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Peut-on se faire violence a soi-même ?

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« Introduction L'expression « se faire violence à soi-même » est surprenante dans la mesure où la violence est avant tout considérée comme une force brutale exercée contre quelqu'un d'autre que soi-même, une force brutale qu'on se souhaite pas exercée contre soi.

Pourtant l'expression laisse entendre qu'on pourrait volontairement exercer cette contrainte qu'on juge illégitime sur soi, on pourrait vouloir quelque chose qu'on trouve indésirable. Deux niveaux de sens sont à distinguer dans l'expression, chacun menant à une dimension de la problématique. On peut distinguer un premier niveau de sens, le sens propre ou le sens fort de l'expression qui laisse entendre que se faire violence à soi-même revient à s'infliger cette forme de force brutale, cette violence qui est à l'origine exercée contre autrui.

Ce premier niveau de sens met en cause la définition d'individu comme sujet autonome : l'homme est-il suffisamment autonome pour pouvoir s'infliger à lui-même, de lui-même une forme de violence ? Est-il capable de s'infliger volontairement du mal, alors même que la violence se définit en terme d'indésirable ? La violence ne vient-elle pas toujours de l'extérieur, d'autrui ? Le second niveau de sens concerne la conception du vécu moral.

On emploie l'expression « se faire violence à soi-même » pour désigner ces situations où on se contraint, où on se contient, on se force à faire quelque chose qu'on n'a pas envie de faire, comme faire son devoir alors qu'on a envie de satisfaire d'autres désirs. L'agir moral se définit-il en termes de contrainte ? N'agit-on moralement qu'en se faisant violence ? Les deux niveaux de sens de l'expression remettent en cause la capacité de l'individu à pouvoir prendre une telle prise de distance avec lui-même jusqu'à se faire violence à lui-même.

D'une part, la violence que peut s'infliger un individu vient-elle de lui-même ? L'individu est-il si autonome qu'il peut se retourner contre lui-même ? D'autre part, l'action morale n'est-elle qu'une contrainte ? I.

Le vécu moral se définit en termes de violence avec soi-même. A.

Le discours des religions 1.

L'intériorisation du combat du bien contre le mal « Tout homme qui regarde la femme d'un autre en la désirant a déjà commis l'adultère avec elle en lui-même.

Si ton oeil droit est pour toi une occasion de chute, arrache-le et jette-le loin de toi ; car il est avantageux pour toi qu'un seul de tes membres périsse, et que ton corps entier ne soit pas jeté dans la géhenne» Matthieu, 5, 25-28. Pascal : l'homme partagé entre sa grandeur et sa misère, le péché originel et la rédemption, le chrétien doit racheter ses péchés en traquant ce qu'il y a d'impur en lui. 2.

Un certain concept de l'homme : le dualisme Opposition des désirs impurs, ceux du corps qui rapprochent l'homme de l'animal, à la volonté de la raison supérieure, ce qui rapproche l'homme de Dieu B.

Le dualisme de Descartes 1.

L'hétérogénéité de l'âme et du corps La conception du corps de Descartes rejoint celle de Platon, « l'homme est le tombeau de l'âme ».

Le corps représente ce qu'il y de corruptible dans l'homme, il se rattache à la faculté d'imagination, faculté sujette à l'erreur et l'illusion qui se donne pour vérité. L'âme représente la parcelle de divin en l'homme, elle est ce qui subsiste après la mort car elle est indépendante du corps, elle est liée à l'entendement pur qui accède à la vérité en-soi. « Je ne connais rien de violent dans la nature, sinon au respect de l'entendement humain qui nomme violent ce qui n'est pas selon sa volonté ou selon ce qu'il juge devoir être » Lettre à Mersenne, Janvier 1638.

La violence est un terme qui intervient lorsqu'il s'agit d'évoquer le conflit entre la raison et l'imagination, entre la volonté et les désirs. 2.

La liberté de l'homme La liberté humaine est une liberté d'indifférence, l'homme a le pouvoir de choisir le faux ou le mal, il est indéterminé. Mais seul Dieu peut être défini selon un libre-arbitre, Dieu est la seule volonté vraiment libre. Le cogito cartésien : l'homme est replié sur lui-même, il n'est pas certain que les corps extérieurs existent, il vit de manière autonome. Dans un discours religieux ou dans une pensée orientée par des croyances, l'homme se définit par un dualisme, une opposition entre l'imagination et la raison, le corps et l'âme, des désirs animaux et une volonté divine. Le vécu moral est l'histoire des victoires et défaites de ces pôles de l'individu, ce qui peut par ailleurs justifier le système de récompenses, de punition ou de rachat des fautes, la violence avec soi-même est une dimension du devoir.

Mais on peut se demander si l'action morale ne satisfait pas un désir supérieur et si dans ce cas, la violence avec soi-même est injustifiée. II.

L'acte moral est rationnel, mais il satisfait le désir de bien, la violence envers soi-même n'a pas de. »

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