PEUT-ON AFFIRMER QUE LE MONDE A UN ORDRE ?
Extrait du document
«
Problématique:
La science décrit des phénomènes cohérents, qui semblent répondre à un ordre.
Mais avant de supposer un ordre
mystérieux, il faut comprendre que l'idée d'ordre n'a de sens que par rapport à son! contraire, le désordre, qui ne
peut lui-même être pensé que par rapport à l'idée d'ordre.
Il s'agirait! alors d'un problème mal posé.
[Dieu veut que tout soit ordonné.
Une action qui apparaît dépourvue de sens à nos yeux a toujours une
fonction dans l'ordre divin.
Nous pourrions le constater si notre vue était plus large.]
Le monde a un ordre caché - le désordre n'est qu'apparent (le
rationalisme historique chez Hegel)
Lorsque nous considérons ce spectacle des passions et les
conséquences de leur déchaînement, lorsque nous voyons la déraison
s'associer non seulement aux passions, mais aussi et surtout aux
bonnes intentions et aux fins légitimes, lorsque l'histoire nous met
devant les yeux le mal, l'iniquité, la ruine des empires les plus florissants
qu'ait produits le génie humain, lorsque nous entendons avec pitié les
lamentations sans nom des individus, nous ne pouvons qu'être remplis
de tristesse à la pensée de la caducité en général.
Et étant donné que
ces ruines ne sont pas seulement l'oeuvre de la nature, mais encore de
la volonté humaine, le spectacle de l'histoire risque à la fin de
provoquer une affliction morale et une révolte de l'esprit du bien, si tant
est qu'un tel esprit existe en nous.
On peut transformer ce bilan en un
tableau des plus terrifiants, sans aucune exagération oratoire, rien
qu'en relatant avec exactitude les malheurs infligés à la vertu,
l'innocence, aux peuples et aux Etats et à leurs plus beaux échantillons.
On en arrive à une douleur profonde, inconsolable que rien ne saurait
apaiser.
Pour la rendre supportable ou pour nous arracher à son
emprise, nous nous disons: Il en a été ainsi; c'est le destin; on n'y peut
rien changer; et fuyant la tristesse de cette douloureuse réflexion,
nous nous retirons dans nos affaires, nos buts et nos intérêts présents,
bref, dans l'égoïsme qui, sur la rive tranquille, jouit en sûreté du spectacle lointain de la masse confuse des
ruines.
» HEGEL
1) Le spectacle de l'histoire provoque un triple mouvement de désolation, qui conduit de la tristesse à
l'affliction pour atteindre la douleur profonde.
Hegel dépeint avec minutie ces étapes.
2) Se réfugier dans l'égoïsme (nos affaires, nos buts, nos intérêts) est une solution possible pour échapper à
cette réflexion née de la contemplation des ruines du passé.
1.
Le premier mouvement de tout ce passage marqué par l'emphase oratoire (et la répétition des « lorsque
nous ») débouche sur la tristesse que nous, observateurs associés à Hegel, ne pouvons manquer d'éprouver «
à la pensée de la caducité en général ».
Certes , ayant le recul des observateurs qui regardent de loin la suite des événements humains, « nous
considérons » ce qui apparaît comme un spectacle.
Ayant le réalisme des observateurs, nous sommes
capables de comprendre les mécanismes qui font réellement agir les hommes.
Ici, pas de place à
l'entendement, mais le champ est laissé libre aux passions ; pas de mesure, mais le déchaînement.
Alors que la raison s'oppose à la passion (et la freine, sinon l'enchaîne), l'histoire nous montre l'association de
la déraison (la folie) et la passion.
Ce qui, somme toute, va de soi.
Mais, plus fou encore, ce qui est bien (les
bonnes intentions, les fins légitimes) est perverti par la déraison : ce sont les bonnes intentions et les fins
légitimes qui produisent le mal et l'illégal.
Tout à l'heure nous devinions les hommes dans la multiplicité de leurs
actions individuelles, maintenant, c'est l'histoire abstraite qui commande et nous considère comme des
spectateurs (« l'histoire nous met devant les yeux »).
Les personnages du théâtre deviennent des entités : le
mal, la corruption des moeurs (« l'iniquité »).
Le décor : la ruine des empires.
L'histoire, avec ses ruines, est
toujours plus forte que l'homme avec ses empires.
Enfin nous entendons les plaintes bruyantes (« les
lamentations ») des individus qui pleurent sur la ruine de leurs cités, tout comme Jérémie pleurait sur la
destruction de Jérusalem par les Chaldéens.
La contagion des cris de douleur, présents ici-même (« nous l'entendons »), est plus forte que le spectacle.
Nous-mêmes ne pouvons « qu'être remplis de tristesse ».
C'est le moment de la réflexion, nourrie des.
»
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