Peut-on penser la mort ?
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«
Introduction :
Peut-on penser la mort ? Certes l'homme est le seul animal, pense-t-on, qui sait qu'il va mourir ; mais cette
pensée de la mort n'est pas une évidence et pourtant comme le remarque Jacob dans La logique du vivant : « Les
limites de la vie ne peuvent être laissées au hasard.
Elles sont prescrites par le programme qui, dès la fécondation
dans l'ovule, fixe le destin génétique de l'individu […] la mort fait partie intégrante du système sélectionné dans le
monde animal et dans son évolution.
» Avant d'être une catégorie du vécu de la conscience, la mort se présente à
nous comme un phénomène biologique.
Mais la mort reste cet irréel, difficilement pensable.
Nous n'en avons aucune
expérience à part celle de la mort d'autrui mais il semble bien que la pensée que ma propre mort en tant qu'« être
mort » soit impossible : ni connaissable ni pensable.
Dès lors la mort serait-elle l'objet insaisissable pour la
philosophie, un point aveugle de notre condition : un absolu impensable ? De dire alors de la mort ? En effet, je peux
penser autour de ma mort ou à propos d'elle mais il n'en reste pas moins qu'elle me reste impénétrable.
Le problème est alors celui de comprendre le statut ou le sens d'un objet qui détermine notre existence et qui
pourtant semble nous échapper systématiquement.
Il s'agit de comprendre ou du moins de dire ce qu'est la mort.
Dans ce cas, il nous appartiendra d'expliquer cette difficulté de la pensée de la mort pour nous (1ère partie) donc de
voir ce que nous avancer de certain sur la mort et pourquoi se demander si du fait de la difficulté de la penser cela
ne serait pas le signe que la mort ne nous concerne pas en tant qu'objet de pensée donc pas plus de crainte non
plus.
Ainsi la mort ne serait rien pour nous (2nd partie) ou du moins une simple fin qui ne devrait pas être objet
d'angoisse ou de crainte.
Néanmoins, il nous appartiendra tout de même si justement une pensée de la mort ne
serait pas justement cette acceptation de l'angoisse, donc de la ressaisir dans une positivité conceptuelle.
I – Difficulté et inintelligibilité
a) En corrélation avec la nécessité biologique de la mort, on peut dire que la mort est un a priori de notre condition.
Où que se trouve la vie, la mort est déjà présente comme fin et détérioration.
La mort est déjà là, avant la pensée,
dès lors elle est impénétrable à l'effort pour la saisir : elle enveloppe la pensée et rend son objet impénétrable et
c'est bien ce que nous dit Jankélévitch : « A quelque moment que nous entreprenions de le pense, l'a priori mortel
est déjà là, opaque, impénétrable et enveloppant ; la pensée a beau reprendre son élan pour tenter de faire de la
mort un objet, elle ne parvient pas à l'insérer, et elle glisse, impuissante, sur ce monstrueux a priori.
Dans la muraille
lisse et massive qui la surplombe, elle cherche en vain des prises pour s'accrocher et faire levier.
» Nous n'avons pas
d'expérience de la mort à part la mort d'autrui, mais nous ne l'expérimentons pas, en ce sens, nous ne pouvons
former aucune idée sur elle semble-t-il, ni même la décrire dans son rapport à l'existence et à la fin de la vie.
Même
la pensée abstraite ne peut se saisir de la mort.
La mort est simplement une constante biologique que nous
intégrons comme fin de la vie.
b) Le problème essentiel de cette pensée de la mort c'est comme le dit Kant dans l'Anthropologie d'un point de vue
pragmatique que « la pensée que « je ne suis pas » ne peut absolument pas exister ».
En effet, il y a même une
impossibilité quasi logique à cette affirmation car si je ne suis pas, je ne peux pas être conscient que je ne suis pas.
C'est pourquoi nous pouvons dire que nous ne sommes pas en bonne santé ou en forme ce qui revient à doter ce
« je » de prédicats négatifs.
Mais nier le sujet de la pensée est tout simplement impossible pour la pensée et c'est
bien ce dont Descartes avait l'expérience dans les Méditations métaphysiques avec son doute hyperbolique.
En
effet, la seule réflexion qui était certaine était la base du « cogito » dont la formule deviendra célèbre dans le
Discours de la Méthode : « je pense donc je suis ».
Et de là il nous est impossible de poser : je pense que je ne suis
pas.
C'est pourquoi Kant dans l'Anthropologie d'un point de vue pragmatique dira : « La peur de la mort qui est
naturelle à tous les hommes, même aux plus malheureux, et fût-ce au plus sage, n'est pas un frémissement d'horreur
devant le fait de périr, mais comme le dit justement Montaigne, devant la pensée d'avoir péri (d'être mort) ; cette
pensée, le candidat au suicide s'imagine l'avoir encore après la mort, puisque le cadavre qui n'est plus lui, il le pense
comme soi-même plongé dans l'obscurité de la tombe ou n'importe où ailleurs.
L'illusion ici n'est pas à supprimer ; car
elle réside dans la nature de la pensée, en tant que parole qu'on adresse à soi-même et sur soi-même.
» La pensée
de la mort ne nous paraît donc pas atteignable ; elle semble être un objet dépassant tout simplement les limites de
notre entendement ou plus simplement de notre condition, de notre finitude.
c) Dans ce cas il faut donc peut-être revenir sur une définition de la philosophie qui voulait qu'elle soit une
méditation de la mort.
Or quoi de plus inconséquent qu'une philosophie qui serait une pensée de la mort ne puisse
pas le penser.
Au mieux, on pourra atteindre un rapprochement de la mort en associant des prédicats négatifs à la.
»
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