Peut-on dire avec Alain que "la passion est toujours malheureuse" ?
Extrait du document
«
Le sujet pose une question fermée à laquelle il faudra répondre par oui ou par non.
On vous demande de
déterminer si la parole est un pouvoir.
Pour pouvoir répondre à cette question, il faudra vous demander quel type de
pouvoir pourrait être le langage, et donc examiner les différentes sortes de pouvoirs qui existent (force physique,
charisme, force de persuasion).
On tentera de faire une analyse aussi complète que possible de la notion de pouvoir, en remarquant en particulier
que son sens ne se réduit pas au politique.
On remarquera que l'idée d'un pouvoir de la parole ne va pas de soi dans la mesure où l'on a plutôt coutume
d'opposer les actes (qui peuvent quelque chose) aux paroles, censées se limiter à l'expression et à l'information,
quand elles ne servent pas purement et simplement à masquer l'impuissance.
Pouvoir du langage & langage du pouvoir.
Puisqu'il a pour fonction essentielle l'expression de la pensée et la communication entre les hommes, il est clair que
le langage joue un rôle éminent dans les phénomènes de pouvoir.
Il permet ou facilite l'action; il l'interdit ou la
sanctionne; le droit se dit et s'écrit et ceux qui dirigent la Cité exercent leur fonction par l'intermédiaire du langage,
tout comme ils sont attentifs à en capter les signes.
Dans toutes les sociétés, les titulaires du pouvoir ont possédé la maîtrise du langage ou des langages propres à
orienter l'action d'autrui.
Ceux-là sont détenteurs de ce "maître-mot" que Kipling attribuait dans la jungle à l'enflant
démuni mais qui finirait par s'emparer de la fleur rouge.
Prêtres et scribes, pontifes et rois, légistes et avocats,
journalistes et hommes des médias connaissent tour à tour cette puissance.
L'agora d'Athènes était le lieu de
disputes, de collusions oratoires.
De même, Dieu se manifeste par cet acte de langage: " Au commencement était le
Verbe" disait déjà Saint-Jean.
Dans les sociétés complexes, le langage est l'expression du pouvoir.
A tel point que le fait de nommer, de qualifier un
Pouvoir, lui donne sa cohérence, sinon son existence: qui dit monarchie se met en mesure d'élaborer le système
monarchique, formule la série des concepts qui se trouvent mis dans la langue.
Toutes les institutions majeures ont pour rôle de tester et d'élaborer le langage du Pouvoir.
L'un des privilèges les
plus incontestables du milieu dirigeant est précisément de conserver la langue.
Le langage de la culture se confond
avec celui de la classe dirigeante.
Les faits langagiers montrent la capacité "performative" des classes dirigeantes.
Et, le propre de ces dernières est d'éviter ou d'intégrer la "gheottisation" du langage: culture jeune (BD, musique,
expressions "branchées"...).
Dès lors, si le pouvoir manifeste son emprise sur le langage, ce dernier à son tour
influence le Pouvoir, à tel point que l'évolution des phénomènes langagiers a une signification historique et politique
considérable: l'invasion du franglais traduit ainsi notre infériorité à l'égard de l'Amérique anglophone, lorsque la
France était puissante, on parlait français à Saint-Pétersbourg.
De même, à la limite, on obtient le phénomène de la
langue de bois qui est une conséquence de la glaciation du langage et/ou de la glaciation du Pouvoir.
Aussi, il faut bien qu'un jour, change ce langage jugé rétrograde.
Et, la révolution se manifeste aussi par un acte de
langage.
La prise du pouvoir ne s'accompagne pas par hasard de déclarations solennelles, de thèses ou de
profession de foi.
En bref, on peut dire que le rêve de puissance est un rêve de langage.
Il fonde et manifeste le Pouvoir et celui-ci
s'exerce par celui-la..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- ALAIN : toute passion est malheureuse
- Alain et l'intelligence humaine
- [ Art, jeu et travail ] Alain
- Explication philosophique d'un texte d'Alain sur le sujet
- Alain et la technique