Peut-on accéder a la réalité sans passer par l'abstraction ?
Extrait du document
«
Apparemment la réalité est appréhendée à partir d'une expérience immédiate et concrète (pensez à la sensation).
Mais cette expérience est souvent médiatisée par la mémoire, l'attente ou même l'attention qui dépasse la dimension
instantanée de l'expérience.
De même si je veux comprendre la réalité, ne vais-je pas devoir avoir recours à des
idées générales, des concepts et des raisonnements ? Il faut donc vous interroger sur ce qu'est au juste la réalité.
Est-elle indépendante du sujet qui l'appréhende ou est-elle au contraire constituée par l'individu, d'où la nécessité
d'une prise de distance et de recul ? Dans ce cas, l'abstraction ne signifie pas le refus de la réalité, mais peut-être
la condition de son émergence et de sa signification.
Ce sont nos sens qui éclairent l'esprit
L'empirisme affirme qu'il n'y a rien dans l'entendement qui n'ait été auparavant
dans les sens, cad que l'expérience est la source de toutes nos
connaissances.
Toutes nos idées ne sont jamais, comme dit Hume, que des «
copies de nos impressions sensibles ».
Non seulement l'expérience est la
source de nos idées mais encore elle explique l'association de ces idées entre
elles, cad le fonctionnement de notre esprit.
Qu'il s'agisse d'association par
ressemblance (deux idées s'appellent l'une l'autre quand leurs objets ont été
donnés de nombreuses fois soit l'un à côté de l'autre, soit l'un après l'autre).
C'est toujours dans des expériences antérieures et répétées que se trouve la
raison de ces associations.
C'est ainsi que pour Locke, il n'existe ni connaissance ni principe inné.
Dans «
Essai sur l'entendement humain », critiquant l'innéisme de Descartes, Locke
avance la thèse de la « table rase » : l'esprit de l'être humain, avant toute
expérience et éducation (celui du nouveau-né par exemple), est comme une
tablette de cire, vierge de toute écriture.
Nos idées simples viennent de la
sensation et de la réflexion.
Les idées complexes et en particulier les
catégories de substance, de mode et de relation sont le produit de la
combinaison des idées simples.
Pour Hume aussi les principes de la raison ne
sont pas innés mais acquis par l'expérience.
Comme philosophie générale, l'empirisme affirme avec Locke que nos idées ne
sont pas, comme le pensait Descartes, innées, mais qu'elles proviennent de
l'expérience.
On peut décomposer la philosophie empiriste de la connaissance
en trois moments.
1.
L'origine des idées.
L'esprit, dit Locke, est d'abord une page blanche, une « table rase » (tabula rasa).
«
Comment vient-il à recevoir des idées ? Par quels moyens en acquiert-il cette prodigieuse quantité que l'imagination
de l'homme, toujours agissante et sans borne, lui présente avec une variété presque infinie ? D'où puise-t-il tous
ces matériaux qui sont comme le fond de tous ses raisonnements et de toutes ses connaissances ? A cela je
réponds d'un mot : de l'expérience.
C'est le fondement de toutes nos connaissances, c'est de là qu'elles tirent leur
première origine.
» (« Essais sur l'entendement humain »).
L'expérience est donc d'abord pour l'empirisme une
réponse à la question de l'origine des idées.
Ainsi, un certain nombre d'idées naissent dans l'âme des « observations
que nous faisons sur les objets extérieurs et sensibles » (idem).
C'est le cas d'idées comme « dur », « mou », «
blanc », « jaune »...
Locke les appelle des « idées de sensations » : nous nous les représentons que parce que nous
avons eu l'expérience sensible du mou, du blanc, du jaune....
Pour un empiriste, un aveugle de naissance ne saurait
avoir aucune idée des couleurs.
Les autres idées viennent non de l'expérience externe, mais de l'expérience interne ;
cad des observations que nous faisons sur « les opérations intérieures de notre âme ».
Telles sont les idées de «
joie », de « peine », de « plaisir », de « douleur »...
Ce sont des idées de réflexions.
Dans les deux cas, les idées
sont, comme dit Hume, des « copies » des impressions sensibles.
2.
La composition des idées.
En faisant naître les idées de l'expérience sensible, comment pourrions-nous rendre
compte de l'infinité des idées que l'esprit peut concevoir, alors que est toujours limitée ? Je peux me représenter une
montagne d'or, ou un centaure : comment est-ce possible ? La réponse est : grâce à la possibilité de combiner ou
d'associer les idées, que Locke comme Hume attribut à l'imagination.
L'empirisme distingue entre les « idées simples
», cad inanalysables en éléments et immédiatement dérivées d'expériences sensibles élémentaires (telles les idées
de « rouge », « chaud »...) et les « idées composées », qui, elles, sot des résultats d'une combinaisons d'idées
simples.
3.
La signification des mots.
L'expérience comme contrôle.
L'expérience n'est pas seulement une origine ; elle est
aussi ce à quoi il faut retourner pour éprouver la valeur de nos pensées ou plus exactement de notre langage.
Les
mots dépendent des données sensibles particulières, aussi généraux et abstraits soient-ils.
De quoi suffit-il donc
pour savoir si un mot possède un contenu réel de signification ou si ce n'est qu'un mot creux ? Il suffit que le mot
représente effectivement une idée.
Pour établir la signification d'un mot, il suffit de rechercher de quelle(s).
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