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Peut-on concevoir l'histoire sans historien ?

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« Discussion : La première image qui vient à l'esprit dès que l'on évoque le mot histoire c'est le livre d'histoire, c'est donc l'histoire telle qu'elle est racontée par les spécialistes.

À travers ceux-ci il est possible d'entrevoir la salle de classe, d'assister aux cours faits par le magister.

C'est pour cela que certains peuvent dire qu'ils n'aiment pas l'histoire, qu'ils ne sont pas bons en histoire.

Ce qu'ils visent par-là, ce ne sont pas les événements historiques ou les faits tels qu'ils se sont déroulés au cours d'une période donnée, mais la manière dont les événements sont relatés par quelqu'un d'autre.

Dès lors, on a l'impression que l'événement historique se confond avec l'histoire de l'événement, c'està-dire la mise en récit de l'événement.

Pour bien penser l'histoire ne convient-il pas de séparer le fait historique et la mise en perspective de ces derniers ? D'un autre côté, quelles valeurs peuvent avoir les événements s'ils ne sont pas pris en compte par l'historiographie, c'est-à-dire l'écriture de l'histoire.

En somme, l'histoire peut-elle se passer de l'historiographie ? Pour répondre à cette double question, il faut bien discerner ce que c'est que l'histoire et dans celle-ci la part qui revient à l'historiographie. Suggestion de plan : Première partie : de l'histoire. Il n'y a histoire que du passé.

Il n'y a histoire que par ce qui touche à la mémoire.

Cela signifie qu'il faut que du temps se soit écoulé avant qu'un événement acquierre une certaine épaisseur que l'on peut appeler épaisseur historique.

Car tout ce qui a lieu ne mérite pas toujours ce titre, c'est pour cela que les écoles d'historiens font la distinction entre l'histoire événementielle et l'histoire structurelle.

Ils appellent histoire événementielle tout ce qui touche à des faits secondaires concernant la vie des hommes célèbres, les anecdotes touchant telles ou telles grandes batailles importantes, etc.

L'événementiel c'est le secondaire, c'est l'anecdotique.

En revanche, l'histoire structurelle c'est celle qui nécessite un regard plus profond parce que les faits eux-mêmes structurent à eux tout seuls une époque, une strate ou une dimension d'une société, qu'elle soit économique, politique ou culturelle.

Tout ne mérite pas le nom de fait historique.

Dire que l'histoire est toujours rétroactive, c'est montrer comment le quotidien ou le présent entrent dans une autre catégorie d'appréciation que l'on dit habituellement relever du journalisme.

Si l'histoire est donc ce que nous venons de dire, quelle place occupe son écriture quant à la valeur des faits ? Nous voulons dire par là est-ce que l'événement vraiment important, vraiment décisif serait à lui seul capable de franchir le mur du temps ? Deuxième partie : l'histoire et l'historien. "Oeuvre d'un homme, une histoire est le portrait d'un homme, lequel s'y est imprimé avec sa pensée...

Pour ma part, j'aime, je l'avoue, à chercher aussi dans l'histoire l'historien." A.

Vinet.

Études sur la littérature française. L'historien Paul Veynes disait dans, Comment on écrit l'histoire, que l'histoire n'est rien d'autre qu'une forme de roman.

Il voulait signifier par là, que le travail essentiel de l'historien est de regrouper les faits, de les organiser, en vue de les mettre en perspective en vue de leur conférer une certaine signification.

L'histoire est donc le roman de l'histoire.

Un des problèmes majeurs d e l'historiographie, c'est précisément sa valeur scientifique qui renvoie directement à la question de l'objectivité en histoire.

En effet, si le travail de l'historien est de mettre en récit l'événement, l'on est en droit de s'interroger sur la subjectivité de son regard.

Cela est si vrai que Veynes dit que selon lui l'histoire, en dépit de tout l'appareillage critique, en dépit de la statistique introduite dans son écriture, ne pourra jamais être une vraie science.

Elle restera toujours une science humaine, une science dans laquelle la part interprétative l'emporte sur le reste : "L'historien va aux hommes du passé avec son expérience humaine propre.

Le moment où la subjectivité de l'historien prend un relief saisissant c'est celui où, par-delà toute chronologie critique, l'historien fait surgir les valeurs de vie des hommes d'autrefois." Ricoeur, Histoire et vérité. Troisième partie : L'histoire monumentale. « Pour bien connaître les faits et les voir à leur vraie place, il faut être placé au sommet - non les regarder d'en bas, par le trou de la serrure de la moralité ou de quelque autre sagesse.

» Hegel, La Raison dans l'histoire. À la question de savoir si les faits historiques peuvent s e passer d e commentaires, d'analyses, d e décryptages, on peut essayer d e répondre en analysant la couche de faits qui s'incrustent dans la pierre, dans les institutions, dans les symboles matériels, etc.

On peut voir que cette dimension de l'histoire à un certain niveau s'impose d'elle-même par le travail du temps, elle se passe de l'individu, du travail du spécialiste pour s'imposer.

C'est le cas d'une cathédrale bâtie au Moyen Age, c'est le cas d'un Palais Royal qui condensent à eux tout seuls, les traces du passé.

Il nous semble aussi que, face à de pareils monuments, le spécialiste doit se faire modeste et se mettre à l'école de ce type de faits en vue d'être formé par le fait lui-même.

On peut illustrer ceci en montrant toutes les questions soulevées autour de la construction des cathédrales gothiques.

Se pose là le problème de savoir comment ont été faits certains calculs permettant la construction de certains arcs pour que l'ensemble atteigne un certain équilibre. Dès lors l'histoire n'est pas seulement l'écriture de l'histoire, c'est aussi la mémoire des faits, telle que cette mémoire est transmise par la voie non des hommes, mais par celle de la matière, de la pierre, bref du monument. Conclusion : Si l'histoire renvoie à la mémoire de l'histoire, on voit bien que la mémoire n'est pas une simple faculté de l'esprit.

Plus profondément, il faut entendre par mémoire tout ce qui est capable de se conserver dans le temps et qui participe des strates profondes d'une culture ou d'une civilisation.

Ainsi conçue la mémoire se concentre dans le drapeau, dans l'architecture, les places publiques (l'Agora en Grèce, le Colisée à Rome).

Cette mémoire-là excède la pure historiographie car elle porte en elle-même les traces profondes qu'elle veut transmettre à la postérité.. »

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