L'intelligence animale et les ignorances humaines ?
Extrait du document
«
Termes du sujet:
ANIMAL (n.
m.) 1.
— Être vivant capable de se mouvoir : l'homme est un animal).
2.
— (Auj.) SYN.
bête.
3.
—
Théorie de l'animal-machine : théorie réduisant l'être animé à un mécanisme matériel ; pour DESCARTES, le corps
humain, comme celui des bêtes, est une machine, mais l'homme possède en outre une âme au sens 5.
Pour LA
METTRIE, tous les animaux ne sont que des machines.
4.
—Animisme : toute doctrine ou religion qui attribue aux
choses une âme au sens 1.
Les hommes naissent doués de facultés de connaissance, mais dépourvus de toute connaissance, en état
d'ignorance complète.
Or, pour vivre, il est d'abord nécessaire de savoir; c'est pourquoi l'homme reste longuement et
fortement dépendant de ses parents et d'autrui.
Les animaux, au contraire, naissent pourvus des connaissances
suffisantes à leur existence: c'est ce que l'on nomme instinct ou intelligence animale.
▪ L'INSTINCT OU INTELLIGENCE ANIMALE
En zoologie, l'instinct ou intelligence animale se définit comme une tendance innée à des actes ou productions
complexes (confection du miel, toile des araignées, migration des oiseaux, etc.) exécutés parfaitement, sans
expérience préalable, mais subordonnés à des conditions de milieu.
L'intelligence animale est limitée, mais l'erreur est
propre à l'homme.
▪ LES SAVOIRS DE LA VIE QUOTIDIENNE
Sans savoirs, nous ne saurions vivre.
Ces savoirs nous sont presque entièrement transmis par les autres (car il est
assez rare que l'on invente, et l'on invente peu).
L'enseignement est pour nous vital.
Nous parvenons ainsi à vaincre
quelques ignorances et à acquérir une modeste autonomie.
Ces quelques savoirs acquis sont bien peu de chose en
regard de la masse immense de nos ignorances invincibles.
▪ DES SAVOIRS TRÈS LIMITÉS
En raison du domaine gigantesque des savoirs, nous sommes condamnés aux connaissances faciles, et, au mieux, à
une spécialité.
Aucun mathématicien, par exemple, ne peut tout savoir des mathématiques, et il méconnaît les
autres disciplines, dépendant des vulgarisateurs, que l'on aurait donc tort de mépriser.
Les hommes, bien que les connaissances augmentent (quoiqu'elles puissent se perdre ou s'oublier ici et là), restent
dans l'ignorance des origines et de la finalité de l'univers.
Peut-on prétendre connaître telles et telles parties en ignorant le tout?
Nos savoirs sont donc provisionnels ou provisoires, accidentels et non essentiels.
La nature des choses, et d'abord
celle de la matière, nous échappe.
Les ignorances invincibles
Il y a donc des ignorances aisément surmontables dans l'ordre de la vie quotidienne personnelle, et des ignorances
qui sont vaincues collectivement, par la collaboration des hommes, comme cela se voit dans les différents domaines
du savoir.
Mais il existe aussi des ignorances générales invincibles, qui se ramifient en milliers d'énigmes, dans une
sphère qui nous touche essentiellement: celle du sens de notre existence.
Malgré l'accumulation d'informations héritées (où le tri entre le vrai et le faux doit être constamment recommencé),
l'appareil énorme des multiples sciences (hélas encore encombrées de croyances infondées, et parcourues contre
leurs progrès de mouvements de régression) laisse sans réponse les questions les plus décisives.
Si l'astrophysique
décrit patiemment et avec génie les hypothèses concernant la formation de l'univers, apportant ici et là des
vérifications expérimentales partielles, elle reste cependant dans l'incapacité totale de dire avec assurance pourquoi
l'univers s'est formé, et pourquoi ainsi plutôt qu'autrement: les sciences sont contraintes de s'en tenir à la question
du comment?, abandonnant celle du pourquoi? aux spéculations libres et invérifiables.
L'essentiel nous reste
malheureusement obscur.
Clément d'Alexandrie (150-210), présupposant les dogmes principaux du christianisme, pose ces questions : « Qui
étions-nous ? Que sommes-nous devenus? Où étions-nous? Où avons-nous été jetés? Où allons-nous ? D'où nous
vient la libération ? »
Ces questions perpétuelles changent de formulation avec les croyances de leurs formulateurs.
Leibniz pose cette unique demande : « Pourquoi existe-t-il quelque chose plutôt que rien ? »
Kant retrouve un point de vue humaniste: « Que puis-je savoir? Que dois-je faire ? Que suis-je en droit d'espérer ?
Qu'est-ce que l'homme? »
Au XIXe siècle, Paul Gauguin intitule un de ses tableaux : « D'où venons-nous?
Où sommes-nous ? Où allons-nous ? Dans Le Principe espérance, Ernst Bloch, philosophe contemporain, ouvre son
livre par ces cinq demandes : « Qui sommes-nous ? D'où venons-nous? Où allons-nous ? Qu'attendons-nous ?
Qu'est-ce qui nous attend? »
Comme le pense Hamlet, l'homme vit dans un monde saturé d'énigmes..
»
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