

» : dans un échange quotidien, cette réplique marque-t-elle l'échec du raisonnement face à la croyance? Les deux modes de pensée sont-ils différents au point de ne pouvoir s'influencer? DÉVELOPPEMENT I.

La croyance • Elle produit des effets effectifs: le sujet qui y adhère se croit menacé d'un véritable appauvrissement, ou d'un égarement, s'il se trouve contraint d'y renoncer. • Elle ne se fonde pas sur la raison, mais se présente comme un dogme impossible à analyser ou à seulement examiner. • Le «croyant» (politique, idéologique ou religieux) peut se transformer en fanatique, c'est-à-dire recourir à la violence, pour imposer ses dogmes, et une telle issue est évidemment en totale contradiction avec le raisonnement. • La croyance paraît ainsi insensible à toute argumentation. II.

Enthousiasme et détachement • Raisonner suppose du recul par rapport aux situations, et une certaine «froideur»: le raisonnement ne peut s'élaborer que si le sujet ne se sent pas intimement concerné. • Le recours à la logique du raisonnement (analyse, démonstration, articulations logiques) diffère la réponse et demande du temps, là où le croyant exige une réponse immédiate. • Le raisonnement, parce qu'il est logique, a une portée universelle qui paraîtra toujours trop abstraite au croyant, qui privilégie une relation individuelle avec la «vérité ». III.

Détermination des deux attitudes • Admettons que le raisonnement puisse en apparence ébranler la croyance, ou même la détruire.

Cette victoire est-elle définitive? ne risque-t-on pas au contraire de voir resurgir la croyance sous une autre forme, une version de remplacement? • Cf.

la différence entre la critique de la religion telle que l'entreprend Feuerbach, et celle qu'entend mener Marx : le premier croit venir à bout de la religion en révélant sa fonction de compensation imaginaire («l'homme pauvre possède un dieu riche ») — mais Marx fait remarquer que, si l'homme reste pauvre, il aura toujours besoin de produire un dogme consolateur. • On en retiendra que la croyance ne sort pas du néant: elle est déterminée par les situations concrètes, matérielles des individus.

De la même façon, le privilège reconnu au raisonnement implique l'accès à des conditions qui permettent de reconnaître sa valeur. • Ainsi l'opposition n'est pas seulement entre deux relations différentes avec la pensée (engagement personnel et affectif d'un côté, considération de l'universalité logique de l'autre), elle se fait, plus radicalement, entre deux modes d'existence aboutissant à des manifestations hétérogènes de la pensée. CONCLUSION C'est pourquoi, si le raisonnement peut ambitionner (sans doute en vain) de détruire la croyance, la réciproque ne se constate pas: la croyance cherche à vaincre, non pas le raisonnement (qu'elle peut cependant censurer), mais une autre croyance.

Ce qui ne peut aboutir qu'à un conflit violent, qui vient alors bafouer totalement la raison.. »

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