Peut-on concevoir une société sans travail ?
Extrait du document
«
Il semble évident d'affirmer que la vie en société implique le travail.
Nous présentons même généralement ce
dernier comme un moyen de s'insérer dans la société.
Nous devons travailler pour satisfaire des besoins et
même dans de nombreuses sociétés animales, nous constatons la présence d'activités collectives.
La société
fait qu'il y a une interdépendance des individus qui ne parviennent pas à satisfaire seuls leurs besoins.
Vous
pouvez ici penser aux analyses d'Aristote au début de la Politique lorsqu'il montre la nécessité de l'esclavage :
si certains hommes sont libres et ont des esclaves, c'est parce qu'il est nécessaire que des individus leur
permettent de satisfaire leurs besoins afin qu'ils aient du temps pour se consacrer aux affaires de la cité.
En ce
sens, vous pouvez également penser à la place du travail comme condamnation dans la Bible suite au péché
originel.
C'est parce qu'ils quittent le jardin de l'Eden, jardin de la profusion, que Adam est contraint de
travailler.
Une société sans travail serait donc une société dans laquelle tous les besoins peuvent être
satisfaits sans effort.
Mais penser qu'il ne peut exister de société sans travail, n'est-ce pas faire de la société
le lieu de l'aliénation ? Ici, vous pouvez penser aux analyses de Marx dans le Capital dans lequel il recherche la
forme politique enfin trouvée qui permettait de réaliser l'émancipation économique du travail » (Cf.
la guerre
civile en France à propos de la commune .Le travail apparaît alors comme l'expression de l'activité de l'homme
dans l'aliénation, comme une expression de la vie dans sa manifestation aliénée.
C'est parce qu'il n'est qu'un
moyen de produire de la richesse en général que le travail peut être aboli : « La révolution communiste, se
dressant contre le mode traditionnel des activités, se débarrasse du travail et abolit la domination de toutes
les classes en abolissant les classes elles-mêmes » (Idéologie allemande).
Il faut alors vous demander quel
sens est accordé au terme travail ici lorsque Marx parle de son abolition.
C'est le travail aliéné dont il parle.
Or,
comment une société peut-elle vivre sans aucun travail.
On peut alors peut-être penser la suppression du
travail aliéné mais peut-on penser la suppression de tout travail ?
[Le travail n'est que contrainte comme le révèle son étymologie.
On peut concevoir et espérer que les
progrès des science et de la technique le fassent un jour disparaître.]
Travail et contrainte
Le travail, nous signale l'étymologie du terme, est d'abord une activité douloureuse.
Le mot tripalus désignait
en effet, dans le latin populaire, une machine formée de trois pieux, permettant d'assujettir, pour leur imposer
le joug ou le mors, les boeufs et les chevaux difficiles ; tripaliare (latin vulgaire) signifiait torturer.
Dans la
notion de travail, nous trouvons effectivement l'idée d'une tâche pénible et douloureuse : « tu gagneras ton
pain à la sueur de ton front ! ».
Mais le travail a un autre sens que celui de chevalet de torture.
Si le choix lui était donné, l'homme préférerait sans doute le loisir et la liberté de l'oisiveté.
On peut concevoir
qu'un jour les progrès techniques fassent en sorte que l'homme n'ait plus besoin de travailler.
D'ailleurs, depuis
le XIXe siècle, le temps de travail a constamment diminué: pourquoi ne finirait-il pas par disparaître tout à fait?
Au lieu d'asservir l'homme, la technique pourrait totalement le libérer de tout labeur.
Les hommes n'ont pas toujours travaillé
A l'époque féodale, l'aristocratie tirait ses revenus de la terre, sans travailler.
Oisifs, les nobles passaient leur
temps à chasser, à faire la guerre.
Le travail était considéré comme une activité vile.
Dans l'Antiquité,
certaines catégories sociales (les aristocrates ou les citoyens) ne travaillaient pas: elles avaient des esclaves
pour cela.
Aristote, dans sa "Politique" propose d'ailleurs une curieuse et scandaleuse justification de
l'esclavage.
Ce n'est qu'à partir du début du XIXe siècle que le travail est devenu le lot de tous les hommes.
D'autre part, l'homme a le souvenir d'un âge d'or, d'un paradis perdu, d'un état « primitif » de l'humanité où il
n'y avait pas de travail.
Cette nostalgie de ce qui n'est plus témoigne que le travail est vécu comme une
servitude..
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