L'Histoire est-elle une connaissance du passé ou une construction du passé ?
Extrait du document
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Analyse du sujet :
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Si l'on devait faire l'histoire de l'Histoire, on se rendrait compte qu'elle trouve naissance chez Hérodote,
un Grec qui mélangeait allégrement les faits avérés avec des interprétations mythologiques.
La genèse de l'Histoire semble donc se rattacher à la volonté d'un homme de retrouver des faits réels et
de les rallier à une interprétation divine.
En cela, l'Histoire ressemble plus à une construction inspirée de faits
réels qu'à une véritable connaissance du passé.
Cependant, désormais promue au rang de science humaine, l'Histoire se veut une connaissance
objective des faits passés.
En conséquence, elle aspire à la neutralité et à la recherche de la vérité.
Elle ne prétend donc pas
construire le passé comme qui en inventerait l'histoire, mais retrouver ce qui s'est réellement passé grâce à
des indices.
Si tel était le cas, si l'Histoire parvenait à une connaissance objective des faits passés, tous les
historiens auraient le même point de vue et la même interprétation de ces faits.
Or, il n'en est rien, et les historiens semblent tous se battre pour réussir à imposer leur interprétation.
Cela ne devrait-il pas nous incliner à penser que l'héritage d'Hérodote est finalement encore lourd ?
Problématisation :
Ce sujet pose problème parce que nous savons bien que si l'Histoire était une pure construction du passé, alors elle
ne se distinguerait plus vraiment de la mythologie et elle perdrait le sens même de sa recherche.
Ce faisant, si
l'Histoire était une connaissance du passé, elle ne ferait l'objet que d'un travail de recherche où les connaissances
s'accumulent petit à petit et elle ne serait pas sujette à tant de controverses.
Or, régulièrement, de grands
historiens « revisitent » l'Histoire et en donnent une interprétation différente, voire opposée à celle de leurs
prédécesseurs.
Comment rendre compte de ce paradoxe ?
Proposition de plan :
1.
La prétention de l'Histoire à l'objectivité.
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« Le bon historien n'est d'aucun lieu ni d'aucun temps » écrivait Fénelon.
Il voulait mettre en avant le fait que l'Histoire doit être objective.
C'est pourquoi l'historien ne
peut pas se permettre d'être le partisan de son pays ou de son époque.
L'historien doit donc se dégager de toute emprise subjective pour pouvoir s'élever à une
connaissance véritable des faits.
Il devrait en conséquence éviter toute « construction » du passé, ne pas chercher à le
construire, mais à le retrouver tel qu'il est.
En effet, construire le passé, c'est se servir de son imagination pour élaborer quelque chose
qui « tienne debout », qui soit cohérent en dépit du manque d'information dont nous disposons sur
ce passé.
Par contre, retrouver le passé, ce serait découvrir les faits passé dans leur vérité même, tels
qu'ils ont eu lieu, et non tel qu'on imagine qu'ils ont eu lieu.
C'est parce que l'historien se plie à une telle méthode que l'Histoire peut être appelée une
science et qu'on suppose qu'elle rend compte de la vérité.
Mais cette règle d'or de l'objectivité peut-elle réellement être appliquée ? Cette objectivité
historique n'est-elle pas elle-même un mythe ?
Beaucoup de penseurs d'aujourd'hui ne croient plus que l'idéal d'objectivité impassible dont les positivistes avaient
rêvé, que Fénelon lui-même prônait jadis (« Le bon historien n'est d'aucun temps ni d'aucun pays ») soit réalisable.
Dans toute la masse des faits du passé que nous pouvons reconstruire à partir de leurs traces, il nous faut faire un
choix.
Mais comment distinguer le fait historique, le fait important du fait non historique insignifiant ? Seignobos
disait que l'on juge de l'importance d'un fait à ses conséquences mais celles-ci à son tour ne seront-elles pas
appréciées subjectivement par l'historien? On connaît la boutade de Valéry.
La découverte des propriétés
fébrifuges de l'écorce de quinquina au XVII ième serait plus importante que tel traité signé par Louis XIV parce les
conséquences de ce traité sont aujourd'hui effacées tandis que « les régions paludéennes du globe sont de plus en
plus visitées… et que la quinine fut peut-être indispensable à la prospection et à l'occupation de toute la terre qui
est à mes yeux le fait dominant de notre siècle » (« Variété IV »).
Ce qu'il faut retenir de la boutade de Valéry,
c'est qu'il n'y a pas en histoire de signification absolument « objective » d'un fait et que c'est en fonction du
présent que nous donnons à tel ou tel fait passé une signification et une valeur.
Nous autres, hommes du XX ième,
nous sommes surtout attentifs dans le passé aux faits économiques, tandis que par exemple les chroniqueurs du
moyen âge voyaient d'abord les faits religieux (le récit du moindre « miracle » était pour eux essentiel).
Aucun
historien, prétend-on communément aujourd'hui, ne peut échapper à sa subjectivité.
Michelet, pour écrire son
« Histoire de France », voulait oublier l'époque contemporaine, s'interdisait de lire le journal, s'enfermait toute la
journée aux Archives.
Cela ne l'a pas empêché d'écrire une histoire à la fois jacobine et romantique, une « épopée
lyrique » de la France.
Il a projeté dans son œuvre des valeurs sentimentales, des partialités politiques, si bien qu'on
a pu dire que « l'histoire de France de Michelet nous apprend plus de choses sur Michelet lui-même que sur la
France » !
Raymond Aron a bien mis en lumière la subjectivité de la connaissance historique.
Pour lui, la réalité.
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