Peut-on justifier une inégalité sociale ?
Extrait du document
«
Dans un premier temps, l'inégalité sociale paraît explicable mais pas justifiable.
La justifier reviendrait à tolérer de
fortes égalités au sein de la société, et à ne pas les corriger prétextant un bien plus grand pour la société, ou
argumentant en faveur d'une fatalité quasi naturelle.
Au-delà d'un certain angélisme qui viserait le meilleur des
mondes possibles, n'est-il pas plus raisonnable de dire que toute les inégalités ne sont résorbables, rectifiables et
qu'elles subsisteront toujours, et n'ont-elles pas des raisons d'exister ? En effet, tout le monde ne peut pas occuper
les meilleurs emplois, tout le monde n'a pas les mêmes capacités intellectuelles et physiques, la même instruction.
La
société ne vit-elle pas sur ces différences qui sont en fait des inégalités ?
1) La justification rawlsienne.
John Rawls revient également dans sa Théorie de la justice.
Mais les pages consacrées à ce sujet ont moins retenu
l'attention que celles (paragr.
11 sqq.) où sont présentés les deux principes de justice : « 1.
Chaque personne a un
droit égal au système le plus étendu de libertés de base égales pour tous qui soit compatible avec le même système
pour les autres.
2.
Les inégalités sociales et économiques sont autorisées à condition : a) qu'elles soient au plus
grand avantage du plus mal loti ; b) qu'elles soient attachées à des positions et à des fonctions ouvertes à tous,
dans des conditions d'égalité équitable des chances.
Trois conditions doivent être remplies pour que la société soit
un système équitable et de libre coopération.
Il faut d'abord que la structure de base soit régie par une conception
politique de la justice, et par structure de base Rawls entend « la manière dont les principales institutions sociales
s'agencent en un système unique, assignent des droits et des devoirs fondamentaux et structurent la répartition
des avantages qui résultent de la coopération sociale » ; ensuite, que cette conception politique soit l'objet d'un
consensus issu d'un recoupement de doctrines compréhensives raisonnables ; enfin, que le débat sur les questions
fondamentales (justice et constitution) soit mené dans les termes du politique.
À cette représentation de la société
s'accorde une conception des personnes comme libres et égales en ce sens qu'elles ont en partage le sens de la
justice, la conception du bien, c'est-à-dire des facultés morales, et en commun des facultés de jugement, de
pensée, c'est-à-dire des facultés rationnelles.
« En vertu de quel principe des personnes morales, libres et égales
peuvent-elles accepter que les inégalités économiques et sociales soient fortement influencées par les hasards de la
vie sociale et par des contingences naturelles et historiques ? », se demande finalement Rawls.
La justice
procédurale pure n'est ici d'aucune utilité ; il n'est pas raisonnable de s'en tenir à une répartition égale ; il faut
prendre en compte les exigences organisationnelles de l'efficacité économique.
On en revient donc à l'invocation
d'une forme idéale de la structure de base qui « devrait autoriser les inégalités organisationnelles et économiques,
pour autant qu'elles améliorent la situation de chacun, y compris celle des plus mal lotis, et pourvu que ces
inégalités soient compatibles avec une liberté égale pour tous et l'équitable égalité des chances ».
Rawls: Je présenterai maintenant, sous une forme provisoire, les deux principes de la justice sur lesquels se ferait un
accord dans la position originelle.
[...]
En premier lieu : chaque personne doit avoir un droit égal au système le plus étendu de libertés de base égales pour
tous qui soit compatible avec le même système pour les autres.
En second lieu : les inégalités sociales et économiques doivent être organisées de façon à ce que, à la fois, l'on
puisse raisonnablement s'attendre à ce qu'elles soient à l'avantage de chacun et qu'elles soient attachées à des
positions et à des fonctions ouvertes à tous.
[...] Ces principes s'appliquent, en premier lieu, [...], à la structure
sociale de base ; ils commandent l'attribution des droits et des devoirs et déterminent la répartition des avantages
économiques et sociaux.
Leur formulation présuppose que, dans la perspective d'une théorie de la justice, on divise
la structure sociale en deux parties plus ou moins distinctes, le premier principe s'appliquant à l'une, le second à
l'autre.
Ainsi, nous distinguons entre les aspects du système social qui définissent et garantissent l'égalité des
libertés de base pour chacun et les aspects qui spécifient et établissent des inégalités sociales et économiques.
Or,
il est essentiel d'observer que l'on peut établir une liste de ces libertés de base.
Parmi elles, les plus importantes
sont les libertés politiques (droit de vote et d'occuper un poste public), la liberté d'expression, de réunion, la liberté
de pensée et de conscience ; la liberté de la personne qui comporte la protection à l'égard de l'oppression
psychologique et de l'agression physique (intégrité de la personne) ; le droit de propriété personnelle et la
protection à l'égard de l'arrestation et de l'emprisonnement arbitraires, tels qu'ils sont définis par le concept de
l'autorité de la loi.
Ces libertés doivent être égales pour tous d'après le premier principe.
Le second principe s'applique, dans la première approximation, à la répartition des revenus et de la richesse et aux
grandes lignes des organisations qui utilisent des différences d'autorité et de responsabilité.
Si la répartition de la
richesse et des revenus n'a pas besoin d'être égale, elle doit être à l'avantage de chacun et, en même temps, les
positions d'autorité et de responsabilité doivent être accessibles à tous.
On applique le second principe en gardant
les positions ouvertes, puis, tout en respectant cette contrainte, on organise les inégalités économiques et sociales
de manière à ce que chacun en bénéficie.
Avez-vous compris l'essentiel ?
1 En quoi consiste l'égalité politique ?
2 Quels sont les deux aspects de l'égalité sociale et économique ?
3 Quel est le rôle de la justice ?
Réponses:
1 - En des droits égaux.
Ce sont les droits fondamentaux du citoyen, telles les libertés de base..
»
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