Peut-on se fier aux mots ?
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«
Discussion :
La question posée renvoie au rapport que l'on entretient avec les mots, à savoir que ces derniers sont l'expression
du langage et donc de la volonté.
Cependant, les mots reflètent également l'inconscient et tout ce qu'il cache, ce
qui entraîne leur ambiguïté.
Est-ce pour autant qu'il faut se méfier des mots ?
I.
Première partie : Le pouvoir des mots et du langage.
Roman Jakobson, en tant que linguiste, a distingué plusieurs fonctions du langage montrant que l'une d'entre elles
consiste en un moyen d'action sur autrui.
La communication va agir sur l'autre, l'interpeller, solliciter son attention.
Le but de l'émetteur est de conduire à une transformation de l'état de son interlocuteur.
Lorsque le message a pour
but d'agir sur autrui, il recourt par exemple à l'impératif « partez » « fermez cette porte », mais il peut être plus
discret : « Vous partez déjà ? » .
C'est le statut de la personne qui donne le ton au message : si ce message est
destiné à des amis, il peut s'agir d'un reproche (agir pour le culpabiliser par exemple, ou au contraire le solliciter pour
rester), s'il est destiné par un patron à un employé, il contient une leçon.
Les mots supposent une dimension
interpersonnelle, interactionnelle évidente dans toute relation sociale.
Le langage rend compte de l'attitude qu'un
sujet a vis-à-vis de ce qu'il dit et de son interlocuteur.
Tout message porte une trace de notre état affectif.
Exemple : l'utilisation des interjections, les variations de ton, exclamations laissent des marques de cet état.
Lorsque c'est la structure du message qui est l'objet d'attention, la référence même du message, on peut parler de
fonction poétique.
C'est le message qui est l'objet de la communication : jouer avec le langage.
On assiste alors à
un investissement des messages en tant que tels, au-delà de leur contenu par le biais d'un exercice de style ou de
la poésie.
Il est possible de mettre un soin particulier à construire ses messages au-delà du contenu.
II.
Deuxième partie : le danger des mots.
Si l'on ne peut se fier aux mots cela veut dire que parfois ils ne sont plus sous l'emprise de la raison, ou alors que la
raison a la volonté inconsciente de les dire.
On a toujours discerné deux choses : la parole des mots et la parole du
corps.
La parole du corps est considérée comme celle qui parle le plus parce qu'elle dit des choses qui dépassent
notre volonté consciente, elle s'exprime par un autre moyen qui échappe au processus de contrôle que subissent les
mots.
Ainsi au contraire les mots semblent moins nous échapper et au contraire répondre à notre volonté, à ce que
l'on veut dire et ce que l'on veut cacher.
Le corps lui en revanche ne ment pas, il exprime par des douleurs ou autre
des non-dits, en fait tout ce que les mots n'ont pas su dire ou alors pas voulu dire.
« Le langage travestit la
pensée.
Et notamment de telle sorte que d'après la forme extérieure du vêtement l'on ne peut conclure à la forme
de la pensée travestie; pour la raison que la forme extérieure du vêtement vise à tout autre chose qu'à permettre
de reconnaître la forme du corps." Wittgenstein, Tractatus logico-philosophicus.Il y a donc une grande précaution
établie autour de cette crainte de mots qui « dépasseraient notre pensée », mais cette expression encore est
mensonge puisque tout ce qui est dit l'est à bon escient, c'est-à-dire qu'il reflète notre pensée, ainsi rien ne
dépasse la pensée.
La question posée renvoie nécessairement à une réponse en partie d'ordre psychanalytique, une
réponse qui dirait que tout ce que la parole a en quelque sorte trahi elle l'a fait parce que c'était nécessaire qu'il en
soit ainsi.
Il y a un moment ou une phrase ou une pensée doit être dite même si elle ne pas être acceptable pour les
autres.
Nous pouvons donc dire que les mots en eux-mêmes ne trahissent pas la pensée mais que l'inconscient le
fait, puisque c'est lui qui impose aux mots d'être dits.
III.
Troisième partie : les mots et l'inconscient.
Par conséquent, si les mots, peuvent trahir notre pensée à travers des lapsus inconscients, alors il faudrait se
méfier des mots et de leur signification, car leur signification serait donc bien plus profonde qu'on ne pourrait le
croire.
On pourrait donc se fier aux mots et à leur signification mais on pourrait aussi se méfier de leur violence.
Ainsi, comprendre les mots serait en fait un art, un art d'interpréter tout dans un second sens, bien plus profond
que la signification première qui nous apparaît.
Les mots deviendraient donc le chemin par lequel on peut arriver à
l'inconscient, le chemin par lequel d'autres choses se dévoilent.
De plus, aucun mot n'est choisi au hasard, et il
reflète clairement un état d'esprit, ou une pensée.
Il n'existe donc pas de mots erronés, c'est-à-dire que souvent
lors d'une dispute, l'on en vient à dire des mots que l'on regrette, et pour s'excuser on prend le prétexte de la
colère, ou d'une folie passagère, qui nous ferait des choses que l'on ne pense pas.
Cependant si l'on réfléchit à
cette question, on s'aperçoit que c'est impossible, on ne dit jamais quelque chose que l'on ne pense pas.
Même si
cette pensée est inconsciente et nous fait honte, elle existe cependant quelque part en nous, et les mots que l'on
dit, en sont bien le reflet.
C'est également pour cela, que l'on ne peut rester totalement indemne face à l'humour,
car peu importe le ton sur lequel on fait une réflexion, ce n'est pas ce à quoi il faut faire attention, mais ce dont il
faut faire abstraction de manière à n'entendre plus que les mots et leur simple signification ; qui malgré le ton
humoristique, sont tout de même dits, prononcés et donc pensés.
Conclusion :
Sigmund Freud : « Au commencement des temps, les mots et la magie étaient une seule et même chose.
».
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