Marc Aurèle, Tout est beau pour qui sait voir
Extrait du document
«
Indications générales
Marc Aurèle (121-180) fut un des derniers empereurs de Rome.
Il a aussi laissé ses réflexions, d'inspiration stoïcienne
[voir aussi: Sénèque, Cicéron et Épictète] dans un recueil de textes courts intitulé Pensées pour moi-même.
La
citation choisie permet d'illustrer la conception stoïcienne de l'art et du rapport au beau.
Citation
«Les accidents mêmes qui s'ajoutent aux productions naturelles ont quelque chose de gracieux et de séduisant.
Le
pain, par exemple, en cuisant, se fendille et ces fentes ainsi formées, qui se produisent en quelque façon à l'encontre
de l'art du boulanger, ont un certain agrément et excitent particulièrement l'appétit.
[ ..] Beaucoup d'autres choses, si
on les envisage isolément, sont loin d'être belles, et pourtant, par le fait qu'elles accompagnent les oeuvres de la
nature, elles contribuent à les embellir et deviennent attrayantes.
Aussi un homme qui aurait le sentiment et
l'intelligence profonde de tout ne trouverait pour ainsi dire presque rien [ ..] qui ne comporte un certain charme
particulier.
Cet homme ne prendra pas moins de plaisir à voir dans leur réalité les gueules béantes des fauves qu'à
considérer toutes les imitations qu'en présentent les peintres et les sculpteurs».
(Pensées pour moi-même, livre III, 2.)
Explication
Celui qui sait voir le réel tel qu'il est le voit dans sa totalité.
«Voir», ici, n'est pas juste une sensation, mais une
sensation accompagnée d'une vue de l'esprit, de la raison, qui permet de replacer ce qui est vu dans la totalité de
l'univers.
Aussi chaque chose lui apparaît-elle à sa place, nécessaire dans l'organisation harmonieuse du Tout.
C'est
pourquoi il n'y a rien de laid pour lui, même la gueule d'un fauve, puisque tout manifeste la beauté de la Nature prise
comme un tout.
Le sage, qui sait voir le réel, connaît donc des joies fréquentes, là où d'autres éprouvent de la crainte
ou du dégoût.
À noter que, pour lui, la réalité est plus belle que n'importe quelle oeuvre d'art ne peut l'être.
Exemple d'utilisation
Ce passage donne un bon exemple pour faire comprendre que le beau n'est pas juste une question de sensibilité, mais
aussi d'intelligence, de compréhension, de raison: celui qui comprend ce qu'il voit en ressent mieux la beauté que celui
qui se contente de ses sensations.
Le texte illustre bien aussi l'idée que la beauté naturelle est supérieure à la beauté
des oeuvres humaines.
SUJET TYPE: Le beau n'est-il que l'objet d'une perception ?
Contresens à ne pas commettre D'abord, ne pas croire que, pour le philosophe, ce n'est que dans la contemplation
du Tout, dans l'élévation au-dessus des choses, que se trouve la beauté: au contraire, Marc Aurèle dit bien que celui
qui est capable de voir le Tout est aussi celui qui est capable de voir la singularité de chaque chose.
Dans ce passage, où Marc Aurèle se réfère à la joie procurée par la perception des petites particularités de chaque
chose, il y a une résonance épicurienne [voir Épicure].
Il ne faut toutefois pas confondre ces joies, ni avec l'ataraxie
stoïcienne, ni avec la conception épicurienne du plaisir comme souverain Bien..
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