Notre rapport au monde est-il avant tout technique ?
Extrait du document
«
Notre rapport au monde, à ce qui nous entoure, est en apparence technique car nous cherchons toujours à
exercer une maîtrise sur le monde, à nous rendre maîtres et possesseurs de la nature.
Nous nous ouvrons donc
à la réalité et cette réalité est visée comme un objet sur lequel notre puissance et notre pouvoir s'exercent.
C'est l'idéal techniciste de l'occident.
Car on appelle technique l'ensemble des savoirs et des savoir-faire qui
permettent à l'homme d'améliorer les conditions de son existence.
Pourtant le sujet vous demande d'interroger
ce postulat techniciste.
En effet, notre rapport à ce qui nous entoure ne vise pas toujours une maîtrise.
C'est
le cas de la relation avec les œuvres d'art, avec autrui ou même avec la connaissance en général en tant que
connaître peut se faire par amour de la connaissance.
Ainsi l'homme est capable de renoncer à la maîtrise et à
la mainmise car il y a dans le monde des réalités qui ne se prêtent pas à une emprise technique.
Ceci est
flagrant dans les rapports avec autrui, puisque si je veux être moral, je ne dois jamais traiter autrui comme un
simple moyen mais avant tout comme une fin, comme une personne digne qui ne peut être utilisée comme le
serait un outil.
Au fond vous devez remettre en question ce présupposé selon lequel tout autour de nous
pourrait devenir un instrument ou une simple chose matérielle.
Car il y aussi de l'esprit et de la conscience
autour de moi, et cela se respecte.
[Notre rapport au monde est d'emblée technique.]
L'homme est un technicien
La nature a doté l'homme d'une intelligence fabricatrice.
Au lieu de lui
fournir des instruments, comme elle l'a fait pour bon nombre
d'espèces animales, elle a préféré qu'il les construisît lui-même .
Or
l'homme a nécessairement la propriété de ses instruments, au moins
pendant qu'il s'en sert.
Mais puisqu'ils sont détachés de lui, ils
peuvent lui être pris ; les prendre tout faits est plus facile que de les
faire.
Surtout, ils doivent agir sur une matière, servir d'armes de
chasse ou de pêche, par exemple ; le groupe dont il est le membre
aura jeté son dévolu sur une forêt, un lac, une rivière ; et cette
place, à son tour, un autre groupe pourra juger plus commode de s'y
installer que de chercher ailleurs.
Dès lors, il faudra se battre.
[...]
Mais peu importent la chose que l'on prend et le motif qu'on se donne
: l'origine de la guerre est la propriété, individuelle ou collective, et
comme l'humanité est prédestinée à la propriété par sa structure, la
guerre est naturelle.
Thèse du texte:
Les instruments humains sont détachés de l'homme et peuvent lui
être arrachés.
La guerre est, dès lors, naturelle: elle est liées aux
besoins humains.
Quelle est l'origine de la guerre ? La propriété.
Peu de concepts complexes, comme c'est le cas dans presque tous les textes de Bergson; ici, par
exemple, la notion bergsonnienne d'"intelligence fabricatrice" est presque la seule à devoir être expliquée
avec un soin particulier (sans négliger, bien entendu, les autres termes, comme propriété).
On
s'efforcera, dans l'analyse des étapes de la pensée de Bergson, de montrer clairement que ce sont les
conditions naturelles s'imposant à l'homme qui conduisent à la guerre.
Quelques références utiles:
La tentation est grande de voir dans le développement technique un trait essentiel de l'homme.
C'est le
pas que franchit Bergson, qui parle dans « L'évolution créatrice », de l' « invention mécanique » comme «
démarche essentielle », quitte à aller jusqu'à dire que l'histoire retiendra davantage la « machine à
vapeur » que les « guerres et les révolutions ».
Ce propos conduit Bergson à définir l'intelligence humaine
comme « faculté de fabriquer des objets artificiels », et ce, au détriment direct d'une autre
compréhension de l'intelligence, celle qui la comprendrait comme faculté d'articuler des moyens avec des
fins.
Une certaine formule de l' « Evolution créatrice » doit retenir notre attention : Bergson veut en
effet substituer à l' « homo sapiens », l'homme qui pense, l' « homo faber », l'homme qui fabrique.
Cette
formulation est lourde de conséquences : elle témoigne de la portée de cette question de la technique
sur l'identité humaine elle-même.
Si l'homme devient « homo faber », il n'est plus qu'un fabricateur
d'outils, un être tourné vers l'efficacité avant tout autre souci ; alors que tant qu'il est encore un homo
sapiens, il reste un être capable de juger de la qualité morale d'une finalité.
« En ce qui concerne l'intelligence humaine, on n'a pas assez remarqué que l'invention mécanique a.
»
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