Nietzsche
Extrait du document
«
On a jusqu'à présent attribué au "bon" une valeur supérieure à celle du méchant,
supérieure au sens du progrès, de l'utilité, de la prospérité pour ce qui regarde le
développement de l'homme en général (sans oublier l'avenir de l'homme).
Comment ? Que
serait-ce si le contraire était vrai ? Si, dans l'homme "bon", il y avait un symptôme de
régression, quelque chose comme un danger, une séduction, un poison, un narcotique qui
ferait peut-être vivre le présent aux dépens de l'avenir? d'une façon plus agréable, plus
inoffensive, peut-être, mais aussi dans un style plus mesquin, plus bas ?...
Citer La Généalogie de la morale dans un sujet sur la morale (D'où viennent nos idées du
bien et du mal ?)
Pour Nietzsche, le «bien» et le «mal» ne sont pas des valeurs absolues.
Elles ont une
histoire, une généalogie oubliée qu'il s'efforce de retracer.
Nietzsche est un penseur du
soupçon: il faut trouver quels processus se cachent derrière ce qui paraît bien établi et
immuable.
La morale ordinaire, qu'elle soit d'origine religieuse ou philosophique, voit dans le fait d'être bon avec son
prochain quelque chose de profitable à l'individu et au genre humain.
Nietzsche renverse cette conception commune,
trop commune: il en propose une lecture médicale: c'est un «symptôme».
Le symptôme d'un affaiblissement de la force
vitale et créatrice de l'individu.
Être «bon», pour Nietzsche, c'est en fait renoncer à la partie la plus vivante de soi.
Les
créateurs, ceux que Nietzsche appelle les «forts», ne sont ni bons ni mauvais, ils «sont» simplement, et ils donnent à
leur être une intensité d'existence supérieure à celui qui se prétend «bon» et se sent meilleur que les autres à bon
compte.
La morale est donc pour Nietzsche comme une maladie, une «régression», un «narcotique».
Essayer d'être
bon, c'est essayer d'endormir ce qu'il y a en soi de plus singulier et de plus intéressant
Citer La Généalogie de la morale dans un sujet sur le désir («L'homme peut—il s'élever au—dessus de ses désirs ? »)
Pour Nietzsche, on ne sort jamais du désir.
Les moralistes (Platon, les stoïciens, le christianisme, Kant...) ont tous
condamné le désir: pour eux, le désir est ce que l'homme doit dominer pour parvenir à la vertu et, éventuellement, au
Salut.
Mais pour Nietzsche, la force qui permet de surmonter un désir est elle-même de l'ordre du désir.
Ce désir,
Nietzsche l'appelle «volonté de puissance».
Présente à l'état pur chez les «forts», les grands créateurs, elle s'exprime
chez les «faibles» sous la forme du ressentiment.
Aussi, prétendre être «bon», prétendre atteindre à la vertu ou à la
sainteté, et croire que l'on s'est mis au-dessus de ses désirs, ce n'est en fait qu'exprimer une autre forme de désir.
Culpabiliser les forts de leur force, c'est la ruse que les faibles, les prêtres, les professeurs de morale, emploient pour
dominer les forts.
Ce désir du non-désir a lui aussi sa puissance: il n'est qu'en apparence «plus inoffensif».
Mais c'est
une forme froide et perverse.
Un désir moins beau que la simple force poétique de celui qui ignore la différence entre le
bien et le mal.
Citer La Généalogie de la morale dans un sujet sur l'existence et le temps (« Devons—nous vivre pour le présent ou
pour l'avenir?»)
L'idée de «bonté», pour Nietzsche, fait vivre le présent «aux dépens de l'avenir».
C'est-à-dire qu'elle affaiblit l'avenir:
l'humanité s'est dégradée avec l'avènement des valeurs morales, tout autant qu'avec la prétention à la rationalité et à
la science, qui vont de pair avec l'affaiblissement des singularités.
Pour Nietzsche, l'humanité est malade de ses
prétentions à l'universel.
Mais dire que le présent vit aux dépens de l'avenir, cela veut aussi dire que le présent est mis
dans la dépendance de l'avenir.
C'est le présent lui-même qui est affaibli.
Par exemple, lorsque l'individu se satisfait de
sa condition misérable dans l'espoir d'une vie meilleure dans un autre monde.
Ou lorsqu'il se sacrifie dans l'idée que son
sacrifice est bon pour l'avenir de l'humanité.
Il faut vivre, pour Nietzsche, comme si le temps devait se répéter, dans
un «éternel retour».
Il faut intensifier l'existence autant qu'il est possible.
Celui qui diminue son présent nuit aussi à son
avenir, les deux sont indissociables et c'est un mauvais calcul, aussi bien de sacrifier son présent pour un avenir
supposé meilleur, que de sacrifier son avenir (sa force créatrice à venir) pour adoucir le présent..
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