l'inconscient met il en question l'autonomie du sujet ?
Extrait du document
«
Il existe deux aspects de l'inconscient.
D'une part, pris comme adjectif désigne ce qui est non conscient( l'objet,
celui qui a perdu conscience ou tout souvenir, pensée qui n'est pas dans la conscience).
D'autre part, il peut être
utilisé comme substantif et il devient avec Freud un concept : celui d'un lieu psychique séparé de la conscience et
ayant ses propres lois de fonctionnement.
De plus, l'inconscient psychique a des effets sur la conscience et semble
bien dicter le comportement des individus.
L'autonomie vient étymologiquement de auto( soi-même) et nomos( loi),
c'est-à-dire se donner soi-même ses propres lois.
Or si l'inconscient dirige nos pensées et nos actes, nous ne
sommes pas à l'initiative de nos propres lois.
Mais cela veut-il dire que le sujet perd toute maîtrise de soi, devient
irresponsable ? L'hypothèse de l'inconscient ne permet-elle pas plutôt de rendre son autonomie au sujet ?
« Le moi n'est pas maître dans sa propre maison »( Freud,
Introduction à la psychanalyse)
Freud définit donc dans sa première topique vers 1906 trois instances
psychiques dont l'inconscient, séparé des deux autres par le refoulement et la
censure.
Mais cet inconscient a un rôle à jouer, même un très grand rôle.
Il
devient l'essence même du psychisme humain.
« Il faut voir dans l'inconscient le fond de toute vie psychique.
L'inconscient
est pareil à un grand cercle qui enfermerait le conscient comme un cercle plus
petit.
» Freud( L'interprétation des rêves)
De même, Lacan affirme que « l'expérience psychanalytique n'est pas autre
chose que d'établir que l'inconscient ne laisse aucune action hors de son
champ ».
(L'instance de la lettre)
Dès lors, c'est bien l'inconscient qui gouverne le sujet et détruit ainsi la
prétendue autonomie du sujet.
Freud va être amené à concevoir que bon nombre de maladies, mais aussi
d'actes quotidiens s'expliquent si l'on admet l'hypothèse de l'inconscient.
Il y
aurait en nous u « réservoir » de forces et de désirs (ou pulsions) dont nous
n'aurions pas conscience, mais qui agiraient sur nous..
Pour le dire
brutalement, en ce sens, l'homme n'agirait pas (ne choisirait pas ses actes e
toute connaissance de cause, dans la clarté), mais serait agi (c'est-à-dire subirait, malgré lui, des forces le
contraignant à agir) : il ne serait pas « maître dans sa propre maison », il ne serait pas maître de lui.
Empruntons à Freud un exemple simple.
Un président de séance, à l'ouverture dit « Je déclare la séance fermée »
au lieu de dire « Je déclare la séance ouverte ».
Personne ne peut se méprendre sur ses sentiments ; il préférerait
ne pas être là.
Mais ce désir (ne pas assister au colloque) ne peut s'exprimer directement, car il heurterait la
politesse, les obligations sociales, professionnelles, morales du sujet.
Notre président subit donc deux forces
contraires : l'une parfaitement en accord avec les obligations conscientes, l'autre qui ne l'est pas et qui ne peut
s'exprimer directement, ouvertement.
Il y a donc conflit, au sein du même homme, entre un désir conscient,
conforme aux normes morales et un autre désir plus « gênant ».
Or, dans notre exemple, ce second désir, malgré la
volonté de politesse du président, parvient à s'exprimer, mais de façon détournée, anodine : on dira que « sa langue
a fourché ».
Ici, l'exemple est simple dans la mesure où le président a sans doute parfaitement conscience qu'il ne veut pas être
là.
Mais dans bon nombre de cas, quand ma langue fourche, je ne sais pas pourquoi, c'est-à-dire que j'ignore moimême ce qui me pousse à dire tel mot plutôt qu'un autre.
Or pour Freud le cas est exactement identique et
s'interprète de même, comme le conflit entre deux désirs dont l'un est gênant et peut être ignoré par le sujet.
Il n'y
a pas d'actes innocents ou anodins.
Tous sont révélateurs d'un affrontement en moi de deux forces.
L'hypothèse Freudienne de l'inconscient revient à dire que bon nombre d'actes « normaux » (oubli, actes manqués,
rêves), mais aussi « maladifs », pathologiques (névroses, psychoses, obsessions) s'expliquent en gros selon le même
schéma.
L'individu subirait un conflit psychique (dans son âme), conflit parfois extrêmement violent entre les normes
conscientes (morales, esthétiques, sociales) et des désirs qui bousculent et négligent ces règles.
Ce second groupe
de désirs, le sujet les trouverait, s'il en avait conscience, tellement monstrueux, qu'ils ne peuvent parvenir à la
conscience que sous une forme voilée, déformée, indirecte : le lapsus, le rêve, ou le symptôme maladif.
Le symptôme est donc un compromis entre le désir inconscient et inavouable que je subis, et les normes
conscientes et morales que j'accepte.
« Le moi n'est pas maître dans sa propre maison » signifie que je n'ai pas
conscience et que je ne maîtrise pas, ne contrôle pas une bonne part de ce qui se passe en moi-même, ce conflit,
ce symptôme.
L'hypothèse de l'inconscient est donc qu'une bonne partie de ce qui se passe en moi (dans mon âme, ma psyché) ne
m'est pas connu, m'échappe, et cependant influe sur moi.
C'est ainsi qu'il faut comprendre notre passage : la
psychanalyse se propose de « montrer au moi qu'il n'est seulement pas maître dans sa propre maison, qu'il en est
réduit à se contenter de renseignements vagues et fragmentaires sur ce qui se passe, en dehors de sa conscience,
dans sa vie psychique ».
La plupart des choses qui se passent dans l'âme échappent à la conscience.
Pour Freud, o a surestimé le rôle de la conscience dans la vie de l'âme, et ainsi on s'est privé des moyens :
¨
De comprendre bon nombre de phénomènes comme les lapsus et les rêves ;
¨
De soigner un certain nombre de maladies, qui ne peuvent s'expliquer que par le conflit psychique qui agite le
patient.
Adopter l'hypothèse de l'inconscient permet de comprendre et de guérir, c'est un gain de sens et de pouvoir.
Le but
de la psychanalyse est alors de faire en sorte que l'individu, au lieu de subir les forces qu'il ignore et ne contrôle pas.
»
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