L'historien peut-il être objectif ?
Extrait du document
«
Termes du sujet:
OBJECTIF / OBJECTIVITE: Caractère de ce qui existe indépendamment de la conscience.
Caractère de ce qui
est établi sans aucun jugement de valeur.
Dans le domaine de la connaissance, l'objectivité est réalisée quand
l'esprit constitue un objet de pensée pouvant en droit faire l'accord des esprits (universalité).
En ce sens, la notion
est synonyme de rationalité.
Opposée à la subjectivité, elle requiert l'impartialité du sujet connaissant et exige la
mise en oeuvre de procédures d'observation et d'expérimentation garantissant la validité des opérations relevant de
l'investigation scientifique dont l'objectivité ne sera précisément méritée qu'à ce prix.
HISTOIRE: Ce mot désigne soit le devenir, l'évolution des individus et des sociétés (allemand Geschichte), soit
l'étude scientifique de ce devenir (allemand Historie).
Introduction et problématique.
Celui qui s'attache au récit concernant le passé des sociétés humaines et qui construit les faits relatifs à ce devenir
a-t-il le droit et la possibilité d'accéder à l'impartialité ? L'historien peut-il n'être d'aucun temps ni d'aucun pays,
neutre ?
La connaissance historique peut-elle se séparer des hommes qui l'élaborent ? Comment construire les faits
historiques en opérant une mise à distance réelle par rapport à eux ? Finalement, subjectivité et objectivité n'ontelles pas partie liée en histoire ?
Ici, on vous interroge clairement sur la prétention qu'aurait l'historien de pouvoir aborder objectivement l'objet de
son étude, à savoir le passé de l'humanité.
Il faut donc vous demander en quoi ce passé, à la fois, ne se donne
jamais comme tel à l'historien, mais suppose un effort de compréhension, de curiosité et de questionnement.
D'un
côté, vous pouvez remarquer que l'on qualifie l'histoire de science humaine.
En ce sens, elle n'est pas considérée
comme une discipline dans laquelle celui qui la fait ferait preuve de subjectivité.
Généralement, quand on parle de
subjectivité, on entend une implication du sujet telle qu'il influe sur le discours et les propos qu'il énonce.
Quand on
dit d'une personne que son jugement est subjectif, on signifie qu'elle est influencée par ses goûts, ses envies, ses
désirs, ses préférences.
Affirmer que l'historien est subjectif, reviendrait alors en ce sens à affirmer qu'il ne peut en
aucun cas constituer une science.
Pourtant, s'il y a une particularité de l'histoire, c'est au sens où son objet d'étude
n'est plus.
L'historien se retrouve donc bien souvent à devoir interpréter des documents, des traces.
Vous pouvez
par exemple ici distinguer le travail de l'historien de celui du physicien.
Reportez-vous ici à la distinction entre
expliquer et comprendre telle qu'elle est abordée par Dilthey.
Vous trouverez un extrait de ce texte sous la rubrique
« Textes » du site.
Ainsi d'un côté l'historien qui ne serait pas objectif serait celui qui ne fait pas vraiment de
l'histoire, celui dont le discours pourrait s'apparenter à l'idéologie, et d'un autre côté, la question de l'objectivité
semble poser problème en histoire.
Il faut donc vous demander ici si la notion de subjectivité a uniquement le sens
que nous avons commencé par lui accorder.
L'historien n'est jamais complètement insensible à ce passé, car il
l'aborde rétrospectivement.
Pour autant, l'historien recherche à établir la vérité d'un fait.
Il recherche une certaine
objectivité, mais qui ne saurait être celle des sciences de la nature.
De quel type de vérité veut-on alors parler ici
Première partie: l'historien peut être objectif (thèse)
Comment l'historien n'accéderait-il pas à l'objectivité ? Pourquoi en serait-il incapable ? Il le peut légitimement et il
en a la possibilité car il établit une connaissance valide et vraie, et ce selon un type d'approche qui se veut
scientifique.
Peut-il parvenir à une objectivité comparable à celles des sciences de la nature ? Certes pas.
Toutefois, l'historien obéit à des procédures bien déterminées, qui doivent lui permettre d'échapper à la subjectivité,
au moi individuel.
Comment procède-t-il ? En critiquant les documents historiques, en réfléchissant sur la multiplicité
des témoignages, en s'appuyant solidement sur des faits contrôlés.
Nous attendons de l'histoire une certaine
objectivité.
Donc, le bon historien peut n'être d'aucun temps ni d'aucun pays.
La pensée méthodique élabore
soigneusement les faits: elle établit des faits.
Beaucoup de penseurs d'aujourd'hui ne croient plus que l'idéal d'objectivité impassible dont les positivistes avaient
rêvé, que Fénelon lui-même prônait jadis (« Le bon historien n'est d'aucun temps ni d'aucun pays ») soit réalisable.
Dans toute la masse des faits du passé que nous pouvons reconstruire à partir de leurs traces, il nous faut faire un
choix.
Mais comment distinguer le fait historique, le fait important du fait non historique insignifiant ? Seignobos
disait que l'on juge de l'importance d'un fait à ses conséquences mais celles-ci à son tour ne seront-elles pas
appréciées subjectivement par l'historien? On connaît la boutade de Valéry.
La découverte des propriétés
fébrifuges de l'écorce de quinquina au XVII ième serait plus importante que tel traité signé par Louis XIV parce les
conséquences de ce traité sont aujourd'hui effacées tandis que « les régions paludéennes du globe sont de plus en
plus visitées… et que la quinine fut peut-être indispensable à la prospection et à l'occupation de toute la terre qui
est à mes yeux le fait dominant de notre siècle » (« Variété IV »).
Ce qu'il faut retenir de la boutade de Valéry,
c'est qu'il n'y a pas en histoire de signification absolument « objective » d'un fait et que c'est en fonction du
présent que nous donnons à tel ou tel fait passé une signification et une valeur.
Nous autres, hommes du XX ième,
nous sommes surtout attentifs dans le passé aux faits économiques, tandis que par exemple les chroniqueurs du
moyen âge voyaient d'abord les faits religieux (le récit du moindre « miracle » était pour eux essentiel).
Aucun
historien, prétend-on communément aujourd'hui, ne peut échapper à sa subjectivité.
Michelet, pour écrire son
« Histoire de France », voulait oublier l'époque contemporaine, s'interdisait de lire le journal, s'enfermait toute la
journée aux Archives.
Cela ne l'a pas empêché d'écrire une histoire à la fois jacobine et romantique, une « épopée
lyrique » de la France.
Il a projeté dans son œuvre des valeurs sentimentales, des partialités politiques, si bien qu'on.
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