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Merleau-Ponty

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Il y a toujours dans un film une histoire, et souvent une idée, mais la fonction du film n'est pas de nous faire connaître les faits ou l'idée. Kant dit avec profondeur que dans la connaissance l'imagination travaille au profit de l'entendement tandis que dans l'art l'entendement travaille au profit de l'imagination. C'est-à- dire: l'idée ou les faits prosaïques ne sont là que pour donner au créateur l'occasion de leur chercher des emblèmes sensibles et d'en tracer le monogramme visible et sonore. Le sens du film est incorporé à son rythme comme le sens d'un geste est immédiatement lisible dans le geste, et le film ne veut rien dire que lui-même. U idée est ici rendue à l'état naissant, elle émerge de la structure temporelle du film, comme dans un tableau de la coexistence de ses parties. C'est le bonheur de l'art de montrer comment quelque chose se met à signifier, non par allusion à des idées déjà formées et acquises, mais par l'arrangement temporel ou spatial des éléments. Merleau-Ponty

« Il y a toujours dans un film une histoire, et souvent une idée, mais la fonction du film n'est pas de nous faire connaître les faits ou l'idée.

Kant dit avec profondeur que dans la connaissance l'imagination travaille au profit de l'entendement tandis que dans l'art l'entendement travaille au profit de l'imagination.

C'est-à-dire: l'idée ou les faits prosaïques ne sont là que pour donner au créateur l'occasion de leur chercher des emblèmes sensibles et d'en tracer le monogramme visible et sonore.

Le sens du film est incorporé à son rythme comme le sens d'un geste est immédiatement lisible dans le geste, et le film ne veut rien dire que lui-même.

U idée est ici rendue à l'état naissant, elle émerge de la structure temporelle du film, comme dans un tableau de la coexistence de ses parties.

C'est le bonheur de l'art de montrer comment quelque chose se met à signifier, non par allusion à des idées déjà formées et acquises, mais par l'arrangement temporel ou spatial des éléments. On pourrait croire qu'une oeuvre d'art renvoie au fond à des faits ou à des idées de la vie réelle.

Dans ce cas, où serait la démarcation entre l'art et la réalité ? La position de Merleau-Ponty laisse plutôt entendre que l'art ne se constitue pas à partir d'un sens préexistant, mais qu'il est constitutif de son propre sens, né de l'agencement de ses formes. La fonction de l'art n'est pas de nous faire connaître la réalité. • L'art n'est pas un simple résumé du réel, sinon quelle serait sa spécificité ? • L'exemple du cinéma, rapporté par Merleau-Ponty, est particulièrement bien choisi, puisqu'un film est facilement racontable, comme si tout son intérêt se réduisait à son scénario. • Or, le créateur n'use de l'entendement (des idées) que comme un instrument au service de l'imagination, pour reprendre la terminologie kantienne.

Si l'oeuvre pouvait être remplacée par une idée, elle ne serait plus sensible, mais ne concernerait que l'intellect. L'oeuvre d'art est une organisation de formes. • L'oeuvre n'est pas réductible à son idée ou à l'histoire qu'elle donne à voir : elle est aussi « rythmes », emblèmes sensibles » (image, musique, plans, décor). • S'il peut y avoir ressemblance avec la réalité, c'est toujours selon une sélection propre au réalisateur : dans le film, il est maître de l'arrangement de l'espace et du temps. • Ainsi l'oeuvre d'art s'affirme-t-elle comme unité d'un matériau divers (« coexistence des parties »). L'oeuvre d'art ne signifie qu'elle-même. • L'oeuvre signifie, non par rapport à des discours préexistants, mais à partir de l'arrangement de ses éléments, c'est-à-dire à partir de sa composition.

C'est l'oeuvre qui fait l'idée et non l'idée qui fait l'oeuvre. • Autrement dit, l'oeuvre est « ouverte » (Umberto Eco) quant à son sens qu'elle porte en elle.

Langage de formes, elle laisse au « récepteur » le soin d'exprimer la vérité qu'elle recèle. • L'oeuvre d'art, offerte aux interprétations, témoigne ainsi de son inépuisable achèvement. Il ne faut pas chercher l'art ailleurs qu'en lui-même.

Comprendre ce qu'il exprime à partir de l'analyse de ses éléments particuliers constitue « un pont vers la vie intérieur de l'oeuvre » (Kandinsky) . MERLEAU-PONTY (Maurice).

Né à Rochefort-sur-mer en 1908, mort à Paris en 1961. Il fut professeur à l'Université de Lyon, à la Sorbonne, et, à partir de 1952, au Collège de France.

Disciple de Husserl, il fonda avec Sartre Les temps modernes.

Il s'est surtout occupé de philosophie psychologique, et s'est intéressé à l'existentialisme dans ses rapports avec le marxisme. Oeuvres principales : La structure du comportement (1941), Phénoménologie de la perception (1945), Humanisme et terreur (1947), Sens et non-sens (1948), Eloge de la philosophie (1953), Les sciences de l'homme et la phénoménologie (1953), Les aventures de la dialectique (1955), Signes (1961).. »

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