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Peut-on dire qu'"il n'y a pas de hasard" ?

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« Termes du sujet: DIRE: signifie ici affirmer en connaissance de cause, mais cela désigne aussi l'opinion qui dit n'importe quoi, qui se contente d'affirmer ce qu'elle affirme, qui transforme son désir en vérité universelle. HASARD: a) Ce que l'homme ne peut prévoir ou expliquer.

b) Ce qui semble dépourvu de toute raison d'être, de toute finalité.

C) Chez Cournot, rencontre de deux séries causales indépendantes. 1) a) La physique « classique » — et encore, en ce sens, la théorie de la relativité d'Einstein — soutiennent un déterminisme absolu : il n'y a rien dans la nature qui, — tout phénomène étant lié à tout autre par des lois invariables et infiniment précises (ces lois se traduisent, mathématiquement, par des « fonctions analytiques ») — ne puisse être exactement prédit ; ou, à l'inverse, faire l'objet d'une « rétrodiction », c'est-à-dire d'une « prédiction dans le passé ». b) On prendra pour exemple l'« Intelligence infinie » supposée par Laplace dans ses Considérations philosophiques sur le calcul des probabilités, sorte de physicien « abstrait » et idéal placé hors de l'écoulement du temps, mais disposant d'une information complète sur l'état présent de l'univers, et, de ce fait, en position de « savoir absolu » — prédiction et rétrodiction — par rapport à tous les événements passés et à venir. c) Spinoza également avait exprimé, indépendamment du calcul, une telle conviction dans son Éthique (I, 28), où il affirme que tout mode fini (c'est-àdire toute « chose » existante) découle d'un autre mode fini d'une manière certaine et déterminée ; et ainsi de suite à l'infini.

Le déterminisme se confond, ici, avec la chaîne des causes et des effets. 2) a) Cette conception (1) a cependant été affaiblie, au XXe siècle, par la découverte que les phénomènes dits microphysiques (ou de très petite échelle, ou encore « quantiques ») obéissent, en fait, à un déterminisme certes, mais seulement statistique (selon Max Born, qui a imposé cette interprétation contre un indéterminisme pur et simple). b) 1 - Dans ces conditions (a) il semble permis de parler à nouveau de hasard (Niels Bohr), tout comme dans l'ancienne « physique », spéculative, non mathématique, de Démocrite et d'Epicure. 2 - Cette « physique » des Anciens, qui, de toute manière, affirme le hasard, n'aurait pu être « déterministe » au sens moderne, puisque le déterminisme s'exprime nécessairement par des lois quantifiées. 3 - Elle s'opposait seulement, de son temps, à la causalité universelle, en particulier au nécessitarisme stoïcien — qui est, comme le spinosisme, une métaphysique. c) C'est pourquoi certains physiciens, à commencer par Einstein, refusent la mécanique quantique ordinaire et son « déterminisme affaibli ».

Ils soutiennent — contre Bohr — que « Dieu ne joue pas aux dés » ; mais ceci, sans pour autant parvenir à rétablir légitimement, dans leurs théories, le « déterminisme fort » de la pensée classique (1). 3) a) Pour un physicien « classique » comme Einstein ou Laplace, tout comme pour Spinoza, on ne peut parler de hasard (ou de contingence) que par rapport à l'ignorance humaine.

Ainsi, selon l'épistémologue Cournot (XIXe siècle), le hasard n'existe pas en soi : il n'est que l'« interférence » de deux ou plusieurs « séries causales » dont le détail ne nous est pas connu. b) Cette conception du monde (3a) aboutit à un nécessitarisme métaphysique appuyé sur un rationalisme extrême, du type de celui des Stoïciens : rien n'aurait pu être — ou arriver — autrement qu'il n'est — ni, bien sûr, ne pas être.

Elle est absolument opposée, par exemple, à l'existentialisme de Sartre, étranger à tout intérêt pour la science, et pour qui « tout est contingent ». c) On conclura en opposant ces deux « métaphysiques » spontanées de l'esprit humain, reflet du « caractère » individuel (laissez-vous les choses au hasard personnellement ?) ; et, probablement — c'est du moins la position de Kant dans sa « 4e Antinomie » — deux métaphysiques indécidables.

On pourra insister, avec Richard Sünder sur l'idée que la nécessité fait sens pour l'être humain, alors que la contingence est non-sens (ou « absurde », par exemple dans la pensée de Camus). REMARQUE : le développement du sujet fait appel, successivement, à l'épistémologie (1 et 2), puis à la métaphysique et à la philosophie de l'existence (3).

C'est ce déplacement qui donne vie à un sujet qui serait « suranné » au seul plan de la science — les formulations de la physique, dans leur exactitude relative, ont radicalement transformé, de toute manière, la notion « intuitive » de hasard. Sujet 4429: Le hasard et la nécessité selon J.

Monod ?. »

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