Pascal, L'imagination «maîtresse d'erreur et de fausseté»
Extrait du document
«
Indications générales
Blaise Pascal (1623-1662) est un auteur paradoxal, à la fois grand scientifique et grand mystique proche du
jansénisme (courant réformateur du catholicisme).
Il est l'auteur, d'un côté, de traités de mathématiques ou de
physique, et de l'autre, d'une réflexion sur la religion chrétienne qu'il n'a jamais terminée et qui nous reste sous la
forme de ses Pensées.
C'est pourquoi on trouve chez lui des mises en oeuvre de la raison qui visent souvent à
critiquer les prétentions rationalistes du xviie siècle.
Tel ce jugement sur l'imagination.
Citation
«Imagination.
— C'est cette partie décevante dans l'homme, cette maîtresse d'erreur et de fausseté, et d'autant
plus fourbe qu'elle ne l'est pas toujours, car elle serait règle infaillible de vérité si elle l'était infaillible du
mensonge.
Mais, étant le plus souvent fausse, elle ne donne aucune marque de sa qualité, marquant du même
caractère le vrai et le faux».
(Pensées, II, 81)
Explication
Parmi les facultés de l'homme [voir notion «la conscience»], la raison permet en principe la connaissance
objective, mais les hommes cèdent le plus souvent à leur imagination.
Celle-ci est d'autant plus redoutable qu'elle
ne se laisse pas reconnaître comme telle.
Pour échapper à l'imagination, il faudrait raisonner, mais comment puisje distinguer si je raisonne véritablement ou si j'imagine que je raisonne? Manière de dire que les hommes — y
compris ceux qui se croient les plus rationnels — s'entretiennent en permanence dans des illusions qu'ils créent
eux-mêmes.
Dans la lignée de Montaigne, Pascal met donc en évidence la faiblesse de nos facultés de connaître,
ce qui explique que pour lui, l'issue soit dans la foi et non dans la raison.
Exemple d'utilisation
Le texte de Pascal est une bonne référence pour mettre en question les pouvoirs de la raison [voir aussi Sextus
Empiricus].
Contre l'optimisme de Descartes, confiant dans les progrès à venir de la science, Pascal déclare
«Descartes, inutile et incertain ».
C'est un texte qui dit bien la finitude de l'homme, son absence de ressource
intérieure puisque ce sont ses propres facultés qui l'induisent en erreur.
C'est ce que Pascal appelle la «misère de
l'homme sans Dieu».
SUJET TYPE: L'imagination peut-elle seconder la raison dans la connaissance du réel ?
Contresens à ne pas commettre
Il faut faire attention à ne pas trop interpréter Pascal comme un penseur sceptique.
Pascal questionne les
pouvoirs de la raison, mais c'est rationnellement qu'il le fait.
Il ne s'agit pas de dire que nous ne pouvons rien
connaître — dans ce cas, Pascal n'aurait pas été également mathématicien et physicien — mais il faut remettre la
connaissance humaine à sa juste place, quelque part entre «les deux infinis».
« La grandeur de l'homme est
grande en ce qu'il se connaît misérable» : tel est le paradoxe de la dignité de l'homme, «roseau pensant».
Le
savoir absolu est hors de notre portée, mais cela ne nous empêche pas de penser.« Travaillons donc à bien
penser: voilà le principe de la morale.»
L'homme n'est qu'un roseau,
le plus faible des roseaux,
mais
c'est
un
roseau
pensant.
(Pensées)
On retrouve dans cette phrase le thème
pascalien de la misère de l'homme, faible
comme un roseau parce que mortel, et de la
grandeur de l'homme parce qu'il dispose de la
raison..
»
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