Peut-on concevoir des limites à l'expérimentation humaine ?
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Termes du sujet:
LIMITE (n.
f.) 1.
— Ce qui sépare deux portions d'espace ; par anal., ce qui borne une étendue, un temps, une
fonction.
2.
— Extension extrême d'une étendue, d'une faculté, sans que pour autant on ait à concevoir quelque
chose qui lui serve de borne ; en ce sens, KANT oppose limite à borne.
3.
— (Math.) Un nombre A est la limite d'une
série croissante S, si, quel que soit ∑ aussi petit que l'on veut, il existe toujours un nombre B appartenant à s, tel
que A - B < ∑.
EXPERIMENTATION : Observation provoquée, afin de soumettre une théorie à l'épreuve des faits.
Introduction
L'expérimentation humaine pose question du point de vue épistémologique et du point de vue éthique.
L'autre, mon
double même s'il paraît l'étape incontournable au développement de la connaissance du vivant, est justement limite
car il est un autre moi.
I - Dans quelles conditions se pose la question ?
a) L'expérimentation n'est pas l'observation ou du phénomène naturel ou des résultats codés en laboratoire, cernés
par un système de référence.
Elle est vérification d'une hypothèse c'est-à-dire à la fois étape pour comprendre et
risque pour appliquer.
L'objet en est l'homme.
Vivant, à naître, près de mourir, il est touché dans son corps, modifié dans sa vie
psychologique, atteint dans sa descendance.
La gravité des conséquences est liée à la conscience, personnelle du
vécu de l'opération.
Et pourtant, quel médicament par exemple, serait mis sur le marché sans avoir fait
l'expérimentation en aveugle et double aveugle, c'est-à-dire sur une population censée ne pas connaître à qui est
destiné la molécule testée.
Ce qui fonctionne sur l'animal n'est jamais parfaitement identique aux effets sur l'homme.
b) Les limites sont triples.
On peut envisager le cas de démesure c'est-à-dire où le pouvoir de la science dépasse le
projet humain.
Au nom de l'intérêt singulier, peut-on sacrifier le collectif ? Par exemple, un programme pour surdoué
est-il compatible avec le respect du genre humain ? L'expérimentation peut aussi être d'un apport nul pour la
connaissance car exceptionnelle.
Procréer après la ménopause, est-ce utile à la connaissance du vivant ? Enfin,
l'expérience peut être contraire à l'homme dans son individualité ou dans sa généralité.
Les « meilleurs des mondes »
sont autant de preuves des effets du comportementalisme plaçant la liberté au rang de tragédie.
c) Enfin, qui juge ? Le politique a-t-il le pouvoir de gérer la recherche scientifique, d'organiser des zones
d'application ? La science dépend-elle d'une conception politique de l'homme ? A moins que, comme c'est le cas
chez nous, chaque secteur retrouve en son sein la présence de comités d'éthique.
Les thèmes agités par la
bioéthique sont-ils pour ce comité des sages des enjeux de marchandage ou l'occasion d'avis mitigés ? A moins
qu'on ne considère que la responsabilité du choix ne relève exclusivement du chercheur.
Mais Pasteur est-il moral
lorsqu'il propose d'inoculer la rage sur des condamnés à mort ?
II - Le point de vue épistémologique et la nécessité d'une ouverture.
a) Lorsqu'on lit le Traité de l'Homme de Descartes avec ses illustrations, ses
conseils d'expérience, ses détections de zone de l'éveil, du sommeil, ou du
délire sur le cerveau, tout manifeste une rupture épistémologique.
Là fut le
scandale, l'interdit.
L'homme étudié comme une machine est un modèle
théorique qui rompt avec la métaphysique liant la créature à son Dieu.
Avec
le temps, nous acceptons ces expérimentations humaines, ces façons
d'élaborer des preuves en utilisant l'homme comme partie intégrante de
l'expérience.
Descartes avait-il raison d'outrepasser ses limites pour élaborer
une révolution scientifique ?
b) Parfois, ce sont les moyens eux-mêmes qui imposent des limites.
Tel est le
cas de l'imagerie scientifique.
La main de Madame Röntgen traversée par les «
rayons X » est la première radiographie (1895) réalisée par l'inventeur, son
mari.
Quel risque mais aussi quel outil pour l'avenir ! Bien des expérimentations
pour voir l'intérieur avaient été impossibles.
Le développement des techniques
ferme des champs d'expérimentation, et délimite d'autres interdits.
A moins
que ce ne soient les problèmes économiques qui imposent des barrières à la
recherche.
La gestion du coût des maladies graves peut réduire des
recherches engageant des protocoles sur des populations nombreuses.
c) Au nom des conséquences, on peut aussi être tenté de freiner cette étape
nécessaire à la constitution du savoir.
Si, en laboratoire ou en circuit
déterminé, l'efficacité est preuve de vérité, au moment de l'application dans la société, dans la mesure où, comme le
dit Bergson, des nouveautés spectaculaires d'idées se produisent, on peut s'interroger sur le bien-fondé de ce
travail..
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