Peut-on tout partager ?
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Introduction
Sur une affiche célèbre du début du XXeme siècle, la Reine Victoria et d'autres chefs d'Etats européens se
partagent un gâteau qui représentent la Chine.
Pendant qu'ils se « partagent » un pays, d'autres se partagent des
gâteaux ou des fortunes.
D'autres encore partagent leurs sentiments ou leurs opinions.
Le verbe « partager »
semble donc pouvoir être appliqué à peu près à toute chose, soulevant une question, peut-on tout partager ?
Afin de répondre au sujet il s'agira de voir si l'on peut trouver au moins une chose qui ne se partage pas.
En effet, si
tel était le cas il nous faudrait répondre par la négative.
Pour notre part, nous soutiendrons, en analysant les deux
acceptions du verbe partager qui signifie à la fois « diviser » et « mettre en commun », nous montrerons que l'on ne
peut pas tout partager puisque tout n'est pas divisible et tout ne peut être mis en commun ou communiqué.
Pour ce faire, nous étudierons tout d'abord la divisibilité de toute chose, ce qui nous mènera à étudier la possibilité
de mettre en commun toute chose pour enfin voir que cette mise en commun est limitée car dépendant des
« outils », tels que le langage, que nous employons pour la réaliser.
1.
Le partage comme division, étude de la divisibilité de toute chose
Si l'on considère la synonymie entre « partager » et « diviser », on est amené à réfléchir sur la possibilité d'une
divisibilité de toute chose.
Or, on est poussé à penser que toute chose est divisible puisque l'on s'aperçoit que l'on
peut « diviser » ou « fractionner » beaucoup de choses, des gâteaux aux difficultés selon le Discours de la Méthode.
Descartes, dans cette oeuvre, se fixe comme méthode de diviser les difficultés afin de simplifier sa tâche.
Ces
choses, qui sont pourtant très différentes, sont unies simplement par leur divisibilité, c'est à dire la possibilité de les
fractionner en parties.
Dès lors, il existe deux possibilités.
Soit on suppose que les difficultés, les gâteaux, la matière etc.
sont divisibles à
l'infini et alors on peut tout partager puisque la liste des choses que l'on peut diviser rassemble à peu près tout ce
qui existe, soit on suppose qu'il existe des « atomes », ou particules indivisibles et, partant, on ne peut pas tout
partager.
Parmi les choses divisibles se trouve la matière.
Or, on peut supposer soit que la matière est divisible à l'infini, soit
qu'elle est composée d'atomes.
Certes l'atome, au sens de la physique, peut encore être réduit à des particules
élémentaires mais il s'agit en fait de soutenir que la matière est constituée de particules indivisibles.
Cette dernière
possibilité est, intellectuellement au moins, séduisante car si la matière est divisible à l'infini il semble difficile de
comprendre comment, ou de quoi, la matière est constituée.
Dès lors, si on soutient cette thèse tout n'est pas
divisible puisque certaines choses ne peuvent être divisées par nature.
2.
Le partage comme répartition ou mise en commun
Pourtant, lorsque Descartes, dans le Discours de la méthode affirme que « le
bon sens est la chose du monde la mieux partagée », il ne veut pas dire que
le bon sens est divisé mais qu'il est réparti entre les hommes, qu'ils le
possèdent en commun, il nous faut donc considérer cette acception du verbe
« partager ».
Certes, l'idée de « division » est encore ici présente puisque le « bon sens »
est réparti, divisé, entre les individus mais cette nouvelle acception introduit
les idées de mise en commun ou de distribution qui étaient jusqu'ici absentes.
Il s'agit donc maintenant de savoir si l'on peut tour mettre en commun.
Tel
n'est pas le cas, on ne peut, par exemple puisque ceci n'est pas en notre
pouvoir.
On ne peut ainsi décider de partager son géniteur avec quelqu'un
d'autre.
Dès lors, on ne peut tout partager, c'est à dire tout avoir en
commun.
En introduisant la notion de distribution, on introduit aussi la notion d'altérité.
En effet, on met en commun quelque chose « avec quelqu'un ».
Nous sommes
ainsi amenés à concevoir le partage comme la communication.
En effet, si l'on
peut partager des biens physiques, on peut aussi partager des biens
« abstraits », tels que les connaissances ou les sentiments il faut donc avoir
recours au langage dans leur cas.
En effet, il s'agit, dans le cas de la
communication d'avoir avec l'autre un « moyen terme », comme le langage,
en commun.
Dans le cas de la communication, il s'agit en effet de partager quelque chose avec notre interlocuteur afin de
pouvoir communiquer.
Ainsi, Locke montre dans l'Essai sur l'entendement humain montre que les hommes peuvent
communiquer car ils ont tous un entendement qui a la même structure.
Dans la Théorie des sentiments moraux,
Adam Smith montre que la « sympathie », c'est à dire la capacité de chacun à partager les sentiments des autres,
permet de se comprendre..
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