L'opposition entre le fond et la forme a-t-elle un sens ?
Extrait du document
«
[L'objet d'art n'est pas seulement matière et forme.
Si tel était le cas, il ne se distinguerait pas des autres objets.
Il révèle un fond, une idée.
Les formes changent.
Le sentiment du beau reste identique.]
Le beau est la forme, le bien est le fond
Plotin, dans les Ennéades, établit un étroit rapport entre le beau, que révèle l'art, et le bien, qui est l'idée de
Dieu.
Cette idée, qui constitue le fond de la beauté artistique, imprime sa forme à l'objet d'art.
Aussi, derrière
toute beauté esthétique, il faut saisir l'élan de l'âme qui s'élève vers l'intelligible, c'est-à-dire le souverain
bien.
La forme est révélation de l'esprit
On trouve, dans l'Esthétique de Hegel, ces mots: «Le contenu de l'art
comprend tout le contenu de l'âme et de l'esprit (...), son but consiste
à révéler à l'âme tout ce qu'elle recèle d'essentiel.» La forme, bien que
changeante, est donc toujours la matérialisation d'un fond.
Ce fond
n'est autre que l'âme elle-même dans ce qu'elle a de plus profond et de
plus intemporel.
Hegel rompt avec Kant, pour qui la beauté naturelle tient une large
part.
La contemplation de la belle nature accorde
mystérieusement l'imagination et l'entendement.
Hegel rejette la beauté
naturelle, car la beauté artistique étant un produit de l'esprit lui est
nécessairement supérieure.
C'est pour nous et non en soi et pour soi
qu'un être naturel peut être beau.
L'imitation de la nature n'est donc
pas de l'art, tout au plus un exercice d'habileté, par lequel on imite le
Créateur.
Il y a plus de plaisir à fabriquer des outils ou des machines
qu'à peindre un coucher de soleil.
La valeur de l'art est tout autre :
c'est l'esprit à l'oeuvre, qui s'arrache de la nature en la niant.
Au moyen
de l'art, l'homme se sépare de la nature et se pose comme distinct.
L'art peut donc faire l'objet d'une science, pense Hegel, il suffit d'en
montrer la nécessité rationnelle dans l'histoire de l'humanité.
L'oeuvre
d'art ne décrit pas une réalité donnée, elle n'est pas faite pour notre
plaisir, mais l'art est en son essence une intériorité qui cherche à s'exprimer, à se manifester ; c'est un
contenu qui cherche une forme, un sens qui veut se rendre matériel.
On ne peut le condamner pour son
apparence, car il faut bien à la vérité une manière de se montrer.
L'art étant historiquement la première
incarnation de l'esprit, il se confond d'abord à la religion : la religion grecque est l'art grec lui-même.
Ce sont
Homère et Hésiode qui ont inventé les dieux grecs.
Cet âge d'or de l'art, que Hegel définit comme "classique",
sera dépassé par l'art romantique avec l'apparition du christianisme.
La religion chrétienne est essentiellement
anthropomorphique : le divin est le Christ, soit une pure individualité charnelle, qui a souffert et qui est morte
en croix.
Seul l'art peut ici donner une représentation charnelle de ce divin, dont le passage historique a été
fugitif, et si l'art est mort dans notre société moderne, c'est probablement pour la raison que la spiritualité
chrétienne ne suffit plus tout à fait aux besoins de l'esprit.
Le beau est une idée, soit l'unité d'un concept et de la réalité.
Le concept est l'âme tandis que la réalité en
est l'enveloppe charnelle.
Le beau est donc la manifestation sensible de cette unité ; il exprime une
réconciliation.
Il est naturel qu'il échappe à l'entendement qui sépare et qui divise, de même qu'à la volonté
qui cherche à soumettre l'objet à ses propres intérêts.
Tout ce qui est libre, indépendant, infini, conforme à la
seule nécessité de son concept, peut être dit beau.
De plus, un bel objet est vrai, puisqu'il est conforme à
son être.
Cela implique qu'aucun organisme vivant ne pourra être beau, parce que soumis au besoin, il n'a pas
de véritable liberté.
Seule la beauté artistique peut être accomplie : elle représente l'idéal.
L'idéal est soustrait
de la vie quotidienne imparfaite et inauthentique.
Il incarne l'universel dans l'individualité absolument libre et
sereine : le symbole en est l'individualité apollinienne, perfection d'harmonie et de forme, sérénité conquise sur
la douleur.
En un sens, cette beauté idéale est hors du temps et de l'histoire, symbole de l'éternité.
Si cet
idéal de beauté est désormais révolu, alors qu'il culminait dans l'art grec, c'est que l'organisation sociale et la
production économique sont devenues prévalentes, soudant les individus dans des rapports de besoin,
d'échange et de travail complexes et étroits.
L'Idéal ne peut plus s'incarner dans l'art, il s'est incarné dans
l'État et la politique à la fin du xixe siècle et au cours du xxe siècle.
On peut toutefois remarquer qu'à notre.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- « Par intuition, j'entends non pas la confiance flottante que donnent les sens, ni le jugement trompeur de l'imagination aux constructions mauvaises, mais le concept que l'intelligence pure et attentive forme avec tant de facilité et de distinction qu'il
- L'opposition de la matière et de l'esprit est-elle une évidence du sens commun ?
- Les sens sans la raison son vides, mais la raison sans les sens est aveugle (Kant)
- philosophie dissertation sur l'art ("peut on reprocher à une œuvre d'art de ne pas avoir de sens?)
- Y’a-t-il un sens à dire que l’inconscient s’exprime ?