Locke: Être libre consiste-t-il à s'affranchir des déterminismes ?
Extrait du document
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Si notre idée de la liberté signifie « faire ce que l'on veut », il n'est pas possible d'être complètement libre dans le sens
d'une liberté parfaite et totale.
En effet, il existe bon nombre de facteurs limitatifs, qui sont autant de déterminismes
nous empêchant de faire ce que nous voulons.
De surcroît, nos choix personnels sont motivés par divers critères qui peuvent s'opposer entre eux, par exemple le
plaisir et la raison.
La liberté de choix s'exprime peut-être avant tout par le fait de décider par soi-même, en dépit des
déterminismes et des circonstances.
Si notre culture et notre éducation nous conditionnent et restreignent notre liberté, en même temps elles nous forment
l'esprit en nous dispensant la connaissance et l'apprentissage de la rationalité.
Elles apparaissent donc à la fois comme
un obstacle et une condition de la liberté, ce qui constitue une problématique.
ocke: [...] Un homme venant à tomber dans l'eau, parce qu'un pont sur lequel il marchait s'est rompu sous lui,
n'a point de liberté, et n'est pas un agent libre à cet égard.
Car quoiqu'il (...) préfère ne pas tomber à nouveau,
cependant comme il n'est pas en sa puissance d'empêcher ce mouvement, la cessation de ce mouvement ne suit pas
sa volition ; c'est pourquoi il n'est point libre dans ce cas-là.
Il en est de même d'un homme qui se frappe lui-même, ou
qui frappe son ami, par un mouvement convulsif de son bras, qu'il n'est pas en son pouvoir d'empêcher ou d'arrêter par
la direction de son esprit ; personne se s'avise de penser qu'un tel homme soit libre à cet égard, mais on le plaint
comme agissant par nécessité et par contrainte.
Autre exemple.
Supposons qu'on porte un homme, pendant qu'il est dans un profond sommeil, dans une chambre où il y
ait une personne qu'il lui tarde de voir (...) et que l'on ferme à clef la porte sur lui, de sorte qu'il ne soit pas en son
pouvoir de sortir.
Cet homme s'éveille et est charmé de se trouver avec une personne dont il souhaitait si fort la
compagnie, et avec qui il demeure avec plaisir, aimant mieux être là avec elle dans cette chambre que d'en sortir pour
aller ailleurs : je demande s'il ne reste pas volontairement dans ce lieu-là ? Je ne pense pas que personne s'avise d'en
douter.
Cependant, comme cet homme est enfermé à clef, il est évident qu'il n'est pas en liberté de ne pas demeurer
dans cette chambre et d'en sortir s'il veut.
Et par conséquent, la liberté n'est pas une idée qui appartienne (..) à la
préférence que notre esprit donne à une action plutôt qu'à une autre, mais à la personne qui a la puissance d'agir ou
de s'empêcher d'agir selon que son esprit se déterminera à l'un ou à l'autre de ces deux partis.
Avez-vous compris l'essentiel ?
1 Quelle idée le premier exemple illustre-t-il ?
2 En quoi le second exemple, l'homme qui frappe, est-il à la fois différent et proche du premier?
3 Faire ce qui nous plaît, est-ce s'affranchir du déterminisme ?
Réponses:
1 - L'idée d'une action qui n'est pas libre, parce qu'elle résulte de la force d'une puissance matérielle, physique,
extérieure à nous, c'est-à-dire d'un déterminisme.
2 - Il est différent, car dans une action de ce genre, nous ne subissons pas une contrainte extérieure à nous : c'est
un geste spontané, par exemple une convulsion qui n'est causée par rien d'autre que notre propre corps.
Mais il se
rapproche du premier cas, en ce que la volonté n'intervient pas, que l'esprit n'a pas choisi cet acte, qui n'est donc pas
libre non plus.
3 - Non, car une action que nous accomplissons de notre plein gré et avec plaisir peut être en même temps nécessaire
et déterminée.
En ce sens elle n'est pas libre.
Introduction
Être libre, est-ce seulement faire ce que l’on veut ? En effet, si l’état dans lequel on se trouve coïncide avec
l’état dans lequel on voudrait être, cela suffit-il pour dire que nous sommes libres et que c'est par l’effet de notre
liberté que nous nous retrouvons dans cet état ? Locke, dans le livre II du tome 2 De l’entendement humain répond à
cette question en essayant de montrer à travers trois exemples que l'homme n'est pas libre par rapport a l'acte de
vouloir s'il n'a pas suspendu ses désirs avant que la volition de leur obéir apparaisse : tant que j’exécute directement
mes désirs, sans les mettre en suspendre, je ne suis pas en mesure de savoir si je peux faire ce que je désire parce
que je suis libre ou parce que l’action que j’ai choisi d’exécuter était le seule option qui s’offrait à moi.
Locke parvient à
construire sa thèse en s’appuyant sur trois exemples dont nous allons expliquer la portée.
Le troisième exemple – le
plus important – lui permet de conclure le texte en formulant sa thèse.
I.
Trois exemples gradués pour distinguer liberté et nécessité
La première partie du texte est composée de trois exemples, ou plutôt de trois contre-exemples de la liberté.
Le
premier, celui de l’homme qui tombe à l’eau illustre la nécessité extérieure à l’agent : si le pont s’écroule, l’homme
tombe, peu importe qu’il veuille ou non tomber.
La notion de « puissance » est ici essentielle et délimite le champ de la.
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