Nature et société sont-elles au même titre objet de science ?
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Termes du sujet:
SCIENCE : Ensemble des connaissances portant sur le donné, permettant la prévision et l'action efficace.
Corps
de connaissances constituées, articulées par déduction logique et susceptibles d'être vérifiées par l'expérience.
OBJET (n.
m., étym.
: latin ob-jectum : ce qui est placé devant ; chose).
1.
— Tout ce qui est présenté par la
perception, avec un caractère stable et indépendant du sujet (objet externe) ; pour la phénoménologie, l'objet est
déterminé par la visée de la conscience (cf.
sens 3).
2.
— Tout ce qui se présente à un sujet, s'offre à la pensée,
et qui est distinct de l'acte de représentation ou du sentiment (donc du sujet), c.-à-d.
aussi bien le percept,
l'image, l'idée, que l'objet externe ou la personne aimée.
3.
— Le but qu'on se propose d'atteindre (cf.
un objectif).
OBJECTIF / OBJECTIVITE: Caractère de ce qui existe indépendamment de la conscience.
Caractère de ce qui
est établi sans aucun jugement de valeur.
Dans le domaine de la connaissance, l'objectivité est réalisée quand
l'esprit constitue un objet de pensée pouvant en droit faire l'accord des esprits (universalité).
En ce sens, la notion
est synonyme de rationalité.
Opposée à la subjectivité, elle requiert l'impartialité du sujet connaissant et exige la
mise en oeuvre de procédures d'observation et d'expérimentation garantissant la validité des opérations relevant de
l'investigation scientifique dont l'objectivité ne sera précisément méritée qu'à ce prix.
NATURE :
1° L'inné par opposition à l'acquis (nature opposée à culture, ou chez les anthropologues anglo-saxons nature
opposée à nurture); 2° Essence, ensemble des propriétés qui caractérisent un objet ou un être (la nature de
l'homme par exemple); 3° L'ensemble des phénomènes matériels, liés entre eux par des lois scientifiques.
En ce sens,
le naturel peut s'opposer au surnaturel qui désigne une intervention transcendante de la divinité; 4° Spinoza
distingue la nature naturante, c'est-à-dire la substance infinie et la nature naturée, les divers modes par lesquels
s'exprime cette substance.
Le mot nature est ambigu.
Le naturalisme du xviiie siècle par exemple est contradictoire.
D'une part son épistémologie réduit la nature à un mécanisme (des faits soumis à des lois nécessaires) indifférent
aux valeurs humaines.
D'autre part, sa morale prétend se fonder sur la nature, c'est-à-dire sur des tendances
spontanées, supposées bonnes; la nature devient alors la Mère-Nature, une sorte de providence bienveillante.
Société : association d'individus qui constitue le milieu où chacun s'intègre.
Toute espèce vivante est plus ou
moins sociale ; mais tandis que les sociétés animales sont naturelles et gouvernées par l'instinct, les sociétés
humaines, organisées selon des institutions mobiles, véhiculent une culture.
[Introduction]
Depuis qu'elles existent, les sciences de l'homme n'en finissent pas d'être examinées, et interrogées à propos de
leurs méthodes ou de leur finalité.
Une telle interrogation repose pratiquement toujours sur une
comparaison avec les sciences de la nature, qui apparaissent comme les modèles d'une scientificité que l'on tient
pour impossible aux sciences de l'homme.
En restreignant la comparaison à la seule sociologie, comme science de la
société, sans trop s'appesantir sur les autres disciplines (la psychologie ou l'histoire), on s'attachera ici à se
demander si la société peut être objet de science au même titre que la nature : on devrait ainsi lui reconnaître des
caractères scientifiques, mais qui seront en partie autres que ceux que l'on trouve dans les sciences de la nature.
[I.
Qu'est-ce qu'un « objet de science » ?]
Il n'y a sans doute pas de science sans objet, puisque, par définition, toute science étudie «quelque chose ».
Mais
l'objet de la science n'est pas immédiat, et il n'est pas nécessairement donné.
La notion même d'objet implique que
soit reconnue l'existence d'un monde objectif, séparé et distinct de la subjectivité humaine.
On sait combien le
repérage ou la constitution d'un tel monde est un phénomène historiquement tardif.
Lorsqu'il établit sa loi des états, Auguste Comte montre d'abord, dans les états théologique et métaphysique,
combien l'objet et le sujet se trouvent étroitement confondus.
Pour l'esprit théologique, les phénomènes que nous
qualifions de naturels dépendent des volontés ou des caprices des dieux, parfois de leur simple humeur, et il y a
ainsi attribution de tout ce qui survient à des « sujets » sans doute supérieurs aux humains, mais dotés comme eux
d'une vie psychique.
Dans la mentalité métaphysique, c'est la nature dans son ensemble qui paraît animée de
sentiments (par exemple, elle peut avoir « horreur du vide »), de désirs ou de volontés qui ressemblent à ceux que
connaît l'homme lui-même.
Ce n'est ainsi qu'au prix d'un « désenchantement du monde » que s'instaure l'esprit
scientifique : les événements sont désormais privés de toute épaisseur ou réalité spirituelle, et c'est bien ce qui
permet qu'un monde composé de purs objets puisse désormais nous faire face et s'offrir à la science.
De ce point de vue, le travail de Galilée est essentiel : il assure le passage d'un cosmos ordonné à un espace
géométrisé où jouent des lois mécaniques indifférentes aux projets humains.
L'homme pourra y occuper n'importe
quel emplacement parce qu'il n'a plus de place qui lui revienne en propre.
Cette neutralité du monde objectif autorise
le développement de la science aussi bien que de la technique, puisque plus rien n'y est a priori doté de valeur ou
de sens.
Lorsqu'il instaure la sociologie comme dernière discipline dans sa classification des sciences, Auguste Comte lui
donne comme objectif de reconstruire un système de valeurs collectives sur lequel puisse se fonder un nouvel ordre
social (puisque l'ancien a été détruit par la Révolution) :la description des structures sociales et l'analyse de la
mobilité sociale doivent permettre d'espérer une telle efficacité.
[II.
La société comme « objet »].
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