Peut-on défendre une opinion ?
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«
Introduction & Problématique:
L'opinion, ce jugement intermédiaire entre l'être et le néant, la connaissance et l'ignorance, mais aussi l'énoncé
dominant dans une société (opinion publique) se trompe-t-elle toujours ? L'opinion est-elle toujours dans l'erreur ou
n'existe-t-il pas, selon les termes de Platon, une "opinion droite" ? Ne peut-elle pas alors se situer dans le
cheminement dialectique vers le vrai ? N'est-elle pas une étape intermédiaire et nécessaire pour atteindre l'absolu ?
Y a-t-il de "bonnes" opinions, accompagnées d'une once de raison ? L'opinion peut-elle être défendue comme moyen
terme à l'accès à la vérité ?
A.
L'opinion, comprise comme conjecture non fondée en raison ne semble pas pouvoir être défendue.
« Le mensonge et la crédulité s'accouplent et engendrent l'opinion », a écrit Valéry.
On ne saurait mieux dire : à son
premier niveau, l'opinion n'a guère de chances d'avoir raison car elle désigne une manière de juger inférieure, par
opposition à la science, quelque chose d'intermédiaire entre la connaissance et l'ignorance, un jugement fondé en
grande partie sur la crédulité ou le mensonge, comme le dit Valéry.
L'opinion ou le fruit d'automatismes humains.
L'opinion, qu'elle soit d'origine culturelle ou sociale, est ici erronée.
Admise sans critique, sans examen rationnel, elle
exprime le penchant à la passivité et, par conséquent, elle a nécessairement tort.
Y a-t-il de bons avis non
rationnels, n'étant pas nécessairement dans l'erreur ? Fort peu.
Dans le champ du social, comme dans celui de la
méthode ou de la science, l'opinion conçue comme conjecture doit généralement être balayé.
Il exprime un certain
état de mon corps ou de mon milieu culturel.
Que désigne l'opinion ? Un jugement recueilli par expérience, à partir
d'un minimum d'élaboration personnelle, en bref un simple avis résultant de l'expérience ou d'une tradition.
Donc
cette forme de connaissance purement empirique semble avoir tort.
Transition.
Toutefois, si l'opinion désigne un état intermédiaire, ne peut-elle mériter aussi, sous un angle, le nom de
connaissance ? A-t-elle toujours nécessairement tort ? Doit-on penser qu'il faille détruire l'opinion ignorant toute
pensée véritable ?
B.
L'opinion, faculté située entre vérité et erreur, mérite d'être défendue.
Liée à la connaissance empirique, à la puissance du sensible, des sens et de la tradition, l'opinion est-elle, dans tous
les cas et toujours, de manière nécessaire, rigoureusement condamnable ? Certes, elle peut aboutir à l'absence
totale de critique et s'accompagner de l'ignorance de soi-même mais, sous un autre angle, elle exprime le premier
niveau de la vérité et au moins un cheminement initial dans la dialectique et la formation du vrai.
Ainsi, dans l'Antiquité grecque, Platon, opposant opinion et science, établit le statut de l'opinion, statut qui marque
encore notre pensée et qui ne conduit pas à une condamnation radicale de l'opinion.
Toute la philosophie se confond, en un sens, avec l'itinéraire de la dialectique : avec
une montée progressive vers le vrai.
La pensée s'élève ainsi de l'opinion (la doxa),
énoncé non justifié par un raisonnement rigoureux, mélange de vérité et d'erreur, sorte
d'intermédiaire entre le néant total et ce qui est, jusqu'à un savoir d'ordre intelligible et
justifié en raison.
C'est ce qu'exprime le célèbre Mythe de la caverne : notre monde
sensible n'est qu'apparence, par rapport aux vraies réalités.
L opinion désigne une
connaissance inférieure, portant sur les objets du monde sensible.
Or la doxa a-t-elle nécessairement tort ? Nullement.
Notre monde empirique et les
jugements qui s'y rapportent acquièrent un sens à travers le mouvement de
transcendance vers les essences, ces réalités idéales qui sauvent les phénomènes.
L'opinion n'est pas un néant, puisqu'elle exprime le premier niveau du vrai, la première
prise de conscience du réel.
L''opinion saisit, encore très mal, le vrai et elle incarne le
premier niveau du savoir.
Dans la mesure où le sensible est lui-même sauvé par l'Idée,
qui lui donne sens, on peut dire que l'opinion n'a pas nécessairement tort puisqu'elle est
passage vers le vrai, vers les essences mathématiques, vers les Idées et le Bien..
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