Nos désirs constituent-ils notre identité?
Extrait du document
«
Analyse du sujet :
Le sujet prend la forme d'une question fermée, à laquelle il s'agira de répondre par « oui » ou « non » en
conclusion avec les nuances qui s'imposent, au terme d'une argumentation documentée.
Le désir est la recherche de quelque chose en vue d'une satisfaction.
Cette recherche n'est pas
nécessairement consciente : l'objet du désir peut demeurer flou.
On peut même ne pas savoir ce que l'on désir.
Ce que nous avons appelé « recherche » n'est donc pas une enquête ou une investigation méthodique et
théorique mais consiste plutôt en une attraction éprouvée et non calculée.
Le désir se distingue donc de la volonté par son caractère essentiellement passif : le désir suppose le manque,
l'absence de ce qui est désiré.
S'il est passif et suppose le manque, le désir n'est pourtant pas assimilable au besoin.
Mieux vaut dire qu'il
s'accompagne d'un besoin ou de l'impression d'un besoin.
Pour le dire autrement, il n'est pas toujours un besoin
naturel, comme la faim : je peux désirer manger même après m'être largement rassasié.
Le désir, s'il recherche un objet pour se satisfaire, ne s'évanouie pourtant pas quand l'objet est obtenu, si bien
qu'il reste indéfiniment insatisfait.
Il est donc essentiellement démesure.
L'identité, négativement, est ce qui permet de distinguer une chose d'une autre par un certain nombre des
caractères qui la constituent : deux choses identiques sont précisément indiscernables.
Identifier quelque chose suppose des critères d'identification, c'est-à-dire quelque chose qui demeure par delà
le changement : l'identité est donc liée au temps.
l'identité s'oppose encore à l'altérité.
L'identité diffère de l'égalité.
Deux choses égales, par exemple « 4 » et « 2 + 2 » ne sont pourtant pas
identiques.
« 4 », qui par essence est un nombre, n'est pas identique à « 2 + 2 » qui est une somme.
L'égalité signifie seulement l'identité de traitement des choses égales, et non l'identité des choses ellesmêmes.
Pour prendre un autre exemple, nous disons que les hommes sont égaux, ils ne sont pourtant pas
identiques.
Problématisation :
Le premier problème est le suivant : nos désirs suffisent-ils à constituer notre identité ou bien sont-ils des éléments
parmi d'autres qui participent à cette édification ? Autrement dit :
I – Sommes-nous réductibles à l'ensemble de nos désirs ?
Le second problème est relatif à la notion même d'identité : comment pouvons-nous affirmer que nous sommes
toujours une même personne, que nous sommes identiques à nous-même ? Le vieillard que je serai ne semble avoir
aucun point commun avec l'enfant que j'étais.
Je peux même changer d'identité civile !
II – Est-ce un sujet identique à lui-même qui désire ?
I – Sommes-nous réductibles à l'ensemble de nos désirs ?
Référence : Spinoza, Ethique
« PROPOSITION 6
Chaque chose, autant qu'il est en elle [= selon sa puissance], s'efforce de persévérer [= se développer] dans son
être.[...]
PROPOSITION 7
L'effort [conatus] par lequel chaque chose s'efforce de persévérer dans son être n'est rien en dehors de l'essence
actuelle de cette chose.
[...]
PROPOSITION 9
SCOLIE [note relative à la proposition]
Quand on rapporte cet effort à l'Esprit seul, on l'appelle Volonté, mais quand on le rapporte simultanément à l'Esprit
et au Corps, on l'appelle Appétit ; et celui-ci n'est rien d'autre que l'essence même de l'homme, essence d'où
suivent nécessairement toutes les conduites qui servent sa propre conservation ; c'est pourquoi l'homme est
nécessairement déterminé à les accomplir.
En outre, il n'y a aucune différence entre l'Appétit et le Désir, si ce n'est
qu'en général on rapporte le Désir aux hommes en tant qu'ils sont conscients de leur appétit ; c'est pourquoi on
pourrait le définir ainsi : Le Désir est l'appétit avec la conscience de lui-même.
Il ressort donc de tout cela que nous
ne nous efforçons pas vers quelque objet, nous ne le voulons, ne le poursuivons, ni ne le désirons pas parce que
nous jugeons qu'il est un bien, mais au contraire nous ne jugeons qu'un objet est un bien que parce que nous nous
efforçons vers lui, parce que nous le voulons, le poursuivons et le désirons.
»
Le geste de Spinoza consiste à renverser la position communément admise sur le désir : celui-ci n'est pas un
penchant qui justement nous empêcherait d'être nous-même en nous asservissant aux objets que nous désirons.
Au
contraire, le désir est une puissance d'affirmation de soi, et surtout une puissance de création.
Autrement dit, ce
sont les objets du désir qui acquièrent un statut positif, qui gagnent en quelque sorte en réalité, parce que
justement nous les désirons.
C'est donc le désir qui produit son objet et non le manque de cet objet qui produit le
désir.
Si le désir est premier et non asservi à ses objets, alors c'est bien lui qui détermine ce que je fais, les objets.
»
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