Peut-on dire que seul celui qui ne pense pas est heureux ?
Extrait du document
«
Définition des termes du sujet:
Heureux, heureuse: Qui jouit du bonheur, qui est durablement content de son sort.
PENSÉE: Faculté de connaître, de comprendre, de juger, de raisonner, qui est censée caractériser l'homme, par
opposition à l'animal.
Synonyme d'entendement, de raison.
PENSER: Exercer une activité proprement intellectuelle ou rationnelle; juger; exercer son esprit sur la matière de
la connaissance; unir des représentations dans une conscience.
Problématique.
Est-ce l'activité réflexive philosophique ou l'inconscience voire l'ignorance qui font le bonheur ? Le bonheur ne
serait-il pas, comme le dit Aristote, le parachèvement de l'acte réussi et rationnel ? Y a-t-il bonheur dans l' (auto-)
aveuglement ou encore dans l' (auto-) mystification de la conscience ? Les ignorants, les imbéciles sont-ils heureux
?!
Première partie.
Être heureux, c'est parvenir à un état de satisfaction complète: à la différence du plaisir, ce sentiment agréable et
provisoire, le bonheur désigne un état durable.
Si tous les hommes recherchent le bonheur, on peut le considérer comme une fin universelle.
Il est un bien,
recherché pour lui-même.
Or, la nature donne aux « êtres vivants », dit Épicure, un critère : le plaisir.
Si l'on ne
peut concevoir de bonheur sans accompagnement d'un état de plaisir, c'est donc que bonheur et plaisir sont liés.
En
tant que sentiment d'une harmonie liée à notre nature, le plaisir constitue en lui-même un bien que les hommes
recherchent.
Et le désir, qui signe le manque d'un plaisir et la tendance qui nous pousse à l'atteindre, est essentiel
dans la compréhension de cette quête universelle du bonheur par l'homme.
Cependant, il ne faut pas confondre
bonheur et plaisir.
Il faut distinguer le plaisir en soi et les plaisirs multiples et variés qui peuvent s'offrir dans notre existence.
Ils
s'adressent aussi bien à notre corps qu'à notre âme.
Mais tout plaisir n'est pas un bien pour nous, et toute douleur
n'est pas un mal : manger un « bon » plat n'est pas forcément « bon » pour la santé, et la privation déplaisante
peut être bénéfique et amener un plaisir plus grand, après coup.
De même, si l'absence de trouble de l'âme, ou
ataraxie, est un bien en soi, il peut être bon d'affronter une angoisse, de la supporter et la dépasser, pour atteindre
un plus grande quiétude.
C'est le cas lors de crises existentielles qui mettent en jeu notre avenir et exigent de nous
une décision conditionnant notre bonheur futur, par exemple.
Une des constances de la philosophie d'Epicure est de vanter le
plaisir.
On retrouve la formule « Le plaisir est notre bien principal et inné »
dans la « Lettre à Ménécée ».
Mais l'épicurisme ne correspond guère à
l'image populaire que l'on en garde : celle du « bon vivant ».
Dans cette
lettre, on lit : « Tout plaisir est de par sa nature propre un bien, mais tout
plaisir ne doit pas être recherché ».
C'est à une compréhension véritable du
plaisir, et à une gestion rationnelle des désirs que la philosophie d'Epicure
nous invite, philosophie des « sombres temps », de l'époque troublée,
violente, des successeurs d'Alexandre le Grand.
La « Lettre à Ménécée » est une description de la méthode apte à
nous procurer le bonheur.
Car si tous les hommes cherchent le bonheur, ils
sont, selon le mot d'Aristote, comme des archers qui ne savent pas où est la
cible, incapables de la définir et de l'atteindre.
Epicure commence par expliquer que nous n'avons rien à redouter des
dieux, vivants bienheureux qui ne se soucient pas des hommes, et que la mort
n'est rien pour nous.
Débarrassés du souci du jugement divin et de la survie
de l'âme, nous sommes alors aptes à bien vivre notre vie présente.
Bien vivre
notre existence veut dire parvenir au bonheur ici-bas, et cela n'est possible
que par un bon usage des plaisirs et des désirs.
L'homme est un être de désir, et selon qu'il parvient ou échoue à
satisfaire ses désirs, il est heureux ou misérable.
Or, le bonheur est d'abord l'absence de souffrance physique ou psychologique.
C'est pourquoi Epicure
déclare : « Une théorie non erronée des désirs sait rapporter tout choix à la santé du corps et à la tranquillité de
l'âme puisque c'est là la perfection même de la vie heureuse.
Car tous nos actes visent à écarter la souffrance et la
peur.
»
Eprouver du plaisir, c'est d'abord combler un manque : boire quand on a soif, se rassurer quand on a peur.
En
soi, un plaisir est toujours bon, une souffrance, un désir non comblé, toujours mauvais..
»
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