L'utilisation des modèles en philosophie
Publié le 22/02/2023
Extrait du document
«
Philosophie des sciences
L’attente que l’on a des sciences dans nos sociétés post-modernes, c’est la production
de savoirs vrais.
La science serait en un sens un refuge de la véridiction.
Elle est encore vue
comme la source du vrai, du discours vrai.
Or, même les sciences qui ont une activité
purement descriptive sont soumisses à ce questionnement par rapport à la réalité.
Autrement
dit, sont-elles autant de portes ouvertes sur le monde en soi, tel qu’il est ? Dès lors qu’on
commence à s’intéresser à la manière dont les savoirs scientifiques sont fondés, on tombe sur
la question des modèles, à savoir une représentation du réel.
Il est légitime de questionner le
rapport de représentation que les modèles entretiennent avec les objets du monde.
Aussi, quels
sont les buts poursuivis par l’activité scientifique dans la modélisation ? Pour nous aider à
comprendre le monde qui nous entoure, nous créons des modèles de phénomènes.
Ces
modèles nous permettent de comprendre ce qu’il se passe.
Ils sont personnels et peuvent ne
pas toujours correspondre au modèle d’autrui.
Ils peuvent souvent être instables, incomplets
ou défectueux.
D’autre part, les modèles conceptuels sont des représentations ou des
analogies partagées et explicites de phénomènes.
Ces modèles sont le plus souvent utilisés par
les scientifiques pour les aider à comprendre le monde.
Ils sont utilisés dans tous les domaines
de la science et offrent des versions externes des concepts mentaux.
Cependant, les modèles
ne sont pas une représentation parfaite ; ils sont une version simplifiée d’un système qui met
en évidence certains domaines tout en en ignorant d’autres.
Ainsi, les modèles font office de
base constitutive dans la façon dont nous appréhendons le réel.
Je suis d’avis qu’il est
intéressant et même légitime de s’interroger sur le rapport de confiance que nous entretenons
avec ces modèles ; sur la nécessité que nous avons à nous appuyer sur leurs représentations du
monde, sans quoi il nous est difficile voire impossible de nous confronter au réel.
Cette question de confiance envers le modèle pose l’enjeu suivant qui est de savoir à
quoi tient réellement la valeur d’un modèle scientifique.
En d’autres termes, à quelle
condition puis-je donner de la valeur, du crédit, encore, une légitimité à un modèle
1
BUNIVA-VENTRE Léa
Philosophie des sciences
scientifique ? Pour ma part, affirmer que la valeur accordée à un modèle scientifique dépend
de sa seule efficacité prédictive (ce en vue de quoi le modèle est créé) semble dévaluer
d’autres critères nécessaires à la véridiction de l’efficacité du modèle scientifique.
J’entends ici montrer pourquoi les modèles sont intrinsèquement contextuels et sont
affaire de capacité ; comment ces modèles réalisent l’articulation du concret de l’expérience
avec l’abstrait de la théorie et sont, enfin, l’interprétation du collectif de pensée.
Le début de la science moderne se caractérise entre-autre par l’émergence et le
développement de la modélisation c’est-à-dire l’utilisation de représentations d’un
phénomène, objet, évènement naturel pour pouvoir l’étudier.
Il y a avant tout une dimension
spéculative des modèles puisqu’on ne peut pas faire de tests immédiats qui seraient
empiriques (dans le réel).
Pour pouvoir affirmer quelque chose, on est obligé d’enchainer tout
un tas de raisonnements dont les théories sont considérées comme correctes : les premières
formulations des théories seront des points de départ et des points de repère qui permettront la
précision de propos ultérieurs.
Or, le modèle nous permet de faire des prédictions à un niveau
de généralité très grand ; ce qui est, du point de vue de la fidélité incertain.
Autrement dit, il
est légitime d’avoir des doutes.
Pour autant, les modèles appartiennent à cette catégorie
d’entités que sont les briques constitutives de nos connaissances scientifiques.
Ils prennent
place dans un système de connaissances et vont avoir pour fonction de coordonner et de
combiner les concepts de phénomènes appartenant au donné du réel empirique, de manière à
permettre de comprendre, d’expliquer les phénomènes se manifestant dans un champ donné.
Selon Giere1, un modèle porte sur le monde, la réalité et dépend dans son rapport au réel d’un
certain nombre d’hypothèses dont on doit vérifier qu’il soit adéquat.
On va donc utiliser le
modèle pour faire des prédictions, descriptions, explications.
Ce passage par l’intégration
1
Voir Understanding scientific reasoning
2
BUNIVA-VENTRE Léa
Philosophie des sciences
d’hypothèses dans les théories, les lois, se symbolise par le fait que nos prédictions soient
adéquates avec nos données.
Dans ce cas je considère que le modèle acquiert bien une partie
de sa valeur dû à son efficacité prédictive.
Quand j’étudie un phénomène, quand je produis un modèle pour étudier ce dernier, je suis
amenée à questionner le modèle lui-même ; c’est-à-dire la relation du modèle et de la cible (le
réel).
Par l’utilisation de modèles « on fait comme si » ; on mime un aspect de la cible que
l’on souhaite étudier.
C’est par exemple la visée des modèles que l’on nomme maquettes ;
certains modèles sont des copies réduites ou agrandies de leurs systèmes cibles et permettent
d’explorer les différentes propriétés dans différents champs donnés du futur produit final.
Ainsi, savoir si un énoncé est vrai ou faux c’est devoir lever une sorte de voile qui s’interpose
entre l’esprit -les représentations de la réalité- et la réalité elle-même.
En effet, nous ne
pouvons pas produire de la connaissance si nous restons au seul stade des phénomènes.
Les
modèles s’imposent.
Un modèle donc, c’est un dispositif expérimental (qui peut être
physique) et de spécifications (ce qu’on laisse de côté).
Ainsi, le modèle nécessite un ou des
objectifs.
Il est conçu pour répondre à un certain nombre de questions dans une certaine
perspective.
Par exemple, la maquette d’une voiture en bois qui est placée dans une soufflerie
va permettre de tester les propriétés aérodynamiques de la future voiture réelle.
Ce qui va
donc être déterminant pour l’attribution ou non de crédit au modèle ce sont les finalités que
l’on donne à notre produit, notre système.
On parle ici des fonctions visées par le modèle.
Effectivement, la finalité du modèle c’est le réel.
Pour l’atteindre, il s’en inspire.
La valeur du
modèle tient en ce sens bel et bien dans son efficacité prédictive.
Après tout, si le modèle
réussit le test final, il réussit ce qui était seulement demandé au départ.
Cependant, je suis
d’avis que l’on peut tout à fait interroger le degré de confiance que nous pouvons avoir envers
le modèle.
Cela revient à en questionner la fiabilité (critère de rigueur qui sert à l’évaluation
de la valeur).
La simple représentation du réel est-elle une condition suffisante pour donner du
3
BUNIVA-VENTRE Léa
Philosophie des sciences
crédit au modèle scientifique ? Encore, de quoi la légitimité de la représentation doit-elle
dépendre ?
Certes j’admets que le modèle représente la réalité ou la finalité que je cherche à
produire, mais représenter c’est avant tout « trahir ».
Quand je représente, je ne représente
jamais fidèlement et à la lettre le réel et toute ses contingences.
Il n’existe pas de modèles
réduits parfaitement fidèles, la fidélité est toujours limitée à un certain égard.
C’est là tout le
problème des représentations : elles ne respectent pas toujours les variables.
Reprenons ici
l’exemple de la maquette ; la maquette en bois de la voiture offre une représentation fidèle de
la forme de la voiture mais pas de son matériau.
Également, cette inspiration du réel et de
l’existant dépend à la fois de connaissances (croyances justifiées) et de croyances (fait de tenir
pour vrai une proposition).
Pour la phase de conception je suis parfois obligée de me faire
violence, j’entends ici aller à l’encontre de mes propres croyances voire certitudes.
La
conception du modèle doit donc poser la question suivante : qu’est-ce qu’on choisit de
conserver et de mettre de côté dans le modèle ? Par la modélisation on doit remettre en cause
les croyances omniprésentes afin de ne pas se retrouver bloqué, empêché dans notre
expérience scientifique du monde.
Dans cette démarche, la modélisation apparaît comme le
moyen d’acquérir de nouvelles connaissances envers le produit dans le monde.
L’apprentissage d’un modèle se fait à deux moments : dans sa construction et dans sa
manipulation.
Il n’y a en effet pas de lois pour la conception d’un modèle et donc l’activité
même de déterminer ce qui s’accorde et comment, offre une opportunité d’en apprendre
davantage sur le modèle.
Une fois le modèle construit, nous n’apprenons pas ses propriétés en
le regardant, nous devons l’utiliser et le manipuler afin de le comprendre dans sa globalité.
On
ne se contente plus seulement d’être dans une position descriptive comme l’explique Duhem 2.
2
Voir La théorie physique
4
BUNIVA-VENTRE Léa
Philosophie des sciences
On cherche à expliquer par des phénomènes observables les phénomènes inobservables.
Je
cherche à aller au-delà de la simple description ; je suis pour ainsi dire dans l’explicativisme.
Pour appuyer l’argument de l’explicatisvime, je crois qu’il est important de se pencher sur la
question de la relation des modèles et des théories.
Les théories sont des entités (phénomènes
inobservables, que l’on considère pour vraies) pour agir sur....
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- MÉTHODOLOGIE DU COMMENTAIRE DE PHILOSOPHIE
- [Affinités de l'art et de la philosophie] Bergson
- La philosophie contemporaine (cours)
- METHODOLOGIE DISSERTATION EN PHILOSOPHIE
- Que sera la philosophie de demain ?