Perception et sensation ?
Extrait du document
«
Termes du sujet:
Perception: Du latin percipere, saisir par les sens, recueillir, comprendre.
Faculté par laquelle le moi se forme, à
partir de ses sensations, une représentation unifiée des objets extérieurs à lui.
1.
La perception comme passivité
La perception semble désigner d'abord le fait de recevoir passivement dans notre esprit des faits extérieurs par le
biais des sens, mais également des faits intérieurs par la conscience.
La perception est, en ce sens, synonyme de
sensation.
"Toute impression simple s'accompagne d'une idée correspondante et toute idée simple d'une impression
correspondante.
De cette conjonction constante des perceptions semblables, je conclus immédiatement qu'il y a
une grande connexion entre nos impressions et nos idées correspondantes et que l'existence des unes exerce une
influence considérable sur l'existence des autres.
Une telle conjonction constante, dans un nombre aussi illimité de
cas, ne peut jamais naître du hasard ; mais elle montre clairement qu'il y a une dépendance des impressions par
rapport aux idées ou des idées par rapport aux impressions.
Pour savoir de quel côté se trouve cette dépendance,
j'envisage l'ordre de première apparition ; et je trouve, par expérience constante, que les impressions simples
précèdent toujours les idées correspondantes et que l'ordre inverse ne se produit jamais.
Pour donner à un enfant
l'idée de l'écarlate ou de l'orange, du doux ou de l'amer, je lui présente les objets, ou, en d'autres termes, je lui
communique ces impressions ; mais je ne procède pas assez absurdement pour tenter de produire les impressions en
éveillant les idées.
Nos idées, à leur apparition, ne produisent pas les impressions correspondantes et nous ne
percevons aucune couleur, ni ne ressentons aucune sensation à seulement y penser.
D'autre part nous trouverons
qu'une impression, qu'elle soit de l'esprit ou du corps, est constamment suivie d'une idée qui lui ressemble et qui en
diffère seulement par le degré de force et de vivacité.
La constante conjonction de nos perceptions semblables est
une preuve convaincante que les unes sont causes des autres ; et la priorité des impressions est une preuve tout
aussi grande que nos impressions sont les causes de nos idées et non nos idées les causes de nos impressions."
HUME
2.
La perception comme jugement
La sensation est définie comme une donnée élémentaire des sens.
La perception désigne, quant à elle, l'acte par
lequel nous organisons nos sensations en une unité.
Lorsque je me penche à ma fenêtre pour regarder le spectacle
de la rue, je dis que je vois passer des hommes.
Or, « que vois-je sinon des chapeaux et des vêtements, sous
lesquels pourraient se cacher des automates ? », écrit Descartes dans sa seconde méditation (Méditations
métaphysiques).
Nous voyons des chapeaux et jugeons cependant que ce sont des hommes, et ainsi, ce que nous
croyons voir par l'oeil, c'est par la seule faculté de juger que nous le comprenons.
Si la perception est une
construction faite à partir de données originaires, c'est parce qu'elle constitue déjà un jugement, au-delà de la
stricte sensation.
«Que vois-je de cette fenêtre, sinon des chapeaux et des manteaux, qui
peuvent couvrir des spectres ou des hommes feints qui ne se remuent que
par ressorts ?» Descartes, Méditations métaphysiques (1641), II.
• Le doute méthodique qui mène Descartes à remettre en cause l'existence
même du monde extérieur permet de bien comprendre la distance qui me
sépare d'autrui.
Qu'est-ce qui me prouve, en effet, que je ne suis pas le seul
être doué d'une véritable subjectivité, et que les autres ne sont pas tous des
automates, ou même des rêves?
• Si radicale et paranoïaque qu'une telle hypothèse puisse sembler, c'est bien
souvent comme un automate - ou comme un objet, et non comme un sujet
digne de ce nom - que je traite autrui lorsque je l'instrumentalise à mes
propres fins ou que je le considère comme d'une dignité inférieure à la mienne.
On croit naïvement que la perception est la réception passive d'une réalité
extérieure, que percevoir c'est sentir.
Mais en réalité, tout est jugement dans
la perception.
Par exemple, je ne sens jamais un dé cubique : « Je touche
successivement des arêtes, dit Alain, des pointes, des plans durs et lisses, et
réunissant toutes ces apparences en un seul objet, je juge que cet objet est
cubique.
» La perception de l'objet est donc « une opération de
l'entendement, dont les sens fournissent seulement la matière.
» Bref, «
l'objet est pensé et non pas senti ».
Alain prolonge les analyses de Descartes (la perception est une « inspection de l'esprit ») et de Kant
(l'entendement, qui est le pouvoir de juger, relie les sensations par ses catégories ).
Par son intellectualisme (primat
du jugement sur la sensation), Descartes s'oppose à l'empirisme (toutes nos idées et nos connaissances dérivent de
la sensation).
3.
Percevoir, c'est unifier.
La perception n'est pas d'une somme de sensations.
»
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