Ne doit-on tenir une proposition pour vraie que si elle est contrôlable par l'expérience ?
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«
Introduction
Prestige des sciences expérimentales et du type de vérité qu'elles semblent définir : des hypothèses vérifiées par
l'expérience.
Mais ne doit-on tenir pour vraie une proposition que si elle est contrôlable par une expérience ?
1° analyse du sujet
a) Qu'est-ce qu'une proposition ?
Une proposition est l'énoncé d'un jugement, susceptible d'être vrai ou faux, c'est-à-dire une certaine relation, un
certain rapport entre des termes ou entre des concepts.
Par exemple : Socrate est mortel ; les corps sont pesants
; y = f (x) (cf.
les lois scientifiques) ; l'homme est libre...
b) Qu'est-ce qu'une expérience ?
Le mot expérience n'est pas univoque.
II apparaît dans des contextes très différents, avec des significations
différentes.
On peut distinguer :
–
l'expérience-relation immédiate d'un sujet avec une réalité a sa conscience ;
–
l'expérience-observation, constatation plus ou moins précise de certains faits, de certains phénomènes,
dont on note les caractères importants ;
–
l'expérience-pratique (avoir de l'expérience), savoir-faire acquis par la répétition de certaines activités ;
–
l'expérience-experimentation scientifique proprement dite.
c) Se méfier de l'« expérience »
• En conséquence, l'expression « tenir pour vraie une proposition contrôlable par une expérience » n'est pas sans
ambiguïté.
Lorsqu'un individu tient une idée pour vraie, quelle que soit cette idée et si fausse qu'elle puisse se
révéler à l'examen, il le fait au nom d'une certaine expérience ; il pense que son idée est déjà contrôlée, ou bien
qu'elle peut l'être.
Sans cela, l'idée lui semblerait une simple « vue de l'esprit », une affirmation gratuite, sans valeur
de vérité.
Pour prendre un exemple caricatural mais assez clair, une proposition raciste (« tous les Noirs sont ceci...
»), dans l'esprit de celui qui la pose comme vraie, est l'expression d'un fait qu'on a observe ou qu'on pourrait
observer ; même si ces « observations » ne sont que les interprétations contestables de faits plus ou moins
imaginaires, elles constituent « l'expérience » sans laquelle une thèse ne serait pas considéré comme vraie par celui
qui la pose.
Dans leur caverne, les prisonniers dont parle Platon fondaient leurs opinions sur la seule « expérience »
qu'ils avaient de la réalité : la perception des ombres (cf.
La République, début du livre VII).
•
Pour passer de l'erreur, de l'illusion, du préjugé, a une vérité fondée, il ne suffit pas de « s'en tenir aux faits
», aux données premières d'une expérience quelconque, est nécessaire de se méfier des « expériences »
immédiates.
•
Bien plus, les propositions qu'il faut tenir pour vraies pourraient être, précisément, celles qui sont
affranchies du contrôle incertain de l'expérience.
2° des vérités sans expérience ?
a)
Les « vérités » mathématiques
•
Si Platon inscrit au fronton de l'Académie : « Que nul n'entre ici s'il n'est géomètre », s'il donne aux
mathématiques une valeur exemplaire, c'est essentiellement parce qu'elles installent l'esprit sur le plan des pures
idées ; les mathématiques ne tiennent pas leur vérité du sensible, de l'expérience trompeuse.
En effet, elles forment
un Système de propositions logiquement liées qui reposent sur des hypothèses de départ.
Platon demande au
philosophe de « traiter ces hypothèses non comme des principes mais réellement comme des hypothèses, comme de
simples bases de départ et des tremplins pour atteindre a ce qui n'est plus hypothétique mais principe de tout...
»
(République, VII, 511 b-c).
La raison, par la seule puissance de sa dialectique, atteindrait ainsi l'absolu.
La vérité ne
repose pas sur une expérience du monde sensible.
«Nul n'entre ici s'il n'est géomètre» PLATON
Au linteau de la porte d'entrée de l'Académie était cet avertissement : «Nul n'entre ici s'il n'est géomètre».
C'est dire l'importance qu'attachait Platon aux mathématiques en tant que discipline préparatoire
(propédeutique), nous apprenant à nous dégager des choses immédiatement sensibles pour considérer des
rapports intelligibles, nous éloigner du «concret» pour appréhender «l'abstrait».
C'est par cette discipline des
mathématiques que nous devenons aptes à élaborer une construction, qu'on appelle hypothético-déductive,
c'est-à-dire une théorie qui reconstruit déductivement (selon des règles logiques) un donné à partir
d'hypothèses..
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