Obéir aux lois de l'Etat, est-ce nécessairement etre injuste ?
Extrait du document
«
Communément nous considérons que nous adoptons une attitude de citoyen juste et responsable lorsque nous nous
conduisons en conformité avec les lois.
Cela signifie que l'obéissance aux lois civiles est synonyme de justice et
donc que par la même occasion les lois déterminent ce qui est juste et ce qui ne l'est pas.
Mais alors n'y a-t-il pas
un problème lorsqu'on pose la question suivante : obéir aux lois de l'Etat, est-ce nécessairement être injuste ? La
question pose problème dans la mesure ou elle implique que les lois de l'Etat sont susceptibles d'être injustes.
Ainsi
cela suppose que la loi, qui pour nous est le symbole de la justice, dans la mesure où elle est l'expression du droit,
est capable d'injustice.
Autrement dit la collusion entre loi et justice qui nous semblait légitime est contester par
l'énoncé de la question et nous conduit à nous interroger sur le rapport entre justice et loi.
En effet dans quelle
mesure la loi peut elle être injuste ? Qu'est-ce qui nous permet de juger l'injustice d'une loi ?
I Loi et justice
A : De manière générale la loi est pour nous l'outil qui permet de faire respecter la justice.
La loi est la marque en
nous de Dieu, elle est inscrite dans notre raison et nous enjoint de faire le bien et de nous détourner du mal.
Elle
nous pousse à agir justement et à nous détourner de l'injustice.
En nous soumettant à la loi de la raison nous
tentons de faire de la justice humaine l'expression de la justice divine.
Ainsi il existe en l'homme un sens inné de la
justice qui montre que la justice est une notion transcendante et non pas conventionnelle.
B : En effet, même à l'état de nature, l'homme est en mesure de déterminer ce qui est juste et ce qui ne l'est pas,
car il est libre d'user de sa raison qui lui sert de critère de justice.
C'est ce qu'affirme Locke dans le Second traité du
gouvernement civil II,2, où il montre par la même occasion que l'état de nature est un état où il existe des rapports
justes car ils sont réglés par la raison.
Ainsi tout le problème est de garder cette transparence à la raison quant à l'instauration des lois par l'Etat.
En effet
ne risquons-nous pas de rencontrer des déformations en passant des lois de la raison aux lois civiles ?
II Les lois de l'Etat
A : Pour que les lois de l'Etat soient justes elles doivent être conformes à la raison divine.
Or dans une perspective
chrétienne, on sait que l'homme est incapable de pénétrer les voies du seigneur en raison de sa nature
peccamineuse.
Ainsi la justice humaine sera toujours imparfaite, et la justice ne sera que l'expression de la force car
comme le dit Pascal dans les Pensées : « ne pouvant faire en sorte qu'il soit force d'obéir à la justice, on a fait en
sorte qu'il soit juste d'obéir à la force ».
La justice transcendante nous est
inaccessible il faut alors instituer notre propre justice.
Justice, force.
Il est juste que ce qui est juste soit suivi ; il est
nécessaire que ce qui est le plus fort soit suivi.
La justice sans la force
est impuissante ; la force sans la justice est tyrannique.
La justice sans force est contredite, parce qu'il y a toujours des
méchants.
La force sans la justice est accusée.
Il faut donc mettre
ensemble la justice et la force, et pour cela faire que ce qui est juste
soit fort ou que ce qui est fort soit juste.
La justice est sujette à
dispute.
La force est très reconnaissable et sans dispute.
Aussi on n'a
pu donner la force à la justice, parce que la force a contredit la justice
et a dit qu'elle était injuste, et a dit que c'était elle qui était juste.
Et
ainsi ne pouvant faire que ce qui est juste fût fort, on a fait que ce qui
est fort fut juste.
La justice et la force sont-elles irrémédiablement séparées ou peuvent-elles
s'accorder en se prêtant un appui mutuel? Voilà la question à laquelle répond
ce texte, en montrant la confusion profonde que la force introduit
délibérément et à son seul profit entre les deux notions.
1.
Les principes : justice et force sont radicalement dissemblables (lignes 1 à 6, jusqu'à « ...
ce qui est fort
soit juste »).
A.
Justice et force ne sont pas respectées de la même façon : dans les faits, il est possible de ne pas se conformer
à la justice.
Mais cela est injuste, cela contrevient à des normes éthiques.
Au contraire, il est impossible de résister
à la force, la soumission est « nécessaire » (ligne 1), car la force est précisément une capacité de contrainte.
Respecter la première résulte d'un choix, d'une décision libre.
Se soumettre à la seconde est inévitable.
B.
Pas de justice sans force et pas de force sans justice : sans l'appui de la force, la justice est incapable de se
réaliser.
Elle reste à l'état de principe, de « voeu pieu » et n'existe pas véritablement.
En effet, elle est toujours en
butte à ses adversaires, les « méchants », qui usent, eux, de la force (ligne 3) et ont le dessus, étant donnée la.
»
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