L'homme est-il un loup pour l'homme ?
Extrait du document
«
Analyse du sujet :
q Le sujet nous invite à questionner la citation de Plaute « l'homme est un loup pour l'homme », célèbre dans sa
reprise par Hobbes.
q Cette citation donne à voir une humanité profondément divisée en individus qui, les uns à l'égard des autres,
sont dans des relations conflictuelles.
q Elle remet donc en cause l'idée d'une sociabilité naturelle qui régulerait les rapports humains et engage, de ce
fait, une conception étatique qui bride les passions asociales de l'homme.
q Si « l'homme est un loup pour l'homme », cela signifie également que l'Etat est nécessaire pour la paix.
C'est
aussi prétendre que la guerre est naturelle, que les éventuels sentiments pour l'autre ne sont, soit que de
vains mots, soit le processus d'une civilisation.
Problématisation :
Le sujet posé est essentiel car c'est sur la croyance en cette formule que peuvent se légitimer bien des
excès.
La formule est souvent assimilée à un regard cynique, voire lucide, de l'humanité.
Les guerres permanentes
dans l'histoire, les violences, la compétition dans la société contemporaine sont comme autant de théâtres d'une
vérité qui semble de toute éternité : l'homme, sans lois et sans forces pour le contraindre, laisse transparaître sa
nature mauvaise, sa véritable nature.
Mais peut-on déduire de cela que l'homme est « un loup pour l'homme » tel
que Hobbes semble l'entendre ? Ne faut-il pas douter aussi de cette découverte, de cette explication facile qui
empêche de considérer ce que l'homme a pu être et ce qu'il peut éventuellement devenir ?
L'accablement de l'histoire.
a)
La guerre est souvent évoquée pour illustrer la méchanceté naturelle des hommes.
Elle est ce qui
dévoile ce que l'homme parviendrait à cacher dans les rapports sociaux habituels.
Les pulsions
« primitives » violentes sont selon Freud refoulées dans la civilisation.
Elles constituent la nature de
l'homme sans les interdits.
Bien sûr, de telles pulsions ne peuvent seulement être ignorées, elles
doivent pouvoir s'exprimer.
b)
La nature fondamentalement mauvaise de l'homme correspond aussi à une conception classique de
l'Eglise de la nature humaine.
L'homme est fondamentalement un pécheur, il est soumis à des passions
violentes que l'institution ecclésiastique a pour charge de réprimer.
c)
L'histoire semble aller dans le sens de la formule, et contre l'idée classique en philosophie d'une
bonté naturelle.
Contre cette « utopie » philosophique qui prend corps dans le premier mouvement
humaniste du XVIème siècle, Machiavel oppose dans le Prince l'homme tel qu'il est, mû par le désir
d'acquisition.
L'homme que dépeint Machiavel est profondément calculateur.
C'est une société
d'hypocrisie où les motivations secrètes sont masquées sous des gestes de courtoisie.
d)
De même Hobbes souhaite contre la tradition aristotélicienne prendre l'homme tel qu'il est.
Dans le
Léviathan, il commence par le volet anthropologique.
L'homme y
est présenté comme un être de désir qui est contraint au
rapport conflictuel à l'égard de ses semblables.
L'état de nature
y est décrit comme un « état de guerre de chacun contre
chacun ».
Mais cette nature humaine est fondée sur
l'introspection, Hobbes entend lire dans l'humanité en
commençant par lire en soi-même.
Il n'est pas douteux que son
analyse soit fine et corresponde sans doute à quelques traits
de ses contemporains.
Si l'homme est essentiellement mauvais que faut-il faire ?
Quelle solution politique est envisageable eu égard à cette soidisant nature humaine ?
La politique qui en découle
Ce sont essentiellement trois solutions politiques qui en
découlent :
a)
Tout d'abord, la solution de Hobbes lui-même.
La crainte est
le moteur par lequel le souverain va pouvoir assurer la paix
civile.
Il semble qu'une conception de la nature humaine comme mauvaise induise ou plutôt légitime
« rétrospectivement », une forme d'Etat répressif, voire une forme de despotisme.
Il faut en
permanence maintenir la sanction pour que les hommes ne donnent pas libre cours à leur nature.
Cela
vaudra à Hobbes d'être qualifié par Montesquieu, et par d'autres après lui, de « faiseur de
despotisme »..
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