l'expérience immédiate est-elle source de vérité ?
Extrait du document
«
On vous interroge ici sur la réduction de l'origine de nos idées à l'expérience.
On peut comprendre " expérience "
de trois manières : l'expérience, c'est d'abord l'impression que les choses font sur notre sensibilité, impression par
laquelle une réalité nous est donnée à saisir.
Ensuite, l'expérience, c'est, dans les sciences, la possibilité de conduire
une expérimentation visant à infirmer ou à confirmer une théorie.
Enfin l'expérience c'est le savoir et le savoir-vivre
acquis au fil du temps et à partir de l'existence humaine.
A chacun de ses sens peut correspondre une définition de
" pensée " : penser, c'est mettre en forme le donné sensible par des concepts , c'est observer, calculer et comparer
pour former une théorie scientifique , c'est enfin avoir l'intelligence de la vie et en comprendre le sens.
Or dans ces
trois cas, la conscience (entendement, imagination , mémoire) intervient, ce qui indique bien que l'expérience pour
être parlante doit être construite par la conscience elle-même, de sorte qu'elle n'est jamais immédiate.
Qui plus est
je peux penser quelque chose sens en avoir l'expérience sensible (pensez à la religion ou même aux mathématiques).
1] L'EXPÉRIENCE IMMÉDIATE COMME CRITÈRE DE VÉRITÉ (L'EMPIRISME ANGLAIS)
L'empirisme affirme qu'il n'y a rien dans l'entendement qui n'ait été auparavant dans les sens, cad que
l'expérience est la source de toutes nos connaissances.
Toutes nos idées ne sont jamais, comme dit Hume, que
des « copies de nos impressions sensibles ».
Non seulement l'expérience
est la source de nos idées mais encore elle explique l'association de ces
idées entre elles, cad le fonctionnement de notre esprit.
Qu'il s'agisse
d'association par ressemblance (deux idées s'appellent l'une l'autre quand
leurs objets ont été donnés de nombreuses fois soit l'un à côté de l'autre,
soit l'un après l'autre).
C'est toujours dans des expériences antérieures et
répétées que se trouve la raison de ces associations.
Une autre solution consiste à affirmer que toutes les connaissances
de l'homme, y compris les principes de la raison dérivent de l'expérience.
C'est ainsi que pour Locke, il n'existe ni connaissance ni principe inné.
Dans
« Essai sur l'entendement humain », critiquant l'innéisme de Descartes,
Locke avance la thèse de la « table rase » : l'esprit de l'être humain, avant
toute expérience et éducation (celui du nouveau-né par exemple), est comme
une tablette de cire, vierge de toute écriture.
Nos idées simples viennent de
la sensation et de la réflexion.
Les idées complexes et en particulier les
catégories de substance, de mode et de relation sont le produit de la
combinaison des idées simples.
Pour Hume aussi les principes de la raison ne
sont pas innés mais acquis par l'expérience.
Comme philosophie générale, l'empirisme affirme avec Locke que nos idées ne
sont pas, comme le pensait Descartes, innées, mais qu'elles proviennent de l'expérience.
On peut décomposer la
philosophie empiriste de la connaissance en trois moments.
1.
L'origine des idées.
L'esprit, dit Locke, est d'abord une page blanche, une « table rase » (tabula
rasa).
« Comment vient-il à recevoir des idées ? Par quels moyens en acquiert-il cette prodigieuse quantité
que l'imagination de l'homme, toujours agissante et sans borne, lui présente avec une variété presque
infinie ? D'où puise-t-il tous ces matériaux qui sont comme le fond de tous ses raisonnements et de toutes
ses connaissances ? A cela je réponds d'un mot : de l'expérience.
C'est le fondement de toutes nos
connaissances, c'est de là qu'elles tirent leur première origine.
» (« Essais sur l'entendement humain »).
L'expérience est donc d'abord pour l'empirisme une réponse à la question de l'origine des idées.
Ainsi, un
certain nombre d'idées naissent dans l'âme des « observations que nous faisons sur les objets extérieurs et
sensibles » (idem).
C'est le cas d'idées comme « dur », « mou », « blanc », « jaune »...
Locke les appelle
des « idées de sensations » : nous nous les représentons que parce que nous avons eu l'expérience sensible
du mou, du blanc, du jaune....
Pour un empiriste, un aveugle de naissance ne saurait avoir aucune idée des
couleurs.
Les autres idées viennent non de l'expérience externe, mais de l'expérience interne ; cad des
observations que nous faisons sur « les opérations intérieures de notre âme ».
Telles sont les idées de
« joie », de « peine », de « plaisir », de « douleur »...
Ce sont des idées de réflexions.
Dans les deux cas, les
idées sont, comme dit Hume, des « copies » des impressions sensibles.
2.
La composition des idées.
En faisant naître les idées de l'expérience sensible, comment pourrionsnous rendre compte de l'infinité des idées que l'esprit peut concevoir, alors que est toujours limitée ? Je peux
me représenter une montagne d'or, ou un centaure : comment est-ce possible ? La réponse est : grâce à la
possibilité de combiner ou d'associer les idées, que Locke comme Hume attribut à l'imagination.
L'empirisme
distingue entre les « idées simples », cad inanalysables en éléments et immédiatement dérivées d'expériences
sensibles élémentaires (telles les idées de « rouge », « chaud »...) et les « idées composées », qui, elles, sot
des résultats d'une combinaisons d'idées simples.
3.
La signification des mots.
L'expérience comme contrôle.
L'expérience n'est pas seulement une
origine ; elle est aussi ce à quoi il faut retourner pour éprouver la valeur de nos pensées ou plus exactement
de notre langage.
Les mots dépendent des données sensibles particulières, aussi généraux et abstraits.
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