« Penser, c'est dire non. » Partagez-vous ce jugement d'Alain ?
Extrait du document
«
I.
Analyse du sujet.
Concepts.
Remarques de méthode
• Devant ce sujet, que faire ? Il faut, tout d'abord, cerner la signification du terme «penser»: penser, c'est appliquer
l'activité de son esprit aux éléments de la connaissance ; c'est exercer, avec justesse, une activité consciente, de
manière à élucider le sens des choses et du réel.
Il est nécessaire, d'autre part, d'approfondir l'expression « dire non » et, au-delà du « non » de simple rejet (celui de
l'enfant, par exemple, qui, néanmoins, ne doit pas être sous-estimé), de discerner un « non », dont la fonction est
éminemment critique, un « non » très proche de la « négativité », un « non » qui forme et crée la pensée et
s'identifie à elle.
• Partagez-vous ce jugement d'Alain ? Notez bien que cette question implique une prise de position personnelle.
• Quel plan choisir ? Le plan dialectique semble parfaitement adapté au sujet.
Nous vous le conseillons ici, de
préférence au plan progressif, moins adapté à cet intitulé :
— Thèse : le jugement d'Alain semble véridique (pensée et travail du « non » se confondent).
— Antithèse : mais le travail du négatif peut aboutir à la dissolution sceptique.
— Synthèse : penser, c'est dire oui à travers le non.
II.
Bibliographie
Alain
Définitions, in Les arts et les dieux, p.
1078, Pléiade.
Gilles Deleuze
Nietzsche et la philosophie, p.
201 sq, PUF (réservé aux courageux).
Descartes
Première Méditation, in Méditations métaphysiques, diverses éditions de poche (à lire et étudier soigneusement).
Hegel
Morceaux choisis, vol.
1, p.
121 sq, Idées-NRF.
III.
Dissertation
1° Introduction
• Qu'est-ce, tout d'abord, que penser ? Il faut prendre, ici, ce verbe en sa signification la plus haute et la plus
forte.
Il désigne le fait d'appliquer l'activité de son esprit aux éléments fournis par la connaissance, d'exercer, avec
justesse, une activité consciente et réfléchie.
Il y a, dans cet acte de penser, une idée d'application attentive, de
concentration de l'activité mentale : penser représente, non point une manifestation et un exercice passifs, mais un
travail authentique, un effort et une tâche.
Que signifie, maintenant, « dire non » ? « Dire non », c'est nier ou rejeter une proposition ou un rapport.
Cette
expression peut être prise soit concrètement, soit abstraitement : au sens strict et littéral, « dire non », c'est
émettre et exprimer, par la parole, une réponse négative, c'est nier et refuser.
Ainsi l'enfant manifeste-t-il,
verbalement, un refus (souvent par goût même du refus).
Mais «dire non» peut posséder, également, une
signification abstraite, signification qui paraît centrale dans le jugement d'Alain proposé à notre étude.
Il s'agit alors
du pouvoir abstrait de négation, de la capacité humaine de refuser, de ne pas adhérer, de se déprendre de
l'expérience.
Le « non » de pure opposition ou de simple rejet immédiat ne paraît pas réellement correspondre à celui
de la formule, encore que ce « non » corresponde, évidemment, comme l'ont montré les psychologues, à un exercice
formateur de la personnalité de l'enfant et du moi.
Le sens du sujet est, par conséquent, le suivant : pouvons-nous prendre part au jugement d'Alain selon lequel l'acte
d'exercer, avec justesse, son activité consciente et réfléchie s'identifierait à la capacité humaine de refus et de
non-adhésion ? Pensée et pouvoir de négation de l'esprit représenteraient, alors, deux notions quasi identiques,
s'engendrant d'un seul et même mouvement.
• Le sujet lui-même n'est pas sans poser problème : en identifiant pensée et « travail du négatif », Alain ne nous
fait-il pas demeurer au stade de la pure inquiétude spirituelle, du simple mouvement de la négativité, moment
incapable de se transcender jusqu'à une construction authentique et affirmative ? Définir la pensée par l'acte de «
dire non » aboutit, peut-être, à un fantôme de pensée, pensée non organique et non constructive.
Quand une
pensée n'est ni organique, ni synthétique, ni constructive, ce n'est pas une pensée.
Bien entendu, on ne saurait,
dans ce cas, partager le jugement d'Alain, puisqu'il s'auto-détruit.
Le problème est donc de savoir si le fait de « dire non » peut, néanmoins, conduire à une synthèse et une
affirmation, à une construction véritable.
2° Discussion
A) Le jugement d Alain semble véridique (Thèse).
Il semble, à première vue, possible de discerner dans le jugement d'Alain des éléments dynamiques et féconds.
Et,
en effet, nous avons été enfants avant que d'être des hommes, selon une formule célèbre, et cet état de passivité
initiale a engendré, en nous, un ensemble de préjugés dont il nous faut bien tenter de nous défaire, si nous voulons.
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