Peut-on atteindre le vrai?
Extrait du document
«
Peut : possibilité physique / intellectuelle.
Ici, c'est la cohérence d'une situation qui est interrogée
Atteindre : finaliser un « mouvement vers ».
Atteindre, c'est clore un déplacement - soit :
- physique (le coureur atteint une ligne d'arrivée)
-intellectuel (on atteint un objectif)
On vise donc le moment où le sujet coïncide avec l'objet de son action ; toute distance le séparant est abolie, ils ne
forment qu'un.
Il faut donc s'interroger sur la coïncidence possible entre ces deux êtres et voir en quoi leur nature
diffère.
Le vrai : deux sens :
- tè alethè : l'énoncé vrai = il coïncide avec le réel (par exemple, la proposition « il fait beau » est
considérée comme vraie si les nuages sont absents aux alentours de l'endroit où elle a été prononcée)
- aletheia : le Vrai comme tout unifié, ensemble synthétique (pas une simple somme) de propositions
vraies.
Présupposé : qu'un tel ensemble existe.
PBTK : « atteindre le vrai » implique que notre pensée soit en communion avec le réel.
La pensée est-elle un médium
approprié pour cette saisie ? Dans ce cas, pouvons-nous bien l'englober en esprit dans sa totalité ? Quel espace
reste t-il alors pour notre appréhension du monde ?
I.
Parce que le réel est marqué par une certaine permanence des êtres, nous pouvons bâtir une
connaissance stable
1.
Examen de la thèse de l'ignorance radicale (nous ne pouvons rien savoir du monde)
- Postulat d'ascendance bouddhiste : l'irréalisme, le monde est apparence (ex :
Schopenhauer , le voile de Maya).
Montrer contradiction : si « rien n'est vrai« , il est faux que rien ne soit vrai.
- Thèse sophistique : « l'homme est la mesure de toute chose » (Protagoras) -> rien n'est
absolument vrai, tout et son contraire peut être aussi bien prouvé.
Le sophiste Protagoras, écrit Diogène Laerce « fut le premier qui déclara que sur toute chose on pouvait
faire deux discours exactement contraires, et il usa de cette méthode ».
Selon Protagoras, « l'homme est la mesure de toute chose : de celles qui sont en tant qu'elles sont, de celles qui
ne sont pas en tant qu'elles ne sont pas » Comment doit-on comprendre cette affirmation ? Non pas, semble-t-il,
par référence à un sujet humain universel, semblable en un sens au sujet cartésien ou kantien, mais dans le sens
individuel du mot homme, « ce qui revient à dire que ce qui paraît à chacun est la réalité même » (Aristote,
« Métaphysique », k,6) ou encore que « telles m'apparaissent à moi les choses en chaque cas, telles elles existent
pour moi ; telles elles t'apparaissent à toi, telles pour toi elles existent » (Platon, « Théétète », 152,a).
Peut-on soutenir une telle thèse, qui revient à dire que tout est vrai ? Affirmer l'égale vérité des opinions
individuelles portant sur un même objet et ce malgré leur diversité, revient à poser que « la même chose peut, à la
fois, être et n'être pas » (Aristote).
C'est donc contredire le fondement même de toute pensée logique : le principe
de non-contradiction., selon lequel « il est impossible que le même attribut appartienne et n'appartienne pas en
même temps, au même sujet et sous le même rapport ».
Or, un tel principe en ce qu'il est premier est inconditionné
et donc non démontrable.
En effet, d'une part, s'il était démontrable, il dépendrait d'un autre principe, mais un tel
principe supposerait implicitement le rejet du principe contraire et se fonderait alors sur la conséquence qu'il était
sensé démontrer ; on se livrerait donc à une pétition de principe ; et d'autre part, réclamer la démonstration de
toute chose, et donc de ce principe aussi, c'est faire preuve d'une « grossière ignorance », puisqu'alors « on irait à
l'infini, de telle sorte que, même ainsi, il n'y aurait pas démonstration ».
C'est dire qu' « il est absolument impossible
de tout démontrer », et c ‘est dire aussi qu'on ne peut opposer, à ceux qui nient le principe de contradiction, une
démonstration qui le fonderait, au sens fort du terme.
Mais si une telle démonstration est exclue, on peut cependant « établir par réfutation l'impossibilité que la même
chose soit et ne soit pas, pourvu que l'adversaire dise seulement quelque chose ».
Le point de départ, c'est donc le
langage, en tant qu'il est porteur d'une signification déterminée pour celui qui parle et pour son interlocuteur.
Or,
précisément, affirmer l'identique vérité de propositions contradictoires, c'est renoncer au langage.
Si dire « ceci est
blanc », alors « blanc » ne signifie plus rien de déterminé.
Le négateur du principe de contradiction semble parler,
mais e fait il « ne dit pas ce qu'il dit » et de ce fait ruine « tout échange de pensée entre les hommes, et, en vérité,
avec soi-même ».
En niant ce principe, il nie corrélativement sa propre négation ; il rend identiques non pas
seulement les opposés, mais toutes choses, et les sons qu'il émet, n'ayant plus de sens définis, ne sont que des
bruits.
« Un tel homme, en tant que tel, est dès lors semblable à un végétal."
Si la négation du principe de contradiction ruine la possibilité de toute communication par le langage, elle détruit
aussi corrélativement la stabilité des choses, des êtres singuliers.
Si le blanc est aussi non-blanc, l'homme nonhomme, alors il n'existe plus aucune différence entre les êtres ; toutes choses sot confondues et « par suite rien
n'existe réellement ».
Aucune chose n'est ce qu'elle est, puisque rien ne possède une nature définie, et « de toute
façon, le mot être est à éliminer » (Platon).
La réfutation des philosophes qui, comme Protagoras, nient le principe de contradiction a donc permis la mise en
évidence du substrat requis par l'idée de vérité.
Celle-ci suppose qu'il existe des êtres possédant une nature
définie ; et c'est cette stabilité ontologique qui fonde en définitive le principe de contradiction dans la sphère de la
pensée.
C'est donc l'être qui est mesure et condition du vrai, et non l'opinion singulière.
« Ce n'est pas parce que
nous pensons d'une manière vraie que tu es blanc que tu es blanc, mais c'est parce que tu es blanc qu'en disant.
»
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