L'Homme a-t-il besoin d'un maître ?
Extrait du document
«
Prenez garde, la notion de « maître » n'est pas uniquement politique, elle appartient aussi aux domaines de
l'éducation et de l'art.
Vous devez, bien entendu, montrer la nécessité d'avoir un maître pour apprendre à respecter les lois ou pour
acquérir certaines connaissances.
Songez, par exemple, au rôle capital et exemplaire des « grands maîtres » en art,
ou des « maîtres à penser » comme Socrate, en philosophie.
Vous devez également montrer les obstacles à la liberté qu'engendre le pouvoir d'un maître sur ses esclaves, ses
subordonnés, ses disciples ou ses apprentis.
Toute la difficulté est sans doute de montrer à la fin de votre
dissertation dans quelle mesure le besoin d'un maître peut néanmoins s'accorder avec l'aspiration à la liberté.
Dans ce dessein, inspirez-vous du paradoxe que souligne Kant dans Idée d'une histoire universelle au point de vue
cosmopolitique : le but de l'éducation est de devenir libre; or, toute éducation se fait peu ou prou par la contrainte
d'un maître.
Toute la difficulté est donc d'apprendre, grâce au maître, à nous passer de lui.
[Les hommes sont libres et autonomes.
Ils n'ont pas besoin
de l'autorité d'un maître.
On peut tout à fait apprendre par
soi-même, en autodidacte.
Seuls les êtres faibles et soumis
ont besoin d'un maître pour les guider.]
La nature est le seul maître
Rousseau s'est éduqué en autodidacte.
Simple apprenti graveur à Genève, c'est par ses lectures personnelles,
ses voyages qu'il a formé son esprit.
De là vient sa réticence envers les maîtres qui gâtent l'esprit des enfants
en les détournant de leur pente naturelle.
Les hommes sont nés libres et n'ont pas besoin de maîtres.
La
nature est un guide suffisant.
Les enfants, grands imitateurs, essayent de tout dessiner :
je voudrais que le mien cultivât cet art, non précisément
pour l'art même, mais pour se rendre l'oeil juste et la main
flexible ; et, en général, il importe fort peu qu'il sache tel ou
tel exercice, pourvu qu'il acquière la perspicacité du sens et
la bonne habitude du corps qu'on gagne par cet exercice.
Je
me garderai donc bien de lui donner un maître à dessiner, qui
ne lui donnerait à imiter que des imitations, et ne le ferait
dessiner que sur des dessins : je veux qu'il n'ait d'autre
maître que la nature, ni d'autres modèles que les objets.
Je
veux qu'il ait sous les yeux l'original même et non pas le
papier qui le représente, qu'il crayonne une maison sur une
maison, un arbre sur un arbre, un homme sur un homme,
afin qu'il s'accoutume à bien observer les corps et leurs
apparences, et non pas à prendre des imitations fausses et
conventionnelles pour de véritables imitations.
Je le
détournerai même de rien tracer de mémoire en l'absence
des objets, jusqu'à ce que, par des observations fréquentes,
leurs figures exactes s'impriment bien dans son imagination
; de peur que, substituant à la vérité des choses des figures
bizarres et fantastiques, il ne perde la connaissance des
proportions et le goût des beautés de la nature.
Rousseau
1) a) Pourquoi, selon Rousseau, les enfants doivent-ils cultiver l'art du dessin ?
b) Quelles sont les étapes de son argumentation ?
2) a) Expliquez : "prendre des imitations fausses et conventionnelles pour de véritables imitations".
b) Analysez la distinction entre l'imagination dans laquelle "s'impriment" des "figures exactes" et
l'imagination productrice de "figures bizarres et fantastiques".
I - LES TERMES DU SUJET
Il s'agit ici pour Rousseau de montrer que l'éducation artistique de l'enfant doit se régler sur la nature.
Ainsi, en matière de dessin, c'est par un travail d'observation directe des beautés naturelles que l'élève
pourra progressivement se rendre maître de ce savoir-faire.
II - UNE DÉMARCHE POSSIBLE.
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