Peut-on juger la beauté d'une oeuvre d'art ?
Extrait du document
«
VOCABULAIRE:
BEAU - BEAUTÉ (adj.
et n.
m.) 1.
— Norme permettant le jugement esthétique ; cf.
valeur.
2.
— Sens concret :
objet du jugement esthétique ; ce qui provoque une émotion esthétique par l'harmonie des formes, l'équilibre des
proportions.
3.
— (Par ext.) Ce qui suscite une idée de noblesse, de supériorité morale (un beau geste).
4.
— Pour
KANT, le jugement de goût ne détermine pas son objet en le pensant sous un concept universel, puisqu'il porte
toujours sur un cas particulier ; c'est un jugement réfléchissant dont l'universalité réside dans l'accord des sujets ;
c'est pourquoi le beau est défini comme « ce qui plaît universellement sans concept » ; « la beauté est la forme de
la finalité d'un objet en tant qu'elle est perçue en lui sans représentation d'une fin.
»
Juger:
Juger est l'acte par lequel on énonce des jugements.
Tout jugement est composé d'un sujet et d'un prédicat (ce qui
est dit du sujet).
C'est un acte mental qui consiste à établir une relation déterminée entre plusieurs termes.
Vous pouvez tout simplement partir d'un constat : face à une œuvre, nous disons facilement " C'est beau ", c'est
à dire que nous portons un jugement comme si ce dernier était un jugement objectif, comme si la beauté était alors
une qualité de l'objet que nous reconnaissons comme telle.
Ainsi, il semble que nous puissions juger de la beauté
d'une œuvre puisque nous le faisons de manière évidente.
Toutefois, si un tel jugement est possible, est-il pour
autant légitime ? Sur quels critères pouvons- nous le faire.
En effet, si quand nous émettons un tel jugement nous
faisons comme si cette beauté était une qualité de l'objet, il est bien difficile de dire qu'une œuvre est belle comme
on peut dire qu'elle est grande ou petite...
comme nous pouvons le faire en mesurant.
Comment pouvons-nous
mesurer la beauté d'une œuvre ? Il semble donc à la fois que nous éprouvions des difficultés à trouver des critères
permettant de juger d'une œuvre et pourtant, nous prononçons de tels jugements et nous considérons même que
c'est à partir de la beauté que nous pouvons qualifier une œuvre d'œuvre d'art.
Le relativisme en matière de goût.
«À chacun ses goûts, des goûts et des couleurs on ne discute pas».
(Proverbe).
• Devant l'oeuvre d'art, l'opinion commune tend à renoncer au jugement rationnel.
Elle s'éclipse derrière un
relativisme, ou subjectivisme, qui consiste à dire «à chacun ses goûts».
Pour elle, chacun juge de son point de vue
si tel tableau ou telle musique lui est agréable, et, au nom d'une «liberté d'opinion» transformée en indifférence au
jugement d'autrui, elle estime que toute discussion au sujet de la valeur d'une oeuvre est vaine – voire
antidémocratique.
• Un tel relativisme, en renvoyant le beau à la subjectivité, rend cependant tout jugement impossible, puisqu'il nie
non seulement la possibilité d'une gradation entre les oeuvres (un dessin d'enfant peut valoir autant qu'une toile de
maître), mais même rend insaisissable la frontière entre ce qui est art et ce qui ne l'est pas (une paire de
chaussures peut valoir autant qu'une symphonie).
• Le relativisme repose sur la confusion entre l'«agréable» et le «beau».
Dire «cela me plaît», c'est parler du rapport
entre soi et l'oeuvre.
Dire «c'est beau», c'est prétendre porter un jugement objectif sur l'oeuvre même.
Il existe des critères objectifs du beau.
«C'est la perception des rapports qui a donné lieu à l'invention du terme beau.» Diderot, Recherches philosophiques
sur l'origine et la nature du beau (1751).
• À l'opposé du subjectivisme, Diderot exprime une conception rationaliste, objectiviste.
Pour lui, certes, tout le
monde n'aime pas les mêmes choses, mais cela tient à ce que tout le monde n'a pas la même finesse de perception.
• La beauté n'est pas simplement un sentiment personnel: c'est le sentiment qui naît en vertu de certaines
proportions («rapports», ou ratio) intrinsèques à l'oeuvre.
Ce sont ces justes proportions, aussi bien en sculpture,
peinture, architecture, musique, etc., qui créent un sentiment d'harmonie et de plaisir et qui font dire d'une oeuvre
qu'elle est belle.
Il suffit de penser, par exemple, à l'idée de «fausse note» en musique.
• Dans l'Antiquité, les sculpteurs et les architectes utilisaient un «nombre d'or» ou «divine proportion», pour calculer
les rapports entre les différentes parties de leur oeuvre.
Le beau était donc pour eux le produit d'un certain calcul
mathématique et c'était la raison elle-même qui était belle.
.
Les critères objectifs du beau.
Nos jugements de goût sont contradictoires puisque à la fois nous disons: « c'est beau », et renvoyons le jugement
à la subjectivité de chacun.
Et, de fait les jugements sont divers et il semble impossible de les ramener à l'unité.
Mais, considérons les choses de plus près.
Le consensus n'est-il pas étonnant ? Après tout n'y a-t-il pas moins de
désaccord sur la grandeur de Sophocle, sur la beauté du ciel étoilé que sur la théorie du big-bang? Cet accord
surprenant des esprits n'est-il pas l'indice de l'objectivité du beau ? Nous pouvons nous accorder donc que la beauté
est quelque chose que nous saisissons dans l'objet.
C'est à partir du XVIe sous l'impulsion de la redécouverte de la culture gréco-latine et de l'esthétique grecque imitée
par les Romains et surtout au XVIIe que la question du beau fait l'objet d'un examen particulier, de la part des
artistes et des philosophes.
Il revient donc à l'esthétique de la Renaissance et du XVIle, appelée classique, d'avoir
dégagé les règles de production du bel objet.
L'inspiration en est platonicienne.
S'inspirant de la théorie.
»
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