L'Etat domine-t-il ou libère-t-il ?
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L'Etat domine-t-il ou libère-t-il ?
L'Etat :
C'est une communauté juridique, un ensemble d'individus soumis à une même législation, une même autorité politique.
L'Etat, c'est cette autorité même, c'est-à-dire l'ensemble des structures par lesquelles il manifeste son autorité.
Ce sujet nous demande en fait de réfléchir sur le fondement de l'Etat.
Parce qu'en fonction de la réponse se déterminera la
nature dominatrice ou libératrice de l'Etat.
I.
La conception théologique de l'Etat : l'Etat divinisé, l'Etat absolu.
Si l'on considère que le souverain est soit Dieu lui-même, soit un représentant de Dieu sur terre, alors l'autorité est
transcendante, elle n'émane pas des individus.
Par conséquent, la doctrine politique qui s'applique à cette théocratie, c'est
l'absolutisme, ou encore le totalitarisme.
L'individu n'a pas de valeur en lui-même, il est réduit à l'obéissance, c'est un sujet
et non un citoyen.
Le souverain n'est donc pas responsable devant ses sujets, pour Bossuet, l'Etat n'a pas à rendre des
comptes aux hommes.
Le roi n'est responsable que devant Dieu.
Cet absolutisme suppose une philosophie pessimiste de
l'homme.
Car la raison pour laquelle les sujets doivent au représentant de Dieu une obéissance inconditionnelle, c'est
parce que l'homme, est radicalement mauvais depuis le péché originel.
Après le Léviathan de Hobbes, Hegel pousse à la
limite la théorie absolutiste, car ici c'est l'Etat lui-même qui est divinisé.
Il cesse d'être un simple agrégat d'individus pour
devenir un organisme dont les individus ne seraient que les organes.
Il les arrache à leur égoïsme parce qu'il les introduit
dans une existence de dévouement et de sacrifices.
L'Etat, c'est en fait l'incarnation de l'Esprit dans la réalité donc, le Dieu
réel, le terrestre divin.
Aucun aspect de la vie de ceux qui lui sont soumis n'échappe à cet Etat et c'est pourquoi on le
nomme Etat totalitaire.
Après Hegel, les néo-hégéliens de droite, en particulier les fascistes, tentent d'appliquer cette
doctrine.
Benito Mussolini, qui prit le pouvoir en Italie après la Première Guerre mondiale, condamnait tout à la fois ce qu'il
appelait le mythe de la liberté individuelle et celui des valeurs universelles, telles que la justice et la vérité.
Les individus
doivent s'effacer devant l'Etat totalitaire et absolu, rien ne doit se faire en dehors de l'Etat et tout doit se faire pour l'Etat.
Force est de constater que l'Etat domine, absolument.
II.
Détruire l'Etat pour libérer l'individu
En réaction à cet Etat liberticide, une théorie tout aussi radicale, en négatif, voit en l'Etat le mal absolu : l'individu doit
s'affirmer comme valeur suprême.
Lorsque le citoyen se laisse enfermer dans sa condition de sujet, lorsqu'il obéit, il
abdique, il détruit sa personnalité et ce qui est considéré comme son essence.
C'est la théorie anarchiste de Bakounine ou
de Jean Grave.
Il faut donc se révolter contre toute autorité, le mot d'ordre c'est « Ni Dieu, ni Maître ! ».
Il faut bien voir
que ce n'est seulement la liberté individuelle que les anarchistes cherchent à garantir, c'est également la paix.
L'Etat ne se
pose qu'en s'opposant à d'autres Etats : en conséquence il rompt la solidarité universelle et engendre conflits, guerres,
souffrances.
L'Etat c'est donc le plus grand obstacle à l'épanouissement des valeurs universelles.
Il faut donc détruire
l'Etat.
Est-ce pour autant qu'il faille instaurer une sorte d'immoralisme antisocial ? Non, puisque l'individu ne peut
s'épanouir qu'à l'intérieur de rapports sociaux.
Mais ceux-ci sont librement consentis.
L'Etat domine parce qu'il est artificiel,
il est une caricature de la société naturelle.
Il faut donc mener une révolution pour abattre l'Etat, ses juges, ses policiers,
ses armées.
Il sera alors possible d'établir sur les ruines de l'Etat, des associations librement consenties.
Le postulat
anarchiste est donc complètement opposé à celui des totalitaristes : l'homme est naturellement bon, il ne demande qu'à
aider son semblable et vivre avec lui.
C'est pourquoi il n'a pas besoin d'organisation artificielle qui régisse les rapports de
la société, il n'a pas besoin de la contrainte et de la répression de l'Etat.
Le problème de cette doctrine est qu'elle
considère elle aussi qu'il y a une nature humaine : mauvaise pour les totalitaires, bonne pour les anarchistes.
Or il est de
plus en plus évident que l'homme n'est ni bon, ni mauvais pas nature, qu'il est un être toujours confronté au choix.
Il peut
donc faire le choix du vol, de la domination, du pouvoir.
L'absence d'Etat devient alors une soumission aux passions et à la
contingence.
III.
L'Etat démocratique : l'Etat garant des libertés individuelles
Il apparait donc nécessaire de réconcilier la liberté individuelle et la discipline étatique.
Il est à retenir que l'homme est la
valeur en soi, que le bonheur est la seule fin en soi que l'on puisse envisager.
Néanmoins, face aux dérives de l'anarchie,
il est nécessaire que l'Etat existe, cette entité abstraite qui doit s'incarner en institutions, en administrations et en
règlements, en lois.
L'Etat n'est pas la fin en soi, il est un moyen, nécessaire pour la réalisation des aspirations
individuelles.
L'autorité de l'Etat va protéger les personnes, les libertés de chacun contre tous les empiétements injustifiés
d'autrui.
Dans le Contrat Social, Rousseau exprime de façon magistrale ce que l'on appelle la doctrine contractuelle.
L'Etat
n'a pas d'autre but que de réaliser la liberté et l'égalité auxquelles tous les individus ont droit.
La loi devient la réalisation
de la liberté.
La seule autorité législative, c'est la volonté générale, c'est-à-dire la volonté raisonnable.
C'est l'opposition
des passions qui rend nécessaire le contrat : les hommes délibèrent sur leurs intérêts communs et raisonnables.
Pas
d'illusion cependant que le fait que la volonté générale n'est pas la volonté universelle à tout moment, il ne faut donc
jamais oublier les droits de la minorité.
Dans un régime démocratique, chaque individu a non seulement des devoirs mais aussi des droits.
Un équilibre s'instaure
entre ce que l'individu se doit de donner à l'Etat et ce qu'il en reçoit.
Sa liberté réelle est à ce prix et l'on estime que ce qu'il
aliène est inférieur à ce qu'il reçoit.
Il obéit à l'Etat en vue de l'obtention du bien commun, mais ces libertés civiles sont
garanties..
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