Peut-on soutenir que le désir est l'essence de l'homme ?
Extrait du document
«
Introduction :
Bien définir les termes du sujet :
- « Le désir » : vulgairement, c'est avoir envie de quelque chose, en souhaiter sa possession pour avoir du plaisir.
C'est ce que l'on ressent lorsqu'un besoin spontané s'est transformé en une tendance consciente orientée vers un
but conçu ou imaginé.
Le terme ici au singulier, laisse supposer que le désir est considéré comme une sorte d'entité
avec des caractéristiques et des lois propres.
Il s'agit du désir en général, de la possibilité de désirer qui est en
nous, et non pas du désir de telle chose en particulier que tel individu aurait en lui.
- « Essence » : c'est ce qui fait qu'une chose est ce qu'elle est, c'est ce qui constitue la nature d'un être, sa
particularité, ce qui la distingue de tous les autres.
- « L'homme » : le terme est très vague et n'invite pas à considérer l'être humain dans un domaine particulier
comme celui de la politique (on aurait alors parlé de citoyen), mais plutôt de la manière la plus générale possible.
Il
s'agit de regrouper tous les individus conscients.
- « Soutenir » : c'est affirmer quelque chose sans fléchir.
Construction de la problématique :
Le sujet pose la question de l'essence de l'homme, tente de trouver quelles sont les caractéristiques qui le
distinguent des autres vivants, et propose comme critère de distinction, le désir.
Si on définit ce dernier comme
étant strictement un besoin spontané et une tendance vers quelque chose, alors il semble que nous le partagions
avec les autres vivants.
Attention, le sujet n'est pas un sujet sur le désir, mais sur l'essence de l'homme.
Se pose donc la question de savoir si l'essence de l'homme est le désir en tant que tel, ou si c'est plutôt le
rapport spécifique qu'il entretient avec le désir.
Autrement dit, comment l'homme se positionne par rapport au désir,
et comment dévoile t-il ainsi son essence ?
Plan :
I/ Le désir est l'essence de l'homme :
L'intitulé du sujet propose d'examiner l'hypothèse selon laquelle "le désir est l'essence de l'homme".
Cette
formule est issue de l'Ethique de Spinoza, III.
Selon l'auteur, les positions qui invitent l'homme à nier son désir, ou à
lui laisser libre cours sont absurdes car elles ne prennent pas en compte la véritable essence de l'homme et du désir.
Ce dernier est une détermination essentielle de l'homme avec laquelle il faut savoir composer.
● Spinoza insiste tout d'abord sur le fait que "le désir est l'essence même de l'homme", et qu'il est donc non
seulement impossible pour l'homme de s'en libérer, mais aussi inutile.
Le désir est un élément vital, c'est une
dynamique concrète fondée sur le conatus.
Il est la puissance même d'exister, l'affirmation positive de soi, c'est une
force vitale.
Mais il faut cependant apprendre à le connaître et à le maîtriser car selon la chose sur laquelle il porte,
il peut provoquer soit la joie – accroissement de la puissance d'exister, soit la tristesse – rend l'homme passif, il
subit au lieu d'agir, et n'a plus de puissance.
Pour Spinoza, « le désir est l'essence même de l'homme, en tant qu'elle est
conçue comme déterminée, par une quelconque affection d'elle-même, à faire
quelque chose ».
Le désir est le terme générique englobant tous « les efforts,
impulsions, appétits et volitions de l'homme ».
Il constitue l'essence de
l'homme parce qu'il est le mouvement même par lequel ce dernier s'efforce de
persévérer dans son être.
Chacun désire ce qu'il juge utile à la conservation
de son être et susceptible d'en accroître la perfection, c'est-à-dire ce qui lui
semble bon, ce qu'il aime.
En revanche, il désirera éviter ou détruire ce qui lui
paraît faire obstacle au maintien de son être ou entraîner son
amoindrissement.
Ainsi « chacun désire ou tient en aversion nécessairement
par les lois de sa nature ce qu'il juge être bon ou mauvais ».
Le désir est donc
une disposition naturelle, et tout désir est en soi légitime.
Cependant ce que
l'homme désire parce qu'il le juge comme lui étant utile n'est pas
nécessairement ce qui lui est vraiment utile.
C'est que communément «
chacun juge selon son propre sentiment ce qui est bon, ce qui est mauvais »,
non selon sa droite raison.
Or le sentiment, en tant que passion de l'âme, est
une « idée inadéquate », c'est-à-dire mutilée et confuse, et qui est donc
cause d'erreur et de fausseté.
C'est pourquoi les hommes, en croyant
observer leur intérêt, désirent souvent comme utile ce qui leur est en fait
nuisible.
LE « CONATUS » OU EFFORT DE L'ÊTRE.
Rien ne va au néant.
Le nihilisme est absurde : « Nulle chose ne peut être détruite, sinon par une cause
extérieure » (Éthique, III, P.
4).
L'essence d'une chose est une manifestation limitée de l'essence de la Cause de soi, qui est puissance infinie :
« Tant que nous considérons seulement la chose elle-même, et non les causes extérieures, nous ne pouvons
rien trouver en elle qui puisse la détruire » (ibid.)..
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