L'Etat est-il plus à craindre que l'absence d'Etat ?
Extrait du document
«
Approche:
Le sujet invite assez directement à comparer deux grandes positions opposées de la philosophie politique.
La
première, représentée par exemple par l'anarchisme et le marxisme, propose l'idéal d'une société sans État, et
soumet l'État à une série de critiques radicales : il est au service de la classe dominante (marxisme), il est par
nature oppresseur, étouffant, il nie l'in-dividualité, empêche la créativité des individus (anarchisme).
Le seconde
position, au contraire, fait de l'État la substitution du règne de la justice à celui de la force (Hobbes, Rousseau), le
garant de la sécurité des individus (Hobbes), voire de leur liberté (Locke, Rousseau).
Seul un État peut ériger des
règles de droit, promouvoir la citoyenneté, instituer une autorité légitime.
L'absence d'État serait alors un « état de
nature » dont il serait toujours avantageux de sortir : soit parce qu'il est un état permanent de guerre de chacun
contre tous (Hobbes), soit parce que les hommes y vivent pacifiques et libres, certes, mais sans aucune garantie
institutionnelle pour cette liberté (Locke), soit parce que l'homme n'y vit que comme « un animal stupide et borné »
(Rousseau).
En posant la question « que faut-il craindre le plus...
? », le sujet indique que chacune de ces deux positions fait de
l'autre une menace : l'anti-éta-tisme fait de l'État un mal et la philosophie politique classique (Hobbes, Locke,
Rousseau...) voit dans l'État le moyen d'échapper à un mal.
Hobbes dira ainsi que si dans l'état de nature, l'homme
est un loup pour l'homme, dans l'État il est au contraire un Dieu pour l'homme.
On remarquera que l'anti-étatisme n'est pas une critique de certaines formes d'État (États despotiques, tyranniques,
totalitaires...), mais de l'État en tant que tel.
On remarquera en revanche que la philosophie classique de l'État n'est
pas une apologie de l'État quelles qu'en soient ses formes, mais une tentative de trouver un fondement légitime à
l'autorité politique.
Cette justification de l'État n'est donc pas incompatible avec une critique éventuellement
virulente (c'est notamment le cas chez Rousseau) des formes d'État existantes, lorsque celles-ci ne sont pas
considérées comme légitimes.
Ces remarques sont importantes pour orienter la réflexion : l'anti-étatisme n'amalgame-t-il pas dans une même
critique des formes d'État très dif-férentes ? S'il trouve des arguments dans l'analyse des États dictatoriaux, n'a-t-il
pas tendance à faire de tout État une dictature ? Or, tous les États sont-ils des dictatures ? L'État de droit n'est-il
qu'une dictature déguisée ? N'est-il pas plutôt un meilleur rempart contre les dictatures qu'une société sans État ?
Introduction
L'Etat apparaît au Sumer et en Egypte, vers 6000 avant Jésus-Christ.
Les historiens supposent que l'Etat est né
pour organiser des grands travaux d'irrigation.
Il procurait en échange la sécurité aux agriculteurs.
L'Etat avait déjà
à cette époque un corps régalien (qui ne produit pas mais vit de la production et l'organise).
Ainsi avec l'Etat naît le
pouvoir légitimé ; Max Weber dira que « l'Etat a le monopole de la violence légitime » (Le savant et le politique).
Ce
qui implique que la violence est l'instrument du pouvoir.
L'Etat en ce sens est ce pouvoir d'instituer des lois, qui
peuvent être arbitraires, à toute la société sous son régime.
D'autre part, l'absence d'Etat organisateur peut
entraîner de la même manière l'arbitraire de quelques uns, en ce sens que l'Etat du plus fort (physiquement)
prendrait place en instituant des droits inégaux.
On peut montrer désormais que l'Etat est à craindre quand il ne
répond pas au devoir de liberté pour tous, c'est-à-dire quand seuls une minorité s'arroge le droit de diriger un
peuple.
I.
Les pathologies de l'Etat
a.
La tyrannie : c'est quelqu'un ou un groupe qui détourne la hiérarchie étatique à leur service.
Chez les Grecs
c'est le pouvoir politique exercé non pas en vertu d'une légitimité politique (héréditaire ou élective) mais par la
violence ou une éloquence qui séduit le peuple (cf.
la République de Platon, ou La Politique d'Aristote).
Le tyran est
un despote, l'homme du pouvoir arbitraire et oppressif, « sans égard à la justice et aux lois » selon Rousseau.
De
plus, l'Etat tyrannique peut subsister en posant des complices dans toute sa hiérarchie.
Et La Boétie présentera la
mécanique infernale de cet Etat : « plus les tyrans pillent, plus ils exigent ; plus ils ruinent et détruisent, plus on leur
fournit, plus on les gorge » (Discours de la servitude volontaire, 1553).
Mais ce n'est pas seulement la force pour La
Boétie qui désigne la tyrannie.
En effet « le tyran asservit les sujets les uns par le moyen des autres » (ibid).
Le
peuple, en même temps opprimé et oppresseur, est lui-même complice ; ainsi, seul le peuple a le pouvoir d'instaurer
la liberté.
b.
L'Etat totalitaire se différencie de la tyrannie en ceci que le dictateur défend une idéologie, alors que le tyran
n'a en vu que ses intérêts.
Le dictateur veut imposer son comportement idéologique à toute la société.
Le tyran, lui,
se contente d'exploiter la société à son service.
Le mot « totalitaire » renvoie à une conception totale et
englobante de la société.
Pour un tel système, l'individu n'existe qu'au service de toute la société et surtout de
l'idéologie.
Donc on peut le sacrifier à tout moment.
Le tyran élimine les complices qui le menacent, le dictateur
élimine tous ceux qui ne sont plus utiles à ses projets.
On donnera l'exemple de « la nuit des longs couteaux » (30 juin 1934), quand les chefs de la SA (section
d'assaut) dont le chef d'état major est Ernst Röhm, sont éliminés par les SS, et ce sous l'ordre du Führer.
Hitler
devait pourtant beaucoup à la SA.
C'est pareil que ces purges de Staline (1930) où on élimine des cadres du PC.
L'Etat totalitaire devient une hiérarchie fluctuante, où se créent sans cesse de nouveaux organes, de nouvelles
élites dans l'élite.
Aussi il génère des catégories d'indésirables qu'il faut encadrer sans troubler la conscience de cet
encadrement.
Par exemple, on invente une hiérarchie dans les camps de concentration où les pires actes sont
commis par les prisonniers eux-mêmes (Kapos, droits communs)..
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