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Où commence la violence ?

Extrait du document

« Définition des termes du sujet: Violence: Mal physique ou moral infligé délibérément à autrui.

Violent: Qui s'impose à un être contrairement à sa nature.

Qui s'exerce avec une grande force (une passion violente). Il s'agit de dépasser le sens spatial du mot "où" : la violence ne commence pas dans un lieu.

"Où" nous invite à nous demander à partir de quand on peut parler de violence, autrement dit : la violence est-elle d'une nature différente de la brutalité, de l'agressivité, de la contrainte, ou n'y a-t-il entre tout cela et la violence qu'une différence de degré ? Y a-t-il un seuil à partir duquel on peut parler de violence ? Il faut donc définir la spécificité du concept de violence.

Est-elle seulement physique, morale ? Porte-t-elle atteinte seulement au corps, ou à l'intégralité de l'homme ? Quel est l'auteur de la violence : est-ce l'individu, le monde, l'État qui est violent ? Ces différentes sources de violence imposent-elles une délimitation différente des frontières entre violence et nonviolence ? La violence commence-t-elle quand on ne peut plus expliquer l'usage de la force ? Quand celui-ci n'est plus justifiable ? Le mot " où " porte également sur l'origine de la violence.

L'étude de cette origine permettra de faire le lien entre l'individu et son milieu (origine culturelle qui brouille l'idée d'un commencement : n'a-t-elle pas toujours existé ?).

En quoi la réflexion sur l'origine et la nature de la violence permet-elle de la condamner, ou éventuellement de l'excuser ? A.

Toute atteinte à la personne est violence • Le mot violence évoque tout à la fois la force et la démesure.

Un acte de brutalité ou d'intimidation est un acte «violent» ; un sentiment ardent ou impétueux est un sentiment « violent ».

Mais il n'y a de violence véritable que pour des consciences, pour des personnes animées d'intentions hostiles. La violence suppose la volonté d'infliger un dommage physique ou moral à la personne d'autrui.

Les interventions d'un chirurgien sur le corps de ses patients ne peuvent être considérées comme des violences, puisqu'elles visent à guérir, et non à faire du mal.

Inversement, on peut causer de graves traumatismes sans porter le moindre coup, sans faire usage de la force.

Cette forme de violence, que le sociologue français Pierre Bourdieu (né en 1930) a identifiée sous le nom de « violence symbolique », est douce, subtile et souvent invisible pour les victimes ellesmêmes.

Infantiliser une personne par exemple, lui parler comme s'il s'agissait d'un faible d'esprit, c'est la rabaisser de manière insidieuse, c'est briser son autonomie, c'est lui faire violence.

De même, ce serait une erreur de réserver le terme de violence aux manifestations d'une force destructrice, désordonnée, anarchique — à l'agitation révolutionnaire, par exemple — et de considérer que les « forces de l'ordre » qui répriment un soulèvement populaire ne sont pas violentes, sous prétexte qu'elles agissent sur le commandement des autorités légales, dans une discipline stricte et pour protéger les institutions.

L'ordre établi peut n'être qu'une violence masquée, s'il permet l'exploitation, la répression, voire l'anéantissement des personnes. B.

La violence est partout présente Il y a violence chaque fois que des personnes ne reçoivent pas le respect qui leur est dû.

Cette définition assez large de la violence a pour conséquence que nous devons reconnaître l'omniprésence, à des degrés divers, de la violence.

Én général, la violence se défend d'être une violence première ; elle se donne pour une réponse à une violence antérieure.

La violence de l'incarcération répond à la violence du criminel, laquelle répond parfois à d'autres violences subies dans l'enfance... Partout et toujours, on voit l'homme exercer la violence contre ses semblables.

Comme le souligne Spinoza dans son Traité politique (1677), la paix peut être aussi violente que la guerre, si elle n'est obtenue qu'au prix de la terreur. Lorsque des pays industriellement développés achètent à vil prix des matières premières aux pays pauvres, pour leur revendre des produits manufacturés au plus haut cours, cet échange d'apparence pacifique peut être considéré comme une violence.

Lorsque des gens meurent de faim par centaines de milliers dans certains pays d'Afrique tandis qu'ailleurs, la publicité s'ingénie à inventer de nouveaux besoins, cette situation porte en elle des germes de violence, même si les responsabilités ne sont pas toujours faciles à établir et les remèdes faciles à trouver. LES PENSÉES DE LA VIOLENCE A.

Le conflit est père de toutes choses Si la violence est partout, c'est peut-être qu'elle tient à la nature même de l'Être.

Telle est du moins la thèse avancée par le présocratique Héraclite (vers 540-480 avant J.-C.), qui voit dans le conflit le « père de toutes choses ».

Pour Héraclite, l'harmonie du monde résulte de la tension perpétuelle des contraires.

De même qu'en musique, la rencontre du grave et de l'aigu produit un accord harmonieux, c'est de la confrontation violente des contraires (jour-nuit, hiver-été, vie-mort, etc.) que se dégage l'harmonie de la nature. À la suite d'Héraclite, Hegel fait de la contradiction le moteur même de l'Histoire.

Le devenir historique n'est pas linéaire, mais dialectique.

Autrement dit, l'humanité ne se développe et ne se réa-lise qu'à travers des crises ou des conflits qui jettent périodiquement les hommes les uns contre les autres.

Les révolutions, les guerres, les massacres ne seraient que l'expression du « travail du négatif », grâce auquel les contraires peuvent finalement se réconcilier et s'unir.

On n'est pas loin de ce que Kant, déjà, affirmait à propos de la guerre : à force de s'entre-déchirer, les peuples finissent par coopérer pour créer les conditions d'une paix véritable et durable. B.

L'usage politique de la violence. »

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