L'oeuvre d'art n'est-elle que produit de luxe ou moyen d'évasion?
Extrait du document
«
L'art peut à la base aussi bien désigner la technique, le savoir-faire mais aussi les beaux-arts.
L'oeuvre d'art
appartient bien entendu à la catégorie des beaux-arts.
C'est une création libre de forme, qui dans sa conception
classique doit rechercher la beauté.
Ce qui distingue la technique de l'art, c'est que la première vise la production
efficace de choses utiles pour l'homme, alors que l'art se caractérise par son inutilité.
Dès lors, l'art est un objet qui
intervient lorsque les besoins sont assouvis.
Pourtant, l'art n'est-il pas le domaine privilégié de l'imagination? N'est-il
pas la marque d'un besoin de fuir le réel? En définitive, l'art ne peut-il pas être un moyen d'évasion justement parce
qu'il n'est pas inscrit dans une logique utilitaire?
L'oeuvre d'art est un objet qui ne répond à aucun besoin et est donc un produit de luxe
- L'art n'a pas pour but de répondre aux besoins élémentaires.
L'oeuvre d'art n'a pas d'intérêt pratique immédiatcontrairement à l'objet technique, dont la finalité "extrinsèque", relative à un but, à une utilisation qui détermine sa
forme.
Or l'oeuvre d'art, selon l'expression consacrée, ne "sert à rien".
Ainsi, selon Kant, l'artiste élabore une oeuvre qui donne l'impression "d'une finalité sans fin".
« La beauté est la forme de la fïnalité d'un objet en tant qu'elle y est
perçue sans la représentation d'une fin ».
Ce qui est beau a l'apparence de la finalité.
Chaque élément semble concourir
à l'effet d'ensemble, qu'il s'agisse d'un paysage, d'un tableau, d'une musique.
Cette finalité ne se ramène pas au critère classique de la perfection puisque
celle-ci suppose Inadéquation de ce qui est à l'idée ou concept.
Or, nous
venons de le voir, le jugement de goût est toujours particulier et ne procède
pas par concepts.
Cette finalité est sans fin.
On ne peut lui assigner une
fonction.
La forme finale de l'objet a l'apparence de la gratuité.
Les êtres
vivants ont aussi la forme de la finalité mais cette finalité n'est pas sans fin
puisque les parties concourent à une fin, la survie.
Cette troisième définition
montre que Kant ne définit pas la beauté à partir de la seule qualité de
l'émotion.
La beauté n'est pas que dans le sujet.
Tout n'est pas beau, tout
n'est pas susceptible de produire le plaisir esthétique, cela ne dépend pas de
la seule disposition intérieure.
D'où vient le plaisir?
·
d'un objet dont la forme finale peut paraître gratuite, ce qui nous
prédispose au désintéressement.
Ainsi une machine à café dont toutes les
parties sans exception sont subordonnées à sa fonction de faire le café ne
peut être jugée belle et notre rapport à elle ne sera qu'utilitaire.
Par contre la
nature est telle que nous pouvons soit la contempler soit l'utiliser.
·
d'un objet qui a une forme finale.
Pourquoi la juxtaposition d'éléments ne
se prête-t-elle pas au plaisir esthétique? Parce qu'il est impossible de lui assigner un sens.
Kant ne veut absolument
pas dire que la belle nature ou œuvre d'art ont un sens.
Elles n'ont pas un sens mais elles sont belles dans la mesure
où il est possible de leur donner du sens c'est à dire un sens qui ne s'épuisera jamais, qui suscitera toujours de
nouvelles interprétations (cf.
votre pratique de l'analyse littéraire: le texte n'est pas l'objet d'une connaissance mais
d'une interprétation qui peut indéfiniment s'enrichir).
Un plaisir esthétique a sa source « dans le libre jeu de
l'imagination et de l'entendement ».
Libre jeu car l'imagination n'est pas subordonnée à l'entendement comme dans la
connaissance où elle doit se plier à ses règles : si elle ne s'y plie pas elle divague, elle rêve, elle entrave la
connaissance.
Face au beau qui n'est pas l'objet d'un jugement de connaissance (en langage kantien déterminant )
l'accord entre l'imagination et l'entendement ne suit aucune règle.
Par exemple lorsque nous écoutons une œuvre
musicale, nous associons aux sons des images, ces images s'organisent et prennent un sens mais d'autres
associations seraient possibles, un autre sens pourrait jaillir et c'est pour cette raison que le désir d'écouter l'œuvre
ne s'épuise pas.
Le plaisir naît de ce libre accord et finalement pour Kant de l'expérience intérieure de la liberté de
nos facultés.
Ce qui plaît est la liberté.
L'expérience esthétique est une expérience de la liberté comme absence de
contraintes, intellectuelles (règles de l'accord des facultés en vue d'une connaissance), morales (le beau n'est pas
le bien), sensibles (le beau n'est pas l'agréable),utilitaires (le beau n'est pas l'utile).
- Rousseau condamne sciences, arts, luxe et progrès qui ont corrompu l'homme.
"La vanité et l'oisiveté qui ont
engendré nos sciences ont aussi engendré le luxe.
Le goût du luxe accompagne toujours celui des Lettres, et le
goût des Lettres accompagne souvent celui du luxe : toutes ces choses se tiennent assez fidèle compagnie, parce
qu'elles sont l'ouvrage des mêmes vices.
"
- Enfin, l'art fait l'objet d'un marché commercial et est souvent l'attribut des riches et l'ostentation des puissants.
Pourtant l'art n'a-t-il pas pu aider des hommes dans la misère? N'a-t-il pas une fonction libératrice?
L'oeuvre d'art répond à un besoin d'évasion
L'art a souvent été considéré comme le domaine de l'imagination, or l'imagination manifeste une insatisfaction du
présent et une recherche d'évasion hors du réel.
Sartre affirmait que l'imagination était ce qui permet de se défaire,.
»
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