l'inconscience est-elle souhaitable ?
Extrait du document
«
Le poids de la conscience, le poids de l'inconscient
La conscience permet-elle d'être heureux ? Le bonheur ne suppose-t-il au contraire pas une certaine inconscience ?
En effet, l'oubli ne concourt-il pas au bonheur, en refoulant dans l'inconscient ce qui pèse sur notre conscience ?
L'inconscient serait en ce sens ce qui sauve le sujet du poids accablant de sa propre conscience.
Mais, ainsi alourdi,
l'inconscient ne finira-t-il pas par peser d'un poids encore plus lourd sur le sujet ?
L'oubli, gardien de la conscience ?
Dans La Généalogie de la morale, Nietzsche a montré que l'oubli n'est pas une faculté passive qui résulte de l'inertie
du psychisme, de ses fatigues ou de sa faiblesse.
L'oubli est un pouvoir actif d'enrayement.
Il correspond à la phase
de "digestion psychique" des événements, comparable à celle de la digestion organique des aliments auxquels nous
ne pensons plus une fois absorbés.
L'oubli est l'effet d'une assimilation.
C'est un temps mort durant lequel se fait
table rase ou place nette pour les choses nouvelles et plus nobles : "La faculté active d'oubli est une sorte de
gardienne, de surveillante chargée de maintenir l'ordre psychique, la tranquillité, l'étiquette." Des sentiments comme
le bonheur, la sérénité, l'espérance, la fierté ou la jouissance de l'instant présent ne pourraient exister sans la
faculté d'oubli.
Freud de son côté a souligné le caractère vital de l'oubli des événements pénibles et désagréables.
C'est spontanément que l'inconscient oppose une résistance aux souvenirs d'impressions ou à la représentation
d'idées pénibles.
Pour l'inconscient, l'oubli est un instinct de défense comparable au réflexe de fuite face au danger.
S'il est souvent difficile d'effacer de sa mémoire des sentiments de remords et de culpabilité, s'il est vrai que l'oubli
n'est jamais volontaire, il faut supposer une "économie" dans l'organisation du psychisme humain, où l'oubli de
certains événements sert l'intégrité de l'ensemble.
Parfois tenu en échec par des instances plus puissantes qui
cherchent à réaliser leurs buts, l'oubli s'opère par un déplacement d'objet.
Si l'événement douloureux n'est pas
oublié, l'oubli sera transféré sur les circonstances ou des objets qui y sont liés, montrant qu'il réalise par là un
véritable "travail".
NIETZSCHE : la nécessité de l'oubli
Si l'animal jouit d'un bonheur que l'homme jalouse, c'est parce qu'il n'a pas de
mémoire supérieure.
Seul l'homme dit « je me souviens » et pour cela il lui est
impossible de vivre heureux et pleinement.
En effet :
1) C'est par la mémoire, conscience du passé, que l'homme acquiert la
conscience du temps et donc celle de la fugitivité et de l'inconsistance de
toutes choses, y compris de son être propre.
Il sait que ce qui a été n'est
plus, et que ce qui est est destiné à avoir été, à n'être plus.
Cette présence
du passé l'empêche de goûter l'instant pur, et par conséquent le vrai
bonheur.
2) Le passé apparaît à l'homme comme l'irréversible et l'irrémédiable.
Il marque
la limite de sa volonté de puissance.
L'instant présent, ouvert sur l'avenir, est
le lieu du possible où peut s'exercer sa volonté de puissance.
Le passé, au
contraire, change et fige la contingence du présent en la nécessité du « cela
a été ».
Dès lors la volonté ne peut que se briser sur cette pétrification du
passé qui se donne comme le contre-vouloir de cette volonté.
C'est pourquoi
« l'homme s'arc-boute contre le poids de plus en plus lourd du passé qui
l'écrase ou le dévie, qui alourdit sa démarche comme un invisible fardeau de
ténèbres ».
3) Sans l'oubli l'homme ne peut pleinement vouloir ni agir : il est un être malade, il est l'homme du ressentiment.
La «
santé » psychique dépend de la faculté de l'oubli, faculté active et positive dont le rôle est d'empêcher
l'envahissement de la conscience par les traces mnésiques (les souvenirs).
Car alors l'homme réagit à ces traces et
cette réaction entrave l'action.
Par elles l'homme re-sent, et tant qu'elles sont présentes à la conscience, l'homme
n'en finit pas de ressentir, « il n'en finit avec rien ».
Englué dans sa mémoire, l'homme s'en prend à l'objet de ces
traces dont il subit l'effet avec un retard infini et veut en tirer vengeance': « On n'arrive à se débarrasser de rien,
on n'arrive à rien rejeter.
Tout blesse.
Les hommes et les choses s'approchent indiscrètement de trop près, tous les
événements laissent des traces; le souvenir est une plaie purulente.
»
Problématique
Le bonheur réside-t-il dans la conscience perpétuelle de toutes nos expériences vécues ? Ou suppose-t-il au
contraire une certaine inconscience, permise par l'oubli ? L'oubli est-il alors une faiblesse ou une force ?
La pathologie d'une mémoire totale
L'oubli est une vertu et une force, car il a une fonction vitale.
Nécessité de l'oubli pour agir..
»
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