L’Homme a-t-il naturellement besoin d’autorité ?
Publié le 27/02/2022
Extrait du document
«
L’Homme a-t-il naturellement besoin d’autorité ?
« L’Homme est un loup pour l’Homme, quand on ne le connaît pas », écrivit Plaute dans sa comédie
Asinaria, vers 195 av J.-C.
L’inconnu, l’étranger, évoque irrésistiblement cet état brut auquel nous nous
référons lorsque nous songeons sans trop y réfléchir, à ce que serait l’Homme « naturellement ».
Resurgit alors chez certains, cette angoisse de la mort violente, à cause de l’incertitude de ce que
l’inconnu pourrait bien avoir comme intentions.
Cette citation, on le sait, eut un succès immense, et
fut reprise par ceux des théoriciens qui mettent au cœur de leur propos, une vision pessimiste de la
nature humaine, qu’on la considère sur le plan athropologique comme l’ensemble des dispositions
originelles de l’individu physique et psychique, ou sur le plan politique, comme un état où les rapports
sociaux ne sont pas encore institués juridiquement.
Pour le dire simplement, la nature humaine peut
être dépeinte de manière terrifiante, ou sombre : il peut paraître évident que ce soit elle, l’humaine
nature, qui rende le « besoin » d’obéir aussi impérieux, pour la survie de chacun - surtout des plus
faibles - et du groupe.
Pourtant, l’existence dans l’écrasante majorité des sociétés, de représentants
du pouvoir exerçant une force matérielle elle-même sous-tendue par une importante charge
symbolique, est-elle vraiment rendue nécesssaire par les seules dispositions naturelles de l’Homme –
qu’on les entende au sens politique ou au sens anthropologique ? Ou bien le fait social en lui-même
ne créerait-il pas à force de tendre vers la violence, ce surgissement parfois compulsif du « besoin
d’autorité » ?
D’abord nous verrons que l’Homme peut être vu comme naturellement enclin à rechercher l’autorité,
puis qu’il possède une tendance paradoxale à nier son propre naturel, ce qui rend l’appréciation du
caractère « naturel » du besoin d’autorité particulièrement difficile ; pour autant, on ne quitterait pas
l’ordre de la nature de l’Homme en y voyant une contradiction qui lui est propre et qui relèverait d’un
déterminisme psychique cette fois ; enfin, nous observerons que l’autorité prend tout son sens dans
l’ordre du politique, puisque c’est en étant ainsi instituée qu’elle a une chance de devenir autre chose
qu’un simple état de fait fondé sur la force ; autrement dit, c’est dans le cadre d’un pacte social que
l’autorité peut à la fois répondre aux exigences de la nature humaine, comme à celles de la vie
politique.
Ce faisant, nous envisagerons les deux limites de l’autorité politique : son manque, comme
son excès, apparaissant comme deux ornières où le politique peut s’enliser au détriment des Hommes.
I.
L’Homme est par nature enclin à rechercher l’autorité :
A.
En vertu d’une continuité entre nature et culture
En suivant Aristote, sur l’un de ses partis pris les plus célèbres, il est possible de concevoir que toute
institution sociale n’est que la transposition successive des relations quasi animales qui nous lient les
uns aux autres primitivement.
C’est l’hupothèse de l’animal politique.
« La cité est au nombre des réalités qui existent naturellement, et (…) l’homme est par nature un
animal politique.
Et celui qui est sans cité, naturellement et non par suite des circonstances, est ou un
être dégradé ou au-dessus de l’humanité.
Il est comparable à l’homme traité ignominieusement par.
»
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