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Peut-on parler d'un pouvoir des faibles ?

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Il ne s’agira donc pas de considérer les faibles comme équivalents au fort, a fortiori aux forts, mais comme pouvant ayant éventuellement avoir une forme d’expression plus ou moins puissante, dans une société où ils sont dans une proportion majoritaire. Dans ce cas, effectivement les faibles pourraient prétendre à un pouvoir. Le cadre reste cependant limité : on serait tenté d’agrandir le raisonnement à la philosophie politique : cependant la démocratie, mise en place, faite par et pour le peuple, est-elle l’expression des faibles ? Il y a de quoi en douter, en se basant sur le raisonnement précédent : le peuple est constitué en majeure partie de faibles, mais pas uniquement de faibles, et ce sont donc les non-faibles qui vont prendre les devants du peuple, et donner à ce peuple son degré d’intelligence. A partir du moment où ce ne sont pas seulement les faibles qui agissent, il se peut qu’un fort “inspire” les faibles. Il ne serait donc pas juste de considérer la démocratie comme le prémice au “pouvoir des faibles”.

« La quête du pouvoir...

Une finalité bien peu noble pour les philosophes de tout temps.

Pourtant, lorsque nous ne cherchons pas à acquérir un pouvoir supérieur, nous voulons appuyer le pouvoir que nous avons — ou croyons avoir — déjà.

Car, comme le soulignait déjà Kierkegaard en 1846 dans Post-Scriptum, "Nous pouvons tous quelque chose, et le roi sourit du pouvoir du ministre, et le ministre, du pouvoir du journaliste, et le journaliste, du pouvoir de l'agent, et celui-ci, du pouvoir de la domestique, et celle-ci de la femme du samedi et le dimanche ...

nous entendons le prêtre nous dire que nous ne pouvons rien...

Nous prenons chacun notre place suivant notre pouvoir dans la société." Cependant sur qui le dernier “maillon” de la société peut-il exercer son pouvoir ? Selon l'opinion commune, le pouvoir est attribué aux forts sur les faibles.

Pourtant, il n'est pas rare d'entendre parler de manière dédaigneuse du pouvoir des faibles dont se sert un tel, en agissant de manière fourbe.

Ou au contraire, de manière élogieuse du pouvoir acquis par quelque foule soulevée contre le pouvoir public en place.

Il semblerait que l'oxymore “pouvoir des faibles” ait un sens dans l'idéologie commune, un sens que le philosophe se doit d'éclaircir : comment les faibles pourraient-ils prétendre au pouvoir ? De quel type, comment serait ce pouvoir, que son étude peut-elle nous apprendre ? Envisager la justesse de l'expression “pouvoir des faibles” serait d'abord supposer que les faibles auraient leur mot à dire.

Pourtant, il semble que ce soit rarement le cas, le faible étant considéré comme inférieur au fort — dans n'importe quel domaine, le faible trouvera un fort, qui lui sera supérieur — donc, si l'on est raisonnable, on s'adressera en priorité au fort, afin d'obtenir le raisonnement le plus fiable.

Comment les faibles pourraient , après être passé entre les mailles du darwinisme, prétendre à un pouvoir ? Le faible ne se définit pas simplement par la force physique, mais dans un domaine plus vaste, domaine duquel la fable de La Fontaine, “Le Chêne et le Roseau” nous ouvre les portes : le chêne semblait par sa nature dominer la nature, c'est-à-dire par sa seule force, tandis que le roseau devait utiliser un “stratagème”, se courber face au vent pour subsister.

Le vent finit par avoir raison de celui dont la force lui résistait, mais non de celui qui résistait par la “ruse” ou fausse soumission.

La fable nous recommande donc de regarder par deux fois avant de prononcer un jugement sur la force ou la faiblesse présupposée d'un individu, et, en élargissant, sur l'influence que celui-ci peut avoir.

D'un point de vue normatif, l'arbre est plus fort que le roseau, mais c'est ce dernier qui l'emporte.

Il convient donc d'examiner ce qui fait que le faible peut lui aussi avoir accès au pouvoir. Une autre fable peut nous y aider : c'est celle de la “Colombe et la fourmi”, où deux petits êtres “faibles” (un oiseau et un insecte) gagnent (provisoirement du moins) contre le “fort” (l'homme).

Elle semble montrer que “l'union fait la force”.

L'association de faibles fait-elle un fort? L'équation ne peut être définie, car elle est inégale : dans ce contexte, on se propose de comparer une association plurale, composée de beaucoup de faibles, à une unique personne : un fort.

La lutte est inégale, et il n'y a pas de sens à comparer des faibles à un fort.

Il faudrait comparer l'association de faibles, par rapport à l'association de forts, en nombre égal.

Dans le cadre simplifié d'une entreprise, un syndicat représente les “faibles de l'entreprise”, les ouvriers par exemple.

On nous présente souvent des cas où les ouvriers font revenir un patron sur la décision d'un licenciement par exemple, et on nous montre “le pouvoir des faibles”, fondé sur l' “union de ces faibles”, mais le poids des ouvriers perdrait nettement son importance face à un cartel de patrons : imaginons un petite ville dans une société simplifiée sans législation où fonctionnent cinq usines textiles, leurs cinq patrons se retrouvent, et décident de fixer leur salaire à 2€ l'heure au lieu de 3€, tous les cinq en même temps.

Les ouvriers n'y pourront rien.

Posons-nous à présent la question de l'équivalence de faibles contre un fort.

Une association de faibles vaut-elle un fort ? Le prix Nobel d'économie Hayek note qu'il n'y a pas d'addition d'intelligence dans un groupe, et le degré d'intelligence du groupe sera le degré de la personne la plus intelligente du groupe.

Or, dans une association composée uniquement des faibles, le “plus fort” si j'ose dire des faibles sera tout de même plus faible qu'un fort. Il ne s'agira donc pas de considérer les faibles comme équivalents au fort, a fortiori aux forts, mais comme pouvant ayant éventuellement avoir une forme d'expression plus ou moins puissante, dans une société où ils sont dans une proportion majoritaire.

Dans ce cas, effectivement les faibles pourraient prétendre à un pouvoir.

Le cadre reste cependant limité : on serait tenté d'agrandir le raisonnement à la philosophie politique : cependant la démocratie, mise en place, faite par et pour le peuple, est-elle l'expression des faibles ? Il y a de quoi en douter, en se basant sur le raisonnement précédent : le peuple est constitué en majeure partie de faibles, mais pas uniquement de faibles, et ce sont donc les non-faibles qui vont prendre les devants du peuple, et donner à ce peuple son degré d'intelligence.

A partir du moment où ce ne sont pas seulement les faibles qui agissent, il se peut qu'un fort “inspire” les faibles.

Il ne serait donc pas juste de considérer la démocratie comme le prémice au “pouvoir des faibles”. Le pouvoir des faibles est pourtant constat courant dans la société : le faible peut se servir de voies détournées. »

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