L'homme a-t-il par nature le désir de connaître ?
Extrait du document
«
L'affirmation selon laquelle l'homme a le désir de connaître se trouve dans la première page d'un ouvrage d'Aristote :
La métaphysique.
A partir de là, demandez- vous aussi si parfois l'homme ne préfère pas ne pas connaître, rester
dans l'ignorance plutôt que savoir.
Il ne s'agit pas de savoir si l'homme, par nature, connaîtrait "quelque chose" mais s'il en a le désir.
Connaître quoi ? Comment ? Pourquoi ? Autrement dit, si désir il y a, c'est un désir de quoi précisément et d'où peut
venir "ce désir" ?
Peut-on légitimement dire que "l'homme" (en général ?) a "le désir de connaître" (en général ?)
Ne serait-ce pas cette affirmation implicite qui dans sa généralité (abusive ? regroupant sous le même terme des
réalités diverses ?) impliquerait l'idée que c'est "par nature" que "l'homme" a "le désir" de "connaître".
En d'autres
termes dire que "L'homme a le désir de connaître" n'est-ce pas affirmer implicitement qu'il l'a "par nature" ?
[Nul n'a contraint l'homme à ouvrir les chemins
de la connaissance.
Il faut donc qu'il y ait une force qui,
naturellement, le pousse à comprendre, à sans
cesse étendre les limites de son savoir.]
Le désir de connaissance est inné
Dans un passage de la « Métaphysique » (Livre A, chapitre 2),
Aristote explique l'origine de la philosophie et le but qu'elle poursuit.
« Ce qui à l'origine poussa les hommes aux premières recherches
philosophiques, c'était, comme aujourd'hui, l'étonnement .
»
L'admiration et l'incompréhension devant le monde poussent l'homme à
chercher à comprendre et à rendre compte de ce qui l'entoure.
Ainsi
naît la philosophie, qui n'a d'autre but que de tendre à expliquer le
monde.
Dans ce passage de la « Métaphysique », Aristote reprend
l'enseignement de son maître.
En effet, Platon écrit dans le
« Théétète » : « il est tout à fait d'un philosophe, ce sentiment :
s'étonner.
La philosophie n'a point d'autre origine...
»
L'étonnement, pour les Grecs, est donc l'origine véritable de la
recherche philosophique.
L'étonnement consiste en l'arrêt admiratif
devant une chose que l'on ne comprend pas.
Le mot n'est pas à
comprendre au sens moderne cad la stupéfaction devant quelque chose
d'inhabituel.
Le sens commun, la plupart des hommes ne s'étonnent que
devant un phénomène extraordinaire, qui échappe à la routine, et dont il est clair qu'on ne le comprend pas,
qu'on ne peut le classer dans les rubriques habituelles.
Or les phénomènes les plus communs ne sont pas les
plus connus, tant sen faut, et le sentiment de connaître ce que l'on voit souvent n'est qu'une illusion.
L'étonnement qui frappe le philosophe concerne n'importe quelle chose, aussi banale soit-elle en
apparence.
C'est d'abord l'admiration devant la nature, et l'aveu de son incompréhension devant ses
mécanismes.
« Or apercevoir une difficulté et s'étonner, c'est reconnaître sa propre ignorance [...] ainsi donc
ce fut pour échapper à l'ignorance que les premiers philosophes se livrèrent à la philosophie.
»
Les exemples que donne Aristote sont éclairants ; les premières recherches se concentrèrent sur les
objets à notre portée, puis les phases lunaires, puis le cours du Soleil, puis la formation de l'Univers.
Deux
points sont remarquables :
Þ
D'une part, la philosophie n'est pas ici séparée de la science ; les exemples de recherches
philosophiques sont des exemples qu'on qualifierait aujourd'hui d'astronomiques.
En fait la
séparation de la science d'avec la philosophie est très tardive.
Elle date du XVIII ème siècle, et
tous les grands noms de la philosophie furent aussi, jusqu'à cette époque au moins, des grands.
»
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