Liberté et égalité sont-elles opposées ou complémentaires ?
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Sans entrer dans des considérations partisanes, on peut constater que les inégalités, loin de se résorber, vont croissantes dans notre
société, alors qu'on s e m b l e se diriger vers toujours plus d e libéralisme.
Certains diront q u e c'est le libéralisme lui-même avec ses
déréglementations, ses privatisations, qui est la cause unique et directe des inégalités sociales.
Au fond de ce débat politique, on peut
apercevoir une question bien plus fondamentale, celle des relations entre liberté et égalité.
Laquelle doit primer sur l'autre ? Peuvent-elles
coexister ? Ce débat, qui porte sur des valeurs, est absolument nécessaire quand on veut com prendre le libéralisme, l'épisode historique
du communisme, les clivages politiques entre gauche et droite… C'est pourquoi il semble pertinent de se poser philosophiquement (et non
politiquem ent) la question de savoir si liberté et égalité sont opposées ou com plémentaires.
Les réponses diffèrent selon que l'on se place dans un contexte théorique ou pratique, selon les définitions que l'on donne à la liberté et
à l'égalité….
Il s'agira donc d e voir si elles sont o p p o s é e s ou complémentaires en envisageant ces différentes perspectives et
conséquences.
I.
Liberté et égalité sont opposées.
Si on se penche sur les fondements théoriques du libéralisme, on remarque un primat accordé à l'idée de liberté sur celui d'égalité.
L'Etat
doit institutionnaliser la liberté humaine, la garantir.
La question n'est pas celle de l'égalité dans le sens où il est bénéfique de mettre les
individus en concurrence.
Kant, dans l'Idée d'une histoire universelle du point de vue cosmopolitique, explique que les hommes doivent être
libres d'entreprendre, de faire des choix, de s'exprimer, de s'associer… afin d'être en compétition les uns
avec les autres, et c'est grâce à cette situation d'émulation que la nature humaine pourra progresser.
Certes il ne récuse pas a priori l'idée d'égalité en disant que cette valeur ne doit pas être un idéal social,
mais le p e u s e place qu'elle occupe dans son propos nous l'indique implicitement.
En effet, le rôle de
l'Etat doit être de garantir les conditions de la libre concurrence, qui on le sait, va permettre à certains de
s'enrichir au détriment des autres.
Sur le plan pratique, cette opposition est encore plus évidente, par exemple sur le marché : plus l'Etat
déréglemente, plus les monopoles s'installent et détruisent les petits firmes.
Dans cette perspective, on voit bien que liberté et égalité sont opposées dans le sens où la liberté, qui a
ici un sens de liberté encadrée par le droit, ne peut être compatible avec une garantie de l'Etat quant à
l'égalité entre les individus.
II.
Liberté et égalité sont complémentaires.
Cependant, dans la déclaration des droits de l'Homme et du citoyen, le premier article est le suivant :
« les hommes naissent libres et égaux en droit ».
Sur le plan théorique (indiqué par l'expression « en
droit »), liberté et égalité ne sont donc pas opposées mais complémentaires.
Ici, elles sont intrinsèques
à la nature humaine et il s'agit pour un Etat non pas de permettre leur réalisation mais de les respecter.
Les individus sont fondamentalement libres dans le sens où ils s'appartiennent à e u x - m ê m e s et
fondamentalement égaux quant à leur dignité : aucun h o m m e ne vaut en droit plus qu'un autre.
Implicitem ent, on peut voir qu'il est impossible de séparer ces deux valeurs.
En effet, que serait cette liberté originaire si elle n'était pas
partagée par tous ? L'égalité est donc ce qui vient permettre à TOUS les hommes d'être libres, et donc légitimer le fait de parler de liberté
et non de privilège.
Sur le plan pratique, on peut aussi penser que liberté et égalité de fait sont complémentaires.
La liberté de tous n'est possible que si
chacun est respecté dans sa dignité d'être humain.
En effet, peut-on être libre si l'on a pas de quoi manger? La liberté, pour être réalisée
dans un individu, nécessite des conditions m atérielles que seul un principe d'égalité peut garantir.
Que ce soit sur le plan pratique ou théorique, on voit bien que liberté et égalité dans le sens où la seconde est la condition nécessaire de
la seconde.
III.
Egalité et liberté : deux valeurs en relation dynamique.
Si l'on s'en tient à une question purement théorique, il semble impossible de trancher entre complémentarité et opposition entre égalité
et liberté.
La question pratique mérite de poser vraiment le problème dans le sens où elle pose la question de la compatibilité de fait de
c e s d e u x v a l e u r s .
C o m m e n o u s n e s o m m e s p r ê t s à sacrifier ni notre liberté, ni l'égalité, il semble donc désormais nécessaire de poser
autrement la question : comment garantir et réaliser les d e u x en pratique ? Qu'elles soient opposées ou complémentaires, il faut
repenser leurs relations avec pour fil conducteur l'idée de les rendre efficaces toutes deux.
Il s'agit donc de dépasser l'antagonisme sur
lequel nous sommes arrivés dégager une nouvelle idée des relations entre liberté et égalité.
Un e x e m p l e flagrant d e cette dynamique entre égalité et liberté se trouve dans le slogan, d e notre République : Liberté, Egalité,
Fraternité.
On pourrait penser que liberté et égalité auraient pu suffire, or ce n'est p a s l e cas.
Cette devise part donc du principe que
liberté et égalité sont a priori en opposition.
Même si elles devraient être complémentaires, la réalité est bien plus dure, c'est soit l'une
soit l'autre : soit la dictature communiste, soit l'ultralibéralisme et ses dégâts, soit l'égalité absolue et la négation de toute forme de
liberté, soit une liberté très importante et des inégalités insoutenables.
La fraternité est donc ce « pont » qui permet l'articulation et la
réalisation de l'égalité et de la liberté.
Le fait de se reconnaître les uns les autres comme « frères », c'est-à-dire comme appartenant à la
même entité, n'est pas en contradiction avec nos libertés individuelles (culte, expression, opinion, propriété privée…) car le frère n'est pas
celui qui nous est exactement identique.
Mais cette fraternité permet de garantir l'égalité, d'accepter que les autres aient droit à ce qui est
nécessaire à TOUS (éducation gratuite, santé…).
La fraternité permet aux hommes de ne pas penser que liberté et égalité s'excluent l'une
l'autre, et ainsi de tendre vers une société juste (=où les individus sont libres et égaux EN FAIT).
Conclusion
Liberté et égalité peuvent être pensées comme opposées mais cette perspective est difficile à accepter : nous voulons les
deux !
Elles peuvent être pensées comme complém entaires, mais c'est un peu trop optimiste et en contradiction avec les faits.
Liberté et égalité ne sont donc complémentaires et compatibles que sous certaines conditions : certes elles s'excluent l'une
l'autre, mais une tierce valeur (la fraternité) permet de les faire enter en relation dynamique et ainsi se nourrir l'une l'autre.
Ce
n'est d'ailleurs que fonctionnant ensemble que leur statut de « valeur », avec toute la noblesse qu'il implique, n'est légitime.
>>> Seconde correction: http://www.devoir-de-philosophie.com/passup-corriges-4609.html.
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