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N'y a-t-il de bonheur que dans l'instant ?

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« Définition des termes du sujet: BONHEUR: De bon et heur (terme dérivé du latin augurium, présage, chance).

État de complète satisfaction de tous les penchants humains. • Le bonheur se distingue du plaisir et de la joie, qui sont des émotions éphémères et toujours liées à un objet particulier.

• Dans les morales eudémonistes, le bonheur est la fin de l'action humaine.

Pour Kant, en revanche, c'est le respect de la loi morale qui doit orienter la volonté, et non la recherche du bonheur.

Car cette recherche est toujours déjà intéressée, égoïste donc contraire à la morale. Instant: Du latin instans, participe présent de instare, « presser ».

Infime portion du temps, dépourvue d'épaisseur et de durée. • L'instant est au temps ce que le point est à l'espace : indivisible et sans durée, il est pourtant le constituant ultime du temps. [Introduction] Le problème ici est de savoir si l'homme heureux et celui qui jouit de l'instant présent.

Etre heureux, c'est voir l'ensemble de nos aspirations satisfaites et on dit souvent qu'il faut saisir l'instant présent pour jouir pleinement du présent ("Carpe Diem" disait les épicuriens).

Car l'inquiétude quant à l'avenir et le souvenir de notre passé seraient sources de tristesse et de malheur.

En effet, la conscience déborde le présent et se projette dans l'avenir.

La règle de vivre l'instant présent serait donc la garante d'une vie insouciante, innocente donc heureuse.

Pourtant, le bonheur doit aussi compter sur la durée, sur l'expérience, sur l'anticipation qui pourront lui donner sa consistance et sa continuité.

Sans quoi le bonheur serait une succession d'instants sans lien entre eux.

Il faut donc que l'homme ne se coupe pas de ce qui fait son identité et son histoire.

Il y aurait donc un apprentissage du bonheur, au fil du temps, qui interdit de fixer à l'avance ce qu'il doit ou ne doit pas être. [I.

Bonheur et chance] L'étymologie enseigne que le bonheur est du côté de la chance, du hasard, de ce qui peut nous échoir sans que l'on comprenne immédiatement pourquoi.

Mais cette acception est immédiatement contredite par l'espoir habituel de s'arranger pour que ce bonheur dure le plus longtemps possible. S'il est attribué par chance, le bonheur risque bien d'être fugace, de ne durer qu'un « instant ».

Encore convient-il de ne pas prendre ce dernier terme au sens strict, et de concevoir que l'instant peut quand même être doté d'une petite durée, qui le rend d'autant plus appréciable.

Il n'en reste pas moins que, en m'arrivant indépendamment de ma volonté, le bonheur risque bien de repartir de même, au bout d'un temps qui me paraîtra sans doute toujours trop bref. Ainsi, seraient du bonheur les moments où je suis comblé par ce qui m'entoure.

On voit alors que le bonheur, même s'il est fugace, doit être en correspondance avec une attente de ma part.

avec une orientation de mon esprit.

Faute de quoi il faudrait admettre que le bonheur est imprévu, non seulement dans son surgissement, mais également dans son « contenu » - ce qui semble plus difficile : comment pourrais-je être heureux de quelque chose dont je n'ai aucune expérience antérieure, ou même aucune notion ? Lorsque je déguste un nouveau plat, cela peut constituer, selon notre analyse, un moment de bonheur, mais c'est parce que je savais que j'allais pouvoir manger quelque chose de nouveau, dont on m'avait peut-être prévenu que c'était délicieux ou dont il était sous-entendu, par la situation dans laquelle je me trouvais, que ce pourrait être une expérience agréable.

Si, en revanche, je suis incapable de prévoir si peu que ce soit ce qui va se produire (imaginons que j'ai un bandeau sur les yeux et que j'ignore ce qui se passe autour de moi), il est fort peu vraisemblable que je ressente un petit bonheur en avalant la bouchée que l'on m'a placée sans un mot dans la bouche. Il semble donc exister des conditions qui, bien qu'extérieures à ce qui peut me rendre momentanément heureux, déterminent ma réceptivité au bonheur.

Et l'on doit affirmer qu'il ne peut y avoir de bonheur sans conscience du bonheur présent - ce pourquoi ce n'est que métaphoriquement que l'on peut considérer qu'un animal, ou même un enfant, est heureux.

Mais cette conscience est peut-être d'abord conscience du présent, avec tout ce qui l'a constitué : situation actuelle niais aussi souvenirs ou projets le déterminant.

C'est d'ailleurs pourquoi l'« instant » du bonheur ne peut être trop bref : pour que j'en aie conscience, et pour que je puisse le savourer. [II.

Bonheur et durée] La tendance spontanée de l'individu est de prolonger ce qui lui plaît.

Il y aurait donc dans le bonheur limité à l'instant quelque chose d'insatisfaisant, puisqu'en profiter, ce serait aussi savoir que le plaisir ne durera pas. Si l'on conçoit le bonheur comme un moment d'exaltation, on devine que celle-ci doit nécessairement décroître assez rapidement : nous ne pouvons supporter, ni physiquement ni mentalement, une forte dépense trop longtemps.

Le bonheur serait alors ce qui vient interrompre la vie ordinaire, selon une périodicité variable.

Cela ne lui retirerait pas son intérêt : lorsqu'il est là, j'en profite pleinement, et lorsqu'il n'est pas là, je peux attendre, sinon prévoir, son retour (on sait que chez les épicuriens, le souvenir d'un moment heureux permet de rendre supportable une situation présente pénible).

Ces ponctuations de bonheur rendraient la vie plus riche, plus satisfaisante.

Et c'est précisément pour les multiplier que l'on peut alors être tenté de mieux maîtriser le bonheur, d'en faire autre chose que le résultat d'une chance. C'est bien ce qu'ont tenté la plupart des sagesses de l'Antiquité, qui affirment une relation entre le bonheur et la vertu.

En pratiquant la vertu, ce qui relève de notre volonté, nous devons atteindre un bonheur qui, même s'il n'est pas permanent, sera plus durable.

Cela suppose que l'on sépare cette fois le bonheur du simple plaisir, décidément trop éphémère, et que l'on admette que la vie heureuse est celle qui vise le Souverain Bien.

Ainsi Aristote peut-il affirmer que le bonheur réside dans l'activité, et la vertu dans l'aptitude qui est propre à chaque être : il en déduit que, puisque la vertu de l'homme est de penser (d'user de sa raison), une vie heureuse consiste pour l'homme à être délivré des besoins primaires et à pouvoir se tourner vers l'activité intellectuelle. L'objection est facile : on sait - et par expérience ! - que le bonheur, quelle que soit la conception que l'on en a, ne se laisse pas maîtriser si facilement.

Même s'il est déplaisant de le considérer comme un « don du ciel », il n'est guère réaliste de prétendre qu'il survient à volonté, ou à force d'entraînement.

Nous voici renvoyés à la satisfaction du moment, mais en constatant qu'il nous appartient, au moins en partie, de la préparer : j'aurai plus de chance d'être satisfait en allant voir un filin dont je pense qu'il peut nie plaire, plutôt qu'un autre dont je sais à l'avance que je l'aimerai pas.. »

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