Peut-on faire une science de ce dont on n'a pas conscience ?
Extrait du document
«
1.
Il n'y a pas de science directe de l'inconscient car, par définition, l'inconscient échappe à la
conscience.
Il est frappant de constater à quel point la psychanalyse qui, à ses origines, a provoqué tant de
scandales et d'incompréhensions, est aujourd'hui rentrée dans la culture et les habitudes de penser.
Au
point qu'on parle d'inconscient sans même se rendre compte que ce mot recouvre une série de problèmes.
On parle de « pensées inconscientes », de « désirs inconscients », mais ces expressions ont-elles
seulement un sens ?
— Penser c'est avoir conscience de quelque chose : penser à Jean, c'est avoir présente à l'esprit cette
réalité qu'est Jean.
Que peut donc signifier « pensée inconsciente »? Une conscience sans conscience ?
Une pensée où l'on ne garde que l'objet auquel on pense (Jean), et non le fait qu'on y pense ? C'est une
abstraction : abstraction signifie que l'on sépare par la pensée ce qui est inséparable en réalité.
— De même pour désirer une chose, il faut avoir conscience qu'elle nous manque et qu'on voudrait la
posséder.
Qu'est-ce donc que ce désir inconscient ? On pourrait répondre que tout désir a un lien avec le
corps : le désir de manger provient du vide de l'estomac.
Le désir inconscient ne serait donc que le
mécanisme physique du désir.
Mais ce qu'on appelle inconscient n'est alors rien d'autre que le corps, et il
n'y a pas lieu de parler d'inconscient.
Ces deux exemples montrent que la notion d'inconscient est un problème.
En effet, par définition,
l'inconscient n'est pas présent à la conscience.
Comment pouvons-nous donc savoir qu'il existe ?
Comment pouvons-nous connaître ce qu'il est ? Comment peut-il y avoir une science de l'inconscient, s'il
n'y en a même pas une conscience ? Je ne peux pas étudier ce qui n'a pas d'existence pour moi !
2.
Il n'y a donc de science de l'inconscient qu'à partir des faits conscients.
L'inconscient, n'étant pas directement accessible, on ne peut en établir l'existence et en définir la nature
qu'à partir de données accessibles à la conscience.
Exemple : Freud fonde sa théorie de l'inconscient sur au moins trois grands groupes de faits accessibles à
la conscience :
— certains phénomènes pathologiques (= relatifs aux maladies) : les
névroses ;
— certains phénomènes de la vie normale : le rêve, les « actes manques » ;
— un ensemble de représentations culturelles : la religion, l'art...
3.
Qu'est-ce qui nous oblige à remonter d'un fait dont on est conscient à sa cause inconsciente ?
Si l'on doit expliquer certains faits par un inconscient, c'est d'abord parce que la conscience ne nous en
fournit pas l'explication.
Exemple 1 : Je ferme la fenêtre parce que j'ai froid.
Ici, la conscience me fournit le fait (je ferme la
fenêtre) et la cause du fait ou du moins ce que je crois être la cause (la sensation de froid).
Exemple 2 : Je fais un rêve mais je ne sais pas pourquoi j'ai rêvé à ceci plutôt qu'à cela.
La conscience
est muette sur la cause.
Je dois donc la rechercher ailleurs.
On va alors rechercher cette cause dans d'autres faits étudiables par la conscience, en particulier dans le
corps.
Le corps n'est certes pas un donné immédiat pour la conscience (je n'ai pas conscience de
chacune des opérations qui se produisent dans mon corps), mais, à la différence de l'inconscient, il peut
entrer dans la conscience : je peux observer des corps.
On expliquera par exemple un rêve dans lequel il y avait de la nourriture par le vide de l'estomac !
C'est seulement, en montrant l'insuffisance de cette explication, que, ne trouvant la cause du rêve ni
dans la conscience ni dans le corps, on devra la placer dans un « inconscient ».
C'est ce que Freud fait
pour le rêve, mais aussi pour les névroses : aucune lésion au cerveau n'explique ces désordres mentaux..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Peut-on faire une science de ce dont on n'a pas conscience ?
- Peut-on faire une science de ce dont on n'a pas conscience ?
- la conscience peut-elle faire obstacle au bonheur ?
- Dissertation philosophie Bertrand Russell in Science et Religion: la conscience
- Depuis son apparition, le coronavirus ne cesse de faire des ravages dans le monde ; Et la maladie n’en finit pas d’évoluer symptomatiquement. Face à ce fléau, d’aucuns soutiennent que la science a atteint ses limites. Partagez-vous cet avis ?